LE CHATEAU DE

LA VERRERIE

L'histoire de la France, de sa reconquête par Charles VII contre les anglais, avec l'aide de ses alliés écossais, passe par le Berry et le château de La Verrerie constitue un témoignage intéressant de cette période.
On peut, on doit visiter ce château tant l'histoire, passée et présente, y est intéressante, tant les gens qui vous accueillent sont sympathiques.


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LE CHATEAU DE LA VERRERIE

De l'origine d'un nom

Le toponyme lui-même n'apparaît qu'à la fin du XVe siècle. Il traduit l'existence à cette époque d'une petite fabrique de verre qui se perpétuera, ou, en tout cas, reprendra vie au XVIIe siècle pour disparaître entre 1815 et 1820.
Par ailleurs, ce nom se répand facilement dans la région à une époque où la petite industrie du verre nécessite l'utilisation du sable de la Sologne et permet à de nombreux nobles d'établir quelques activités sans déchoir.

Une altière silhouette


Nuls remparts, fossés ou guérites au château de La Verrerie malgré une architecture massive.
Mais une somptueuse demeure d'agrément, sertie au milieu d'un écrin de forêts, de bois et de prés où seuls se font entendre les eaux de la Nère, et le bruissement des feuilles dans les frondaisons alentour.

Présentation générale du château


L'entrée se fait par le Nord, en passant sous un pavillon formant porche, et orné à ses angles de quatre tourelles. Au-delà, trois corps de bâtiments s'articulent autour d'une cour carrée, le quatrième côté formant, à l'ouest, une terrasse sur le paysage d'eau, de bois et de prairie de la campagne alentour : l'Histoire n'a rien conservé de l'ancien bâtiment, supprimé au XVIIe siècle, qui fermait alors cette cour aux vents...
À côté du pavillon d'entrée, complétant la face Nord de la cour, trône une élégante chapelle rattachée à un massif corps de logis sur le côté Est de la cour. Le rez-de-chaussée, qui supporte un étage et un toit mansardé, est barré en son centre d'une tourelle hexagonale renfermant un escalier en colimaçon.
Enfin, l'aile Sud, faisant face à l'entrée, présente une remarquable galerie ouverte sur la cour. Surmontée d'un étage, elle est encadrée de deux pavillons dont l'un, à l'Est, s'articule avec le corps de logis principal, et l'autre, à l'ouest, termine le bâtiment au bord de l'étang. Lui est accolée une tourelle d'escalier hexagonale qui dessert l'étage et les combles de la galerie.
A cette aile Sud furent ajoutés, du côté du parc, deux pavillons reliés entre eux par un couloir qui longe le mur de fond de la galerie, remplaçant les contreforts d'origine.

Plan schématique du château de La Verrerie


L'embellissement du château

Une seconde campagne de travaux semble avoir été réalisée à La verrerie, donnait à l'édifice un visage nouveau.
Cette campagne porte sur la construction de l'aile Sud du château.
Parallèlement à ce gros oeuvre, des travaux de décoration sculptée et peinte sont menés à la chapelle, à la galerie et au portail d'entrée. Effectués sur l'initiative de Robert Stuart, ces chantiers dateraient des années 1520-1521, soit quelques années après le décès de sa première femme, Anne Stuart, morte en 1516.
Ces constructions enrichissent grandement le premier bâtiment, constitué de la seule aile Est et qui comprend au rez-de-chaussée, outre une salle basse, les chambres de Monseigneur et de Madame, un étage avec une "chambre du roi" - après le rapide passage de François 1er ? - une salle haute et une "chambre verte". Au-dessus de cet étage, des combles aménagés en chambres annexes et galetas.

