journal de mes classes de BEP MVA

2MAb3 1999-2000 - 2MAa3 1999-2000 - 1MAb1 2000-2001 - PPCP
retour en page pédagogie


1ère saison, 1999-2000 : 2MAb3 et 2MAa3

Voilà un journal retraçant les travaux en atelier, la technologie, la gestion au jour le jour.
En effet, si l'on peut trouver relativement facilement des "leçons-type", il est beaucoup plus rare de trouver un "programme" concret sur deux ans de BEP.
J'ai toujours eu ce regret, surtout au démarrage de ma carrière, de n'avoir aucune information concrète quant à l'enseignement sur la durée d'un cycle scolaire.
Cette expérience n'aura, en aucun cas, valeur de référence absolue (je n'ai pas cette prétention, heureusement) mais pourrait constituer la base d'une vraie réflexion sur notre enseignement.

Ce journal démarre, après un gros travail de préparation tout cet été, sur de bonnes résolutions, un peu ambitieuses, sans doute, peut-être critiquables, mais je pense, et penserais toujours, qu'il vaut mieux faire que penser, qu'il est plus facile de construire à partir du concret que de s'en tenir à des déclarations d'intention vaines.
On verra ce qu'il deviendra en cours de route (je m'engage à une tenue sincère et sans concession).
Premier aléa, je l'ai recentré sur la classe de 2 MAb 3, le groupe que je suis dans tous les matières liées à la maintenance des véhicules automobiles, la classe de 2 MAa étant fortement perturbée par l'absence de deux professeurs de mécanique automobile (non encore nommés ce jour).

Cette "progression" (il s'agit bien là d'une nécessité pédagogique, avant tout) essaiera de ne pas être trop perturbée par les désormais obligatoires véhicules-clients (pas facile de faire travailler 2 x 8 élèves sur 3 places encombrées par des voitures-tampons.
Ces véhicules apparaîtront en italique dans ce document, avec des notes quant à leur opportunité.
Se reporter à la page séquence 2000pour avoir une vue de la progression retenue.

La technologie et la gestion de la réparation (BEP Maintenance des Véhicules Automobile) seront traitées dans le même état d'esprit.
Je vous proposerais un nouveau regard (chronologie) sur les programmes de technologie et de gestion.
Il ne s'agit pas d'une "nouvelle technologie" quoique les contenus, liés à l'évolution des techniques automobiles mérite quelques aménagements, sans jamais renier les enseignements de base, "alphabet" de la technique automobiles (comme les gestes techniques de base, alphabet de la réparation automobile) curieusement négligés ces temps-ci , y compris dans les examens liés aux diplômes (ou comment apprendre à lire à quelqu'un en lui faisant analyser le Protagoras de Platon !!).
Les objectifs sont d'intéresser davantage les élèves en leur proposant non pas un "catalogue" un peu abscons mais des informations pratiques liées aux systèmes et à leurs technologies.
Pourquoi commencer d'abord par le cycle à quatre temps quand il semble plus opportun de parler des lubrifiants et des pneumatiques, sachant qu'un élève, ou un mécanicien d'ailleurs, commencera toujours par faire des vidanges et des opérations d'entretien de station avant de démonter des moteurs ?

2ème saison, 2000-2001 : 1MAb1

Ce groupe est la continuité du groupe que j'ai eu en première année (2MAb3), ce qui permettra de "boucler"; je l'espère, la totalité d'une "vie" de classe de BEšP MVA en deux ans au Lycée Professionnel.
Mon emploi du temps est complété par un pavé de 6 heures en atelier avec un groupe de seconde, temps trop court pour reprendre le "schéma de fonctionnement" de l'année précédente... il va falloir s'adapter, comme d'habitude...

