- Construire sa propre voiture : rêve ou réalité ? Utopie ou projet réalisable ?Voici le récit d'un amateur qui n'a pas 30 ans, qui ne dispose que d'un très modeste salaire et qui ne connaissait rien à la mécanique. Il avait tout de même quelque chose cet amateur : une envie forcenée de courir, une passion inexprimée mais énorme qu'il ne parvenait plus à contenir. Alors il s'est jeté à l'eau. Après avoir fait une saison comme navigateur, il a construit son buggy, seul, sans aide. Le 4 septembre, il a terminé 4e au scratch pour sa 3e course, la Ronde des terres de Beauce. Il explique ici comment on s'y prend pour monter un buggy.
La batterie est à l'avant pour un souci de répartition des masses. Le côté est cloisonné, les réservoirs seront ainsi à l'extérieur de l'habitacle.
Il ne m'aura pas fallu beaucoup de rallyes en tant que coéquipier pour me décider à passer de l'autre côté du levier de vitesses. Des "pourquoi pas moi" se glissaient insidieusement dans mes arrière-pensées entré les gauche à fond et les droit 110 de mes notes. En fait, l'envie de courir était ancrée en moi depuis bien longtemps et je savais que je ne serais vraiment heureux que lorsque je parviendrais à passer à l'action... ce qui me semblait assez difficile... question portefeuille comme dirait M. Barre
Lorsqu'on a un salaire à peine plus élevé que le SMIG comme c'est mon cas toutes les idées paraissent déraisonnables. Ça ne m'empêchait pas de me faire tout un cinéma : je pouvais par exemple, faire la Coupe Gordini avec une voiture d'occase, juste pour voir, ou bien acheter une Alfa 2000, toujours d'occase bien sûr, et faire des rallyes en groupe 1... mais les pneus, les engagements et les reconnaissances sont chers et je n'aurais guère pu faire plus de 2 rallyes par an, ce qui est certes mieux que de ne rien faire du tout, mais insuffisant pour étancher ma soif de conduire. Je suis prêt à faire bien des sacrifices mais je ne suis tout de même pas masochiste. Finalement j'ai penché pour une solution raisonnable : profitant de l'expérience que j'avais acquise au cours de toute une saison à côté de Pagani, saison où je m'étais rendu compte de l'importance du pilotage, je me suis décidé à me faire un buggy comme celui de Pagani.
Beaucoup pensent, et j'étais comme eux il n'y a pas si longtemps, que le tout-terrain n'a pratiquement rien à voir avec de la course automobile, car ils n'ont comme référence que les images rocailleuses du rallye des Cimes et de ses Jeeps. A tous ces sceptiques, je donne rendez-vous dans une spéciale de l'Infernal comme le "Fond d'Enfer" ou le "Paradis" ou sur le parcours de l'extraordinaire Ronde de la Première Terre : ce qu'ils pourront y voir les convaincra davantage que les meilleurs discours.
Si j'ai été assez long à me décider à faire du rallye sur terre, j'ai été plus rapide quant au choix du buggy : ayant fait toute la saison 1975 sur un Strakit et constaté la solidité et l'efficacité de l'engin, je n'allais pas cracher dans la soupe, surtout lorsqu'elle était aussi appétissante.
- Le châssis
La biplace Strakit a le train avant et la fourche du train arrière soudés au châssis - le bas de celui-ci est un assemblage de tubes à section rectangulaire ou carrée et ressemble beaucoup à une structure de barquette. Le haut du châssis, l'entourage du pare-brise et les arceaux sont en tube CD 24 très résistants. L'ensemble est extrêmement rigide.
L'esthétique et la solidité font bon ménage : le châssis pèse 130 kg et il est certain qu'il y a 30 kg à gagner mais abordez ce problème avec Strakit et ils vous répondront qu'un châssis est fait pour durer plusieurs saisons, ce en quoi ils ont tout à fait raison. La bipIace de Pierre Pagani avait cette année à la 1ère Terre, le même comportement que deux ans auparavant à l'Infernal où c'était sa première sortie et qu'elle avait gagné.