La Chapelle


Élégamment élancée avec sa haute flèche d'ardoises effilée, la chapelle de la Verrerie aurait été construite au XVe siècle, à l'initiative de Béraud. Gros oeuvre, menuiserie, fenêtres et travaux de peinture auraient à ce titre été achevés en 1498.
C'est à l'époque de son successeur, Robert, que l'on apprend que cette chapelle fut placée sous la protection de la Vierge et sous le vocable de l'Annonciation. A sa mort, la chapelle resplendit des mille feux de son mobilier précieux et de ses peintures.
La voûte, peinte en bleu semé d'étoiles d'or, montre une série de médaillons portant des bustes d'hommes et de femmes représentés, selon l'habitude de la Renaissance, dans un apparat lié à l'Antiquité. Il doit s'agir, tout comme les bustes décorant la galerie, de parents et de proches des Stuart, immortalisés sur la voûte lambrissée.
La partie supérieure des murs de la chapelle présente une colonnade dans laquelle apôtres et martyrs s'alignent sur un fond rouge semé de fleurs de lys de France et de chardons d'Ecosse.
Au fond du choeur, au-dessus de l'autel, figurent les quatre évangélistes, identifiables par leurs attributs (lion, taureau, ange et aigle) tandis que le pignon opposé, au-dessus de la porte d'entrée, s'orne d'une représentation de Saint Christophe.
Au fond de l'abside, sont représentés deux anges portant l'un l'oriflamme et le bouclier de Robert Stuart, l'autre les armes de Béraud Stuart et de sa femme Anne de Maumont.
L'autel, simple bloc, s'adosse à une petite cloison de pierre qui coupe l'abside pour dégager une petite sacristie. Cette cloison devait aussi permettre de porter une tribune de bois accessible de l'intérieur du corps de logis voisin par une porte qui existe encore.
Elle s'ouvre par deux portes de style ogival s'ornant toutes deux de tympans décorés des initiales A et R, et disposées de part et d'autre de l'autel.
Mobilier rapporté mais non moins intéressant que la décoration murale, deux statues aux visages mutilés se font face sur la cloison : sur la droite, la Vierge, et sur la gauche un ange. Leur vêtement présente une grande finesse, décrivant pour l'ange, en bordure de dalmatique, une broderie de "fermaillets" qui ne laisse aucun doute sur les attache de ce groupe de statues avec les seigneurs d'Aubigny. Le tabernacle en bois qui repose sur l'autel porte les armes de Robert Stuart. Retrouvé dans le château, il remplace un autre tabernacle de style baroque depuis les travaux de 1930.
Cette date marque un tournant, mieux, une résurrection pour la chapelle de La Verrerie. Pour une raison encore mystérieuse, ses murs avaient été recouverts d'un épais enduit qui masquait complètement les fresques. Le dégagement et la restauration de cette décoration furent alors confiés à l'artiste Yperman, qui avait auparavant travaillé au Palais des Papes d'Avignon.
En hommage à la famille de Vogüé, il aurait représenté sur le dernier médaillon, situé côté cour, l'une des filles de Louis, Marie, comtesse Terray, qui avait activement participé à la restauration de l'édifice.
Deux vitraux laissent passer une douce lumière dans la petite nef. Le premier date de 1942 et a été offert à Louis de Vogüé pour ses noces d'or. De bas en haut, il représente Rochecolombe, le berceau de la famille Vogüé, un ange portant la partie nouvelle du château auprès de l'édifice originel, les sept métairies de l'ancien domaine disposées en épis et divers souvenirs familiaux.
Le second vitrail évoque aussi des souvenirs familiaux : un égyptien, en souvenir de Louis de Vogüé, président de la Compagnie du Canal de Suez, ou encore une demeure féerique, en hommage à la Maison Enchantée, oeuvre de la marquise de Vogüé.

La Galerie, mythe italien ?