J'ai attendu la rentrée avec impatience, en fait, surtout après la pire prérentrée qu'il m'ait jamais été donné d'endurer (le mot est faible, et la déception pas encore digérée).
J'ai longtemps cru, naïf, que l'Education Nationale était d'abord composée de profs et d'élèves (je parle de profs devant leurs élèves)... une évidence un peu... oublié ces temps-ci.
Il est triste de voir que tout notre travail est aussi méthodiquement et minutieusement sapé par un ramassis d'incompétents (leur manière "d'ouvrir le parapluie" est assez éloquente) dont la seule activité, la seule raison d'être est de détruire tout le travail que nous essayons d'entreprendre (l'effet Allègre, sans doute).
En un mot, ils m'enm...
Il est à noter que la totalité des réunions que nous avons du subir (le mot est faible) ne concerne, hélas, en aucune manière la pédagogie, c'est-à-dire les élèves eux-mêmes.
Mais qui s'en soucie, sinon les profs eux-mêmes qui réussissent, malgré lmes innombrables embûches disposées çà et là à "faire tourner la baraque".
Certains (trop nombreux) doivent sans doute penser qu'enseigner n'est qu'un aimable loisir nous laissant trop de temps libre (???) et donc nous imposent des tâches qui ne sont pas les nôtres, tâches de plus en plus nombreuses et sans rapport aucun avec l'enseignement direct aux élèves (voire "l'étonnante" gestion des photocopies où l'on risque de passer plus de temps à travailler sur la forme - identifier les "ayant droits" - qu'à travailler sur le fond...).
M'enfin... heureusement qu'il y a les heures de cours, seuls à seuls avec nos élèves, presque en famille, non ?

Cette année scolaire, je suis professeur principal de cette section, ce qui me permettra de la suivre au plus près, toutes matières confondues.
C'est une occasion, peut-être, d'aller vers cette équipe pédagogique dont tout le monde parle mais qui, dans les faits, n'a jamais existé.

A noter que les fiches d'activité de terminale ont été éditées, et elles sont particulièrement pertinentes.
Reste à les utiliser, ce qui est loin d'être le cas dans mon éblissement, aujourd'hui, hélas, et à mon plus grand étonnement (mon expérience personnelle montre à quel point ces documents sont indispensables, tant pour les profs - le suivi des élèves - que les élèves eux-mêmes - le suivi clair et net de leur propre progression.