Outre le fait d'être une cage, le châssis a une originalité : le train avant est incliné donnant ainsi plus de chasse, donc un meilleur "rappel" à la direction. Le kit carrosserie est livré avec le châssis : il comprend les 4 ailes, les 2 capots, les 2 caissons latéraux et l'entourage de pare-brise, j'allais oublier l'aileron arrière, réglable bien sûr !!! Mais n'essayez pas de connaître l'angle idéal : c'est le seul secret de mise au point que Strakit ne livre pas et ils vous répondront de manière assez évasive en vous disant que les réglages d'une auto sont affaire subjective !
Comme je n'en suis pas encore aux réglages d'aileron (1), mieux vaut prendre mon courage à deux mains, les outils dans les deux autres et commencer. Avant d'avoir le kit, j'avais déjà acheté une épave de Volkswagen. qui n'avait d'épave que le prix (500 F, sans moteur mais en excellent état). Une clef de 13 et une clef de 17 suffirent pour séparer la coque du châssis. Celle-ci retirée on accède parfaitement aux trains avant et arrière et le démontage devient un jeu d'enfant. Après 15 heures de travail, la VW était désossée, de la boîte de vitesses à la biellette de direction et aussitôt je nettoyai chaque pièce au gas-oil : rien de tel que l'ordre et la propreté pour faire du bon boulot. Un conseil pour les débutants (personnellement j'en étais un puisque je ne connaissais strictement rien à la mécanique !) : démontez lentement et avec attention afin de comprendre l'assemblage des différents éléments... ce qui peut être utile lors du remontage !
- Le train avant
Une fois ces pièces repeintes, je commençai par remonter le train avant : les évolutions Volkswagen sont très simplistes et cette simplicité alliée à une surdimension de tous les éléments explique la très grande solidité de cette mécanique et son choix par presque tous les constructeurs de buggys.
Le train avant (choisissez de préférence un train avant d'à partir de 1967, car les articulations des bras par rotules sont préférables aux pivots) comprend deux corps cylindriques transversaux où logent des lames d'acier jouant le rôle de barres de torsion : elles sont fixées en leur milieu et sont solidaires des bras à leurs extrémités. Attention, un buggy étant plus léger qu'une Volkswagen, surtout de l'avant, il est préférable de ne pas conserver toutes les lames. Chaque tube comprend quatre grosses lames et six petites lames : personnellement j'ai supprimé toutes les petites lames. Si votre buggy reçoit un moteur refroidi par eau et qu'il faut installer un radiateur à l'avant, supprimez les petites lames, mais d'un seul des deux corps seulement. Le remontage des lames est assez long car il faut les loger dans une petite section rectangulaire qui les bloque. Mieux vaut le faire consciencieusement car c'est définitif : ce ne sera pas la peine de les retirer pour peindre le châssis. Une fois les lames en place, comme les bras et les fusées sont montées en provisoire, le châssis est déjà sur roues à l'avant.
Support moteur rigide, mais démontable. La boîte électronique de l'injection est protégée. Le 914 2 litres est très plat, à l'inverse du Renault, abaissant ainsi le centre de gravité.
Train arrière
Quand vous saurez qu'il y a une barre de torsion arrière gauche et une droite, vous en aurez pratiquement fini avec le train arrière. A ce sujet, choisissez bien sûr le train à trompettes : il est plus solide et parfaitement adapté au tout-terrain, beaucoup mieux en tous cas que le train à double cardans. De même, il est préférable de monter barres et lames de torsion de Volkswagen Variant, plus épaisses, donc plus solides. Une fois la boîte de vitesses remontée (4 boulons), le châssis est enfin sur ses roues. Le boîtier de direction, avec secteur d'origine est placé en 10 minutes. Les biellettes sont renforcées par du tube de diamètre supérieur. Strakit fabrique une colonne de direction enveloppant deux roulements à billes. Voulant limiter les frais au maximum, j'ai raccourci la colonne d'origine et j'ai placé un autre roulement, d'origine aussi, à l'autre extrémité.