La construction de la galerie doit être attribuée à Robert Stuart, maréchal d'Aubigny, dans les premières années de son mariage avec sa seconde épouse Jacqueline de La Queille, soit aux alentours de 1520.
Il convient de ne pas accorder aux exemples italiens une trop grande influence sur le développement du style Renaissance en Berry, et singulièrement à La Verrerie. La tradition purement française des galeries de pierre, dont celle du palais Jacques Coeur de Bourges est un spécimen, est assez précoce dans notre région, notamment au début du XVIe siècle, comme à La Chapelle-d'Angillon, à Nançay ou à Bourges, aux Hôtels Cujas et Lallemant.
Du reste, le maître maçon qui a tracé et dirigé les travaux s'est contenté d'élever une construction très sobre. Utilisant au maximum la brique, il a appuyé la galerie couverte et fermée sur une colonnade de neuf arcades. Seuls les éléments pairs s'ouvrent par de larges fenêtres à meneaux croisés, appuyées sur un cordon à denticules qui court tout au long de la façade.
La pierre a été utilisée d'abord, pour marquer la séparation de ces travées dont elle souligne les rythmes verticaux et horizontaux, puis, pour les éléments décoratifs comme les encadrements des portes et fenêtres, et à l'usage des colonnes, arcs, et autres cordons et corniches.
La sobriété de cette construction est largement rachetée par la qualité de l'appareillage et de la décoration, ainsi que par les belles proportions des deux pavillons qui l'accostent à l'Est et à l'Ouest.
Cette galerie s'orne en effet d'une riche décoration. Des motifs, entre autres, de rinceaux, d'arabesques, de "fermaillets" et l'hélices couvrent la surface des colonnes.
A leur sommet, d'élégants chapiteaux décrivent une belle ornementation végétale. Des médaillons en marbre surmontent ces piliers, portant en relief des bustes d'homme ou de femme entourés de feuillages ou de "fermaillets" et dans lesquels, à l'instar de la chapelle, il n'est pas défendu d'imaginer quelques familiers des Stuart. Enfin, des pilastres aux fenêtres s'ornent encore de fines ciselures végétales, comme "en prodigue partout la Renaissance", et de "fermaillets", signe incontournable qui scelle dans la pierre la présence des Stuart et rapproche le château d'un visage plus local, plus familial, loin des hérissons et autres salamandres des pays de la Loire.

Les peintures de la Galerie Haute

De belles peintures, probablement de la première moitié du XVIe siècle, ornaient les murs de la galerie haute. Vers 1890, ces fresques furent recopiées sur toile et quatre d'entre elles, représentant quelques Stuart à cheval, furent reproduites à l'identique sous la colonnade. Deux autres, représentant des Stuart à pied, ont également été conservées et prêtées au Musée de la Vieille Alliance à Aubigny. Un de leurs auteurs est un certain Ian van Waveren, peintre et sculpteur hollandais originaire de La Haye mentionné par deux inscriptions gravées de la galerie haute.

LA VIE DU CHATEAU

La maison d'Hélène


L'histoire de la maison d'Hélène est à la fois simple et subtile. Le logis du XVIIIe siècle faisait partie d'une ferme dont il ne reste que le bâtiment actuel qui fut habité pendant une soixantaine d'années par Hélène, femme courageuse, belle, efficace et active. Au moment de son départ, son logis devint triste et vide. Il fallait lui trouver une nouvelle vocation.
Pourquoi ne pas le transformer en auberge ? Non pas en restaurant sophistiqué, mais en un lieu chaleureux, accueillant, accessible à tous. Le projet se réalise au printemps 1978. C'est une aventure hasardeuse, mais le risque en est stimulant. Les débuts sont modestes, parfois difficiles, mais toujours gais et imprévus - la " comtesse est au fourneau" - c'est la plaisanterie de la famille et des amis. Mais elle a le soutien inconditionnel de son mari, de ses enfants et de leurs amis. Et l'histoire continue...

Les activités

- Visite guidée (40 mn) tous les jours de 10 h à 18 h 30 ou à la tombée de la nuit, du 1er avril au 1er novembre.
- Visite du parc de 10 h à 18 h 30.
- Des promenades en calèche (tous les jours sur réservation).
- Une initiation au tir à l'arc dans le parc et un parcours de Tir Nature (sur réservation).
- Le "Chemin des Traces" : parcours libre de reconnaissance des traces des animaux et des essences de nos forêts.
- 5 circuits de randonnées sur le domaine familial de La Verrerie à faire à pied, en bicyclette ou en calèche alternant plaines vallonnées et futaies de chênes et hêtres.
Les itinéraires ne sont pas fléchés mais une carte détaillée est disponible sur demande (sauf pendant la saison de chasse à tir).


- Restaurant "La Maison d'Hélène" dans le parc (fermé mardi et mercredi midi)
- Château-Hôtel, 12 chambres d'hôte (800-1300 F, sur rendez-vous), fermeture annuelle du 15 décembre au 15 janvier.

Comte Béraud de Vogüé, La Verrerie, 18700 OIZON. Tél. 02.48.80.51.60, Fax 02.48.58.21.25, email laverrerie@wanadoo.fr

LES STUART


LES PREMIERS STUART

Peu de périodes, dans l'histoire de France, sont aussi critiques que les premières années du XVe siècle. Les Anglais maîtres de la moitié du pays; la rivalité sanglante des Armagnacs et des Bourguignons; les destinées de la France aux mains d'un monarque dément; le roi d'Angleterre, Henri V, vainqueur à Azincourt (1415), épousant la fille de Charles VI et se faisant proclamer roi de France, tandis qu'autour du dauphin Charles, réfugié en Berry, s'effritent les courages et les volontés.