La rentrée 2001

Difficile, très difficile... Les conseils de classe approchent, nous sommes bientôt à la moitié de l'année scolaire (qui se soucie de ce déséquilibre insensé dans le calendrier ?), et rien n'est encore en place.
Il manque un professeur de mécanique auto et rien ne bouge... Les heures consacrées à notre discipline s'amenuisent d'année en année alors que le contenu technique ne cesse d'augmenter, et ce dans l'indifférence générale.
Je suis un technicien de formation, mécanicien d'abord, et j'ai toujours la plus grande passion, le plus grand respect pour ce métier manuel... Un gros mot est lâché... "métier manuel"... Mais, tant que des voitures rouleront, tant que notre parc automobile sera constitué majoritairement, très majoritairement, de voitures qui nécessiteront de plus en plus de réparation (voir l'explosion du prix des voitures neuves et de leur coût d'entretien), il y aura des mécanos pour se salir les mains sur des mécaniques récalcitrantes...
Avec 30 millions de voitures roulant en France (2 millions de voitures neuves par an, la vitesse de renouvellement du parc est un calcul à la portée de n'importe quelle personne un temps soit peu sensée), l'âge moyen du parc dépassant les 7 ans, les MRA (mécaniciens réparateurs automobiles) ont de beaux jours devant eux....
Une voiture, malgré son électronique embarquée (et pas aussi "hermétique" que voudraient nous le faire croire les constructeurs... ce n'est qu'une question de compétence !) possède toujours un moteur, des roues, des freins, une boîte de vitesses, un embrayage. Il faudra bien que quelqu'un puisse les réparer, non ?
L'ignorance de ce métier, l'ignorance de la réalité de ce métier, l'ignorance de l'évolution de ce métier est impardonnable, à quelque niveau que ce soit.
Je suis professeur aussi, par vocation, par volonté de transmettre cette culture à laquelle je suis si attaché.
L'école, ce sont des élèves, et des professeurs, pour les élèves. Le reste n'est que perte de temps, que gesticulations inutiles.
C'est d'une telle évidence, d'une telle évidence...
Nous passons de plus en plus de temps à nous battre pour survivre, en tant que lycée professionnel public, formateur de base, à nous battre contre une tendance dérisoire à l'élitisme qui est une trop parfait reflet de cette société qui se fourvoie.
Il suffirait seulement d'un peu de bon sens, juste un peu de bon sens....
La place de la mécanique auto diminue dans notre atelier, à ma grande tristesse, la part de l'enseignement construit sur des bases solides, sur une vraie recherche de la pédagogie concrète, appliquée diminue, le professionnalisme se meure, simplement.
Des exemples ? Un stage sur le GNV (pour quelle application ?), la découverte du multiplexage (une technique déjà connue en électronique), le refus d'ouverture d'une formation de CAP électricien (2 établissement préparent ce diplôme en Ile-de-France alors que près de 80 % des véhicules modernes, équipés entre autre de climatisation, pourraient faire appel à ces spécialistes qualifiés), la dégénérescence du diplôme de BEP Maintenance des Véhicules, etc.
Voilà pourquoi cette rentrée est difficile, comme ce monde est difficile, qui se perd loin de trop simples évidences.
Heureusement, il y a les élèves... Même s'ils sont difficiles, même si chaque cours est une bataille, il y a toujours la petite lueur, l'espoir d'avoir réussi, même un peu... Nous avons leur avenir entre les mains, c'est bien de cela dont il s'agit, et c'est aussi une évidence un peu trop oubliée.
Alors, il faut continuer, même si on y croit un peu moins, même si c'est de plus en plus difficile, même si l'on a de moins en moins de soutien de ceux dont c'est le premier métier.... Et je continuerai....

La rentrée 2002...

Difficile, très difficile (euphémisme répétitif...).
Que rajouter à ce qu'était la rentrée 2002... Il manque toujours un professeur en mécanique auto (pratique pour mettre en place une pédagogie quand on doit gérer une situation d'urgence qui se pérennise....) et l'on "inaugure" une réorganisation pédagogique... Sans parler des première années de Bac Pro qui me "tombent" dessus sans que j'ai rien demandé.
Nouvelle équipe, nouveau référentiel... Nous sommes donc en phase de création d'une section.... Il me restera encore les nuits pour dormir un peu mais n'ébruitons pas cela, "ils" pourraient trouver le moyen de les occuper aussi...
Difficile de travailler sereinement quand chacune de vos idées, chacun des actes que vous effectuer est systématiquement démoli...
J'avoue être un peu... las de tout cela.
L'éducation nationale, l'enseignement est d'abord le fait des professeurs, de ceux qui tiennent "à bout de bras" un système qui ne leur oppose qu'embûches et défiance. Je suis prof depuis bien longtemps déjà et, contrairement à ce que pensent ceux qui n'ont pas fait l'effort de parcourir mon site, j'ai déjà réfléchit à ce que doit être la pédagogie, non pas de manière théorique mais de manière tout à fait pratique. Je crois en la pédagogie "appliquée", celle qui a cours chaque jour dans nos classes, dans nos ateliers.
La pédagogie par objectif, les fiches d'activités, l'évaluation des compétences, l'étude raisonnée du référentiel, une progression pensée et appliquée... Ce sont de bonnes idées... Je ne me rend pas bien compte, cela ne fait que dix ans que je travaille ainsi... Il suffirait de parcourir un peu ce site...
Alors, bien sûr, je suis un individualiste parce que je ne pense pas comme l'on devrait penser, le doigt sur la couture, parce que j'ai quelques opinions divergentes de celles de ceux qui "savent"... Avec l'âge, on perd patience et, surtout, on perd l'indulgence... Mon métier est d'enseigner, vers les élèves, du mieux que je puisse faire. Tant que j'y croirais encore, je continuerai à "encaisser" ce qui n'est que billevesées et scories... Et puis, il y a d'autres lycées en France, d'autres académies...
Cette année scolaire, je mettrai en ligne tous mes supports de cours de BEP MVA, cela terminera le cycle "BEP" commencé il y a quelques années et que j'aurais aimé clore avec un travail, que je crois encore "nécessaire" d'harmonisation des référentiels d'enseignement technique et général. Il y a là du temps à gagner pour nos formation, tant ce temps nous est réduit d'année en année...
Quant au PPCP, je ne participe pas cette année... C'est, je pense, une belle idée gâchée, tant ce support aurait pu, aurait du être mieux exploité.
M'enfin...