- Les premières soudures
Une fois la colonne de direction prête, il faut la fixer sur le châssis. Comme je n'avais jamais soudé à l'arc électrique, je me suis d'abord "fait la main" sur des ferrailles qui traînaient au garage. Au début c'était plutôt du collage que de la soudure et quand les parties à souder étaient d'épaisseurs différentes, ça se terminait par des blasphèmes... et des trous. Mais comme dit le proverbe, c'est en soudant qu'on devient... rallyeman.
Comme la colonne de direction allait être cachée par le tableau de bord, c'est par elle que je commençai. Une fois celle-ci soudée à peu près potablement, je pouvais fixer le volant, le raccord entre la tige et le boîtier se faisant par cardan (à reprendre sur une direction de 1303) car l'inclinaison est différente de celle d'origine. Le volant en place, je pouvais positionner mon siège - comme celui-ci doit être réglable, j'avais récupéré dans une cave des glissières de 4 L qui ont l'avantage d'être peu coûteuses et peu encombrantes.
Pour pouvoir les souder, je les ai reliées par un fer plat pour être sûr qu'elles soient parallèles et qu'elles coulissent encore, une fois montées sur le châssis. Le siège est vite fixé, boulonné directement sur les extrémités des glissières. Les sièges Strakit sont des coques baquets en polyester très légères et très enveloppantes.
A ce stade de la construction, j'avais le sentiment que le plus gros du travail était fait. Je n'était pourtant qu'au début de mes peines.
- Le choix du moteur
En commençant à monter le châssis, je n'avais aucune idée précise sur le choix du moteur : j'hésitais entre le R 12 Gordini et le 4 cylindres Volkswagen Porsche 914. Le R 12 G est le plus attrayant car il a 120 CV, monte haut en tours et est donc plus agréable à conduire. Le 914 2L n'a que 100 CV mais un bon couple à bas régime. S'il ne tourne pas très vite (5 500 maxi) il a par contre deux avantages par rapport au R 12 G : il s'adapte directement sur la boîte VW et il est refroidi par air, ce qui supprime beaucoup de tracas au montage, et beaucoup d'ennuis à l'utilisation : pas de radiateur d'eau bouché, pas de durite qui crève. Son plus grand défaut est d'être très difficile à trouver.
Ce n'est qu'après trois mois de recherches que je trouvai à 3500 F une voiture complète qui avait fait un tonneau et qui était restée un an et demi sous la pluie. Heureusement, en position centrale sur la 914, le moteur se trouvait assez protégé. Une fois nettoyé, je montai le moteur sur la boîte pour commencer le berceau AR. S'il va directement sur la boîte VW, par contre, le volant moteur, d'un diamètre supérieur ne se loge pas dans la cloche de la boîte. Il a fallu que je me renseigne pour apprendre qu'il fallait rectifier l'épaisseur du volant de 4 mm au niveau des dents et qu'il fallait légèrement meuler l'intérieur de la cloche si je voulais conserver l'embrayage Porsche.
Je confiai donc le volant moteur à un tourneur mais je mis quand même en place le moteur, débarrassé de la turbine pour pouvoir faire les supports arrière.
Un tube coude en U, boulonné de chaque côté du châssis où viennent se fixer les Silentblocs moteur d'origine sert à la fois de support moteur et de support pour le blindage.
En tout-terrain, les vitesses sautent assez facilement. Pour éviter Cet inconvénient, il faut maintenir la boîte et la rendre beaucoup plus rigide. On peut réaliser soi-même les ceintures métalliques mais c'est à mon avis assez long et le résultat risque fort d'être décevant. Strakit vend les deux 250 F et leur efficacité est parfaite.
La ceinture arrière se boulonne directement sur la tôle qui maintient les Silentblocs de la cloche de boîte. Par contre, pour ceinturer le nez de la boîte, il faut faire des fixations de chaque côté de la fourche : deux morceaux de cornière de 5 mm d'épaisseur font l'affaire.