JEAN STUART DARNLEY, PREMIER SEIGNEUR D'AUBIGNY (1413-1419)

Dans sa détresse, le dauphin invoque le secours des Ecossais dont il connaît les vertus militaires et qu'il sait hostiles aux Anglais. Une petite armée, plus remarquable par le courage des combattants que par leur nombre (450 hommes), s'en vient batailler en France vers 1419 sous les ordres de Jean Stuart Darnley, cousin du roi d'Ecosse. Avec l'aide de ce contingent suivi par un corps expéditionnaire de 12 000 hommes, la chance sourit de nouveau aux armées françaises qui remportent la bataille de Baugé en 1421.
Les marques de gratitude sont nombreuses pour témoigner de ses "hauts, grands et honorables services", Jean Stuart reçoit de la main du roi la seigneurie de Concressault en 1421, la ville et châtellenie d'Aubigny en 1425, en 1426, le comté d'Evreux, mais aussi le privilège d'ajouter les lis de France à son blason.
Gratitude mais aussi versement de la pension promise à Jean Stuart que le trésor royal n'est alors pas en mesure de payer.
L'aliénation de ces terres n'est par ailleurs pas définitive, puisqu'elle s'exerce sur les "hoirs mâles en droite ligne" de Jean. Les biens font retour à la Couronne le jour où cette condition n'est plus remplie.
Il eut à peine le temps de jouir de ses nouvelles possessions. Il y meurt en 1429 devant Orléans. Il ne laisse que peu de traces de son passage en Berry, sinon trois fermaillets donnés aux armoiries de la ville d'Aubigny.
Alain, son fils aîné, deuxième seigneur d'Aubigny, est assassiné lors d'un séjour en Ecosse. Alexandre, son frère reste dans l'histoire pour avoir retrouvé et tué le meurtrier de son frère. Le troisième recueille les biens de son père et de son frère.

JEAN STUART DARNLEY, TROISIEME SEIGNEUR D'AUBIGNY (1439-1481)

Avec Jean, second fils du précédent, cette branche royale des Stuart devient tout à fait française, s'entourant de nombreux Ecossais qui s'installent en Berry. Illustration de cet enracinement, il épouse en 1446 Béatrix d'Apchier, élevée dans l'entourage de la fille du duc de Berry, Bonne de Berry, comtesse d'Armagnac, puis, Guillemette de Boucard, issue d'une famille noble établie à Blancafort.

BERAUD STUART DARNLEY, QUATRIEME SEIGNEUR D'AUBIGNY (1481-1508)
En 1470, Philippe, premier fils de Jean Stuart meurt. C'est donc à Béraud, son second fils, qu'échoit la succession en 1482, lorsque son père meurt à son tour.
Béraud reste une des plus belles figures de son temps et nombre de chroniqueurs font son éloge dont Brantôme, évoquant le "grand chevalier sans reproche" et Bayard "très gentil et vertueux capitaine". Homme de guerre remarquable, Béraud s'illustre sur les champs de bataille italiens où se presse "toute la fleur de la chevalerie française" selon Jean d'Auton mais aussi en politique, sachant gouverner ses terres et se faire aimer de ses "administrés". Contemporain de Machiavel, il laisse quelques écrits, enrichis par son expérience et la plume de son secrétaire Etienne le Jeune, concernant les devoirs d'un prince ou d'un général sur les pays conquis (Traité sur l'art de la guerre, 1508).
Tour à tour ambassadeur auprès du Pape Alexandre VI Borgia en Italie, et vice-roi de Naples en 1501, il n'en garde pas moins une grande attirance pour les choses de la guerre. Fait prisonnier en 1505 à Seminara et libéré, il rentre en France où il est reçu avec des honneurs particuliers.
Béraud et sa femme, Anne de Maumont, n'eurent de leur union qu'une fille, Anne. Faute d'héritier mâle la descendance française de Jean Stuart Darnley ne peut prétendre à sa succession. La donation de Charles Vil aurait alors dû regagner le domaine royal si la branche écossaise de la famille ne s'était trouvée en mesure de la recueillir.