2003-2004...

Année de l'inquiétude, de l'incompréhension aussi...
L'enseignement professionnel public est en danger, menacé par l'incompétence coupable de "décideurs" trop sûrs d'eux, aveuglés par leur propres erreurs, par leurs propres mensonges aussi...
Nous formons des élèves dans le cadre des "métiers de service", et j'affirme que ces métiers seront encore là quand tous les autres auront disparus.
Eh oui, tout le monde ne roule pas en voiture neuve (beaucoup s'en faut), tout le monde ne construit pas une maison neuve quand un robinet fuit, quand une tempête arrache un toit, tout le monde n'achète pas un mobilier neuf quand un gond grince, quand un tissu s'effiloche un peu.
L'économie d'une nation ne se mesure pas à la santé de sa bourse, mais à la santé de ceux qui font l'économie, de ceux qui permette à cette nation de simplement fonctionner.
Bac +V, c'est bien, mais si nous ne formons que des Bac +V, à quoi cela servira-t-il ? Cela semble bizarre aujourd'hui, je sais, mais une entreprise qui n'aurait que des dirigeants n'a aucun avenir.
Pour être prof dans un lycée professionnel, il faut une licence aujourd'hui... Dans nos métiers, le seul débouché de ces licences est... l'enseignement.
La réparation automobile, celle qui "met les mains dans le cambouis", ce sont des mécaniciens (CAP-BEP) et des techniciens (Bac Pro, BTS soit Bac+2), rien d'autre.
Bien sûr, il y a les valises "magiques", mais je n'en jamais vu une changer un pneu, régler des culbuteurs (si si, les voitures ont encore un moteur), changer un embrayage, des amortisseurs ou des garnitures de frein.
Je sais, je suis un mécanicien "à l'ancienne", je ne connais rien à la réparation automobile moderne, celle qui se fait assis derrière un écran d'ordinateur...
Je suis de ceux qui croit qu'il est plus facile d'apprendre à lire en commençant par l'alphabet plutôt que par les oeuvres complètes de Nietzsche ou Kierkegaard, je suis de ceux qui continuent à refuser de croire qu'on construit une pyramide en commençant par la pointe.
Je suis aussi de ceux qui refusent le mépris affiché envers nos métiers de service.
Le "débat pour l'école" en un exemple de ce qui se prépare, dans ses à priori affichés : moins d'enseignement professionnel (CAP-BEP 17.4 % en 1998, 14 % en 2010...), élévation du niveau de diplôme des enseignants (alors que l'expérience "du terrain" est primordiale dans nos enseignements professionnels), diminution constante du temps consacré à l'enseignement professionnel (6 heures par semaine en Bac Pro) et du "poids" de cet enseignement professionnel à l'examen (coefficient 8 sur 28 coefficients au BEP).
Nous subissons les décisions de personnes qui ne connaissent rien à nos métiers et dont les certitudes sont inversement proportionnelles à leur incompétence, tout cela étant soigneusement relayé par les médias (entre incompétents...) et par ceux qui, sensé aider les professeurs dans leur travail, continuent à les considérer comme des débutants ou des ignorants.
C'est dommage... et inquiétant...