- le blindage
Plusieurs solutions peuvent être adoptées pour le blindage : il peut être fixe, c'est-à-dire soudé directement sur le châssis mais cette solution implique le démontage du moteur à chaque vidange.
De toute façon, mieux vaut éviter de percer le blindage au niveau du bouchon car des cailloux peuvent se glisser entre le blindage et le moteur et le moindre choc pourrait casser le carter.
Le blindage peut être démontable et j'ai choisi cette solution : c'est, une plaque d'aluminium de 8 mm d'épaisseur fixée à l'arrière sur le tube servant de support moteur, et à l'avant, sur une barre de fer creuse soudée en travers à l'extrémité de la fourche, rigidifiant celle-ci et l'empêchant de s'écarter. J'ai fait relever les bords longitudinaux de la plaque pour éviter les projections de cailloux sous le moteur. Ces plis ont été faits à la presse.
Le blindage de la boîte de vitesses est moins épais (6 mm) car il est beaucoup plus étroit : juste la largeur de la fourche.
- Positionner les amortisseurs arrière
1 - Train arrière VW avec, en pointillé, la direction que doivent avoir les fixations inférieurs d'amortisseurs. 2 - Extrémité de le trompette gauche avec fixations inférieures de l'amortisseur. 3 - Réglage de la suspension : la lame doit passer par le centre du trou fléché.
- Il me restait à positionner les amortisseurs arrière, travail essentiel et délicat. J'ai
utilisé, comme sur tous les buggy Strakit, le montage préconisé par Didier Lefort à savoir :
- - choix des amortisseurs : les De Carbon spéciaux (marqués Strakit) à fixation supérieure à tige et inférieure à oeil sont d'une extraordinaire efficacité. Parfaitement au point ils conviennent idéalement à nos types de buggys et il serait aventureux de monter autre chose à mon avis.
- suppression de l'attache inférieure d'origine sur la trompette.
- l'extrémité extérieure de la trompette VW décrit deux arc de cercle : l'un dans le plan du carrossage, variant du positif au négatif, l'autre dans l'axe longitudinal du buggy (du fait des bras tirés>, centré sur l'attache de la barre de torsion puisque celle-ci est reliée par une lame directe à la biellette... Il est donc impératif de tenir compte de ces deux arcs de cercle dans le positionnement des attaches d'amortisseurs arrière.. L'axe inférieur, en particulier, doit faire un angle de 45° environ avec l'axe de la voiture dans le plan horizontal. La fixation supérieure doit être inclinée vers le bas (de 20° à 30°) dans le plan vertical et très légèrement tournée vers l'intérieur.
- Tout ceci peut paraître empirique mais si c'est bien fait, ça ne cassera jamais. L'état de vos amortisseurs vous renseignera très rapidement sur la qualité de vos calculs. Mais ayant couru durant toute une saison à côté de Pagani, j'ai pu observer que nos quatre amortisseurs ont fait toute la saison (et même un peu plus) sans jamais donner le moindre signe de fatigue.
Un dernier détail : il est préférable de pointer les fixations et de vérifier tous les angles avec l'amortisseur monté avant de souder définitivement les pattes de fixation.
- La commande de boîte
Pour la commande de boite, comme support de levier de vitesses, j'ai tronçonné un tunnel VW et je l'ai soudé au châssis. Il faut ensuite raccourcir la tringle d'origine en prenant garde de respecter l'angle que fait l'axe, en communication avec la boîte et la pipe où vient se loger le levier de vitesses.
- Le pédalier
J'ai directement fixé le pédalier de la 914 sur le plancher, en ayant uniquement agrandi la surface des pédales. Le pédalier doit être fixé solidement, et après avoir pris les dimensions du pilote qui doit se trouver bien à la fois par rapport au volant et aux pédales. J'ai prévu deux câbles d'accélérateur (dans deux gaines séparées). Le câble d'embrayage peut être un VW ou un Renault.
Le cale-pied est indispensable pour le navigateur Comme son siège est fixe, il faut prévoir plusieurs fixations. J'ai préféré le siège fixe au siège réglable pour ne pas être gêné quand je me sers des freins à main.