LES LENNOX

ROBERT STUART, CINQUIEME SEIGNEUR D'AUBIGNY (1508-1543)


Le fils d'Alain Stuart, assassiné en 1459, vit en Ecosse. Son fils Jean, devenu lord Darnley en 1460, est créé comte de Lennox en 1473, relevant ainsi, par la grâce du roi d'Ecosse, un nom qui s'était éteint avec Duncan, huitième comte de Lennox, beau-père de Jean de Darnley.
Ce nouveau comte de Lennox a un fils, Robert, qui épouse en 1504 la fille de Béraud. Descendant en ligne directe du premier seigneur d'Aubigny, il récupère l'héritage auquel sa femme n'a pas droit, ajoutant l'écu des Lennox - d'argent au sautoir engrêlé de gueules, cantonné de quatre quintefeuilles du même - aux armoiries des Stuart d'Aubigny.
Robert n'est pas un inconnu pour la branche des Darnley. Très jeune, il prend du service en France avec ses frères Guillaume (mort précocement en 1503) et Jean. En 1503, il accompagne Béraud dans les guerres d'Italie où ils s'illustrent.
A la mort de Béraud, une lettre de Jacques IV, roi d'Ecosse, recommande les deux frères à l'attention de Louis XII comme aptes à succéder à leur cousin dans ses charges et dignités. Lettre superflue tant le roi apprécie déjà les qualités des deux hommes.
Robert devient seigneur d'Aubigny. Quant à Jean - épousant Anne de Menypeny, dame de Concressault - seigneur de cette châtellenie, mort en 1512 sans descendance, il entraîne avec lui le titre de seigneur d'Oizon qui disparaît.
Robert connaît une carrière militaire aussi fulgurante que brillante, parvenant aux plus hauts commandements, côtoyant les plus grands du royaume. En dehors du temps qu'il passe à l'armée et à la cour, il mène une existence fastueuse dans ses propriétés du Berry. Il rebâtit le château d'Aubigny, détruit par un incendie, complète celui de La Verrerie en l'ornant des grâces de la Renaissance.
Témoignage de sa générosité, il accorde aux habitants d'Aubigny, ville en grande partie détruite par les flammes, de prendre du bois dans ses forêts pour reconstruire leur maison. De cette époque datent quelques-unes des plus belles bâtisses de la charmante bourgade.
Anne Stuart aide son mari à la gestion du domaine, mais meurt trop tôt pour en tirer quelque jouissance. Robert se remarie avec Jacqueline de La Queille, issue d'une vieille famille d'Auvergne. Tous deux s'éteignent la même année, sans descendance.

Robert et l'estime des rois

Louis XII et François 1er ont Robert Stuart en grande estime, ne lui ménageant aucune marque de gratitude.
Tour à tour conseiller et chambellan du roi, chevalier de l'ordre de Saint Michel, il devient commandant des archers écossais et obtient, en 1513, la naturalisation des Ecossais vivant en France. En 1515, il est un des quatre premiers maréchaux de France nommé par le roi.
Présent à tous les grands rendez-vous de l'Histoire, il figure au troisième mariage de Louis XII ; au couronnement de la reine Claude de France et au couronnement d'Eléonore, soeur de Charles Quint, seconde femme de François 1er ; il apparaît aux fastueuses fêtes du Camp du Drap d'Or (1520).
Un ami du chevalier Bayard

Accompagné de Bayard et Gaston de Foix, il prend part aux guerres d'Italie sous Charles VIII, Louis Xll et François 1er : Novare et Nole (1500), Bologne et Gênes (1507), Agnadel (1509), Brescia et Ravenne (1512). Il accompagne François 1er à la conquête du Milanais, se bat à Villafranca et Marignan (1515) et partage la captivité du roi après la bataille de Pavie (1525).
Des remontrances

En 1538, le roi reproche à Robert l'indiscipline de ses troupes : "Mon cousin, il y a longtemps que journellement je n'ay que plaintes de tous coustez des maulx, pilleries foulles et oppressions que font à mon pauvre peuple les hommes d'armes et archers dont vous avez eu par cy devant la charge et laquelle vous avez bataillée par mon consentement à votre nepveu le comte de Lennox."
La remontrance sera de