- Le tableau de bord
Un tableau de bord découpé dans une feuille d'alu. Le coupe-circuit sert de clef de contact. Compte-tours et compteur de Porsche. Boîte à cartes (fonctionnelle), commande d'essuie-glaces et lave-glace en double.
J'ai découpé le tableau de bord dans une plaque d'aluminium. En plus du compte-tours, de la pression et de la température d'huile, j'ai ajouté, côté navigateur, un compteur de vitesses avec un index hectométrique bien utile pour l'appréciation des distances, facilitant ainsi le travail du coéquipier. La boîte à gants est le fruit de mes "tribulations", de navigateur ; n'ayant jamais su où mettre les notes et le carnet de bord.
Les harnais "4 points" se fixent facilement, en perçant les tubes du châssis.
Il m'a fallu plusieurs mois pour arriver à ce stade de la construction. Je connais des pilotes qui ont construit leur buggy en un mois, à la perfection : Chatriot ou Susset par exemple mais sans doute disposaient-ils de beaucoup de temps libre. Personnellement, devant traverser Paris pour me rendre à l'atelier que me prêtait un copain, je ne pouvais bricoler que durant les week-ends (du moins les rares où je ne courais pas avec Pagani !) et quelquefois le soir après le travail, quand je n'étais pas trop fatigué.
- Derniers détails
Pour peindre le châssis, j'ai tout redémonté et retourné le châssis pour bien passer sur les soudures. Ensuite il a fallu poncer mais j'étais tellement pressé de voir le résultat que le ponçage fut assez sommaire. Je dois dire qu'une fois peint, le châssis nu est très beau. Après, il a fallu tout remonter, de façon définitive cette fois, en bloquant chaque boulon au Loctite.
Une fois le train avant remonté avec direction et freins, (au fait, à propos des freins n'oubliez surtout pas de monter les tambours flasques et mâchoires de 1600 TL qui permettent de mettre des garnitures de 45 mm. Pour avoir omis d'observer ce conseil, je me suis retrouvé avec une voiture qui ne freinait pratiquement pas de l'arrière, et il m'a fallu changer les tambours) une fois remonté boîte, trompettes et ceintures de boîte, j'ai mis en place le moteur pour pouvoir entamer le circuit électrique.
En commençant, j'avais l'impression de me lancer dans quelque chose d'irréalisable mais avec quelques conseils et beaucoup de patience, tout finit par fonctionner. J'ai branché en direct phares, codes, Klaxon, évitant ainsi fusibles et relais. Le moteur d'essuie-glaces est fixé derrière le tableau de bord ainsi que la pompe du lave-glace indispensable en tout-terrain. Toute l'électricité part, bien sûr, du coupe-circuit qui sert de sécurité en cas d'ennui.
Avant de fixer la carrosserie, il faut placer les réservoirs d'essence dans les flancs. Autour de ceux-ci j'ai expansé de la mousse pour la protection. Les réservoirs sont en tôle, à la dimension des caissons.
Une fois qu'elle a été peinte, j'ai fixé le carrosserie au châssis à l'aide de gros rivets pop.
Voilà :ce fut long, parfois difficile, souvent agréable mais avec des moments de découragement, mais ce que je peux vous dire, c'est que lorsque l'auto est finie, lorsqu'on bouge le premier bouton et que ça fait fonctionner les phares ou le Klaxon (ah le premier coup de Klaxon dans le garage !), lorsqu'on s'assoit pour la première fois derrière le volant, qu'on pousse le bouton du démarreur, qu'on enclenche la première vitesse et que ça se met à avancer, et lorsqu'on pense que tout ça, on l'a fait seul, avec ses mains, eh bien je peux vous dire que ça fait quelque chose, que ça vous remue jusqu'au fond des entrailles. Je me demande si autre chose peut procurer autant de joie dans la vie.
Premier rallye !
Un jour, bien sûr, le buggy a été terminé. Ma première sortie ne fut pas très brillante : c'était à la Ronde de la 1ère Terre en juin. Ce rallye, je l'avais déjà fait 2 fois, les années précédentes, comme coéquipier de Pierre Pagani. J'en rêvais jour et nuit. Mais mon buggy n'était pas tout à fait prêt : les derniers petits détails...
Le moteur allait bien : sa souplesse, son couple élevé à 3 000 tours compensaient le trou entre la 2e et la 23e de la boîte VW 1300. Et je crois que mon buggy aurait pu être dans le coup dès ce jour-là s'il n'y avait pas eu le problèmes des freins...
J'avais monté les mêmes tambours à l'arrière qu'à l'avant. Or il y a beaucoup de poids sur l'arrière et le résultat c'est que seules mes roues avant freinaient... à la moindre sollicitation de la pédale. Autant dire que chaque virage représentait une "chaleur" en puissance ! Faute de pouvoir monter des tambours arrière plus larges sur place, je du me résoudre à partir ainsi.
Dans ces conditions, je n'étais pas mécontent de mon 14e temps dans la spéciale de sélection : ma première confrontation avec un chrono n'était pas trop catastrophique !
Le lendemain matin, au départ de la 1ère boucle, mon seul objectif était de freiner tôt pour ne pas être surpris. Pourtant au bout d'une longue descente très glissante, je n'arrivais plus à arrêter mon buggy. Je n'y parvins qu'en tirant les freins à mains. Je n'allais pas très vite mais je m'amusais beaucoup et c'était bien l'essentiel. La boucle (22 km) comportait 1 km en goudron et sur cette partie mon buggy freinait mieux (ou plutôt moins mal) : j'en oubliai ma décision de freiner tôt et ce qui devait arriver... arriva. Abordant une épingle gauche roues bloquées, je ne pus tourner que grâce aux freins à mains. Ayant ensuite trop accéléré pour rattraper l'auto, je suis arrivé trop vite dans le droit qui suivait : re-frein à main, tête-à-queue et bing dans un arbuste.
Le buggy n'avait pas de mal mais pour ce jour-là je préférai rester spectateur : mes freins ne me permettaient vraiment pas de continuer et le dois dire que spectateur à la 1ère Terre est un privilège car voir passer Thérier ou Nicolas en glissade sur le terre, c'est un spectacle qu'on n'oublie pas de sitôt !
Cette première sortie avait été plus un essai qu'un rallye. Le moral n'était donc pas entamé. Par contre le polyester lui l'était !
Mon premier vrai rallye a donc été le second : la Ronde des Chemins creux en Bretagne, cette fois avec de gros tambours à l'arrière et un freinage parfait. Ça ne m'a pas empêché de sortir au bout de 800 mètres de la spéciale de sélection, à cause d'un instant d'inattention. Avec mon coéquipier Christian Laignot et le concurrent parti une minute derrière nous, on a pu sortir la buggy de se fâcheuse position. Encore une fois il n'avait pas de mal mais je commençais à me demander si je savais conduire ou non. Lorsque j'ai pu repartir, je me suis traîné (20e temps dans la spéciale de nuit). Le lendemain, reprenant un peu confiance on moi, j'ai retenté d'attaquer un peu, puis un peu plus et à la fin, je sentais que j'avais enfin le buggy on mains : les temps descendaient à chaque boucle, je freinais tard, j'essayais de ne pas trop glisser mais mon enthousiasme me faisait décoller copieusement les 2 et 3 bosses que comportait le parcours. Le Strakit encaissait parfaitement ce traitement et Christian, à côté de moi, était hilare.
Dans le dernier tour, j'améliorais mon temps de plus de 20 secondes, réussissant un 6e temps scratch : inutile de vous dire que tous les ennuis étaient oubliés. J'étais 22e au classement général et parfaitement Heureux (avec un grand H). En plus, tant à la 1ère Terre qu'aux Chemins creux, j'avais trouvé une telle ambiance que tous mes efforts peur construire mon buggy trouvaient déjà leur récompense.
NDLR : Pour son 3e rallye, la Ronde des Terres de Beauce, Xavier Carlotti a terminé 4e du classement général.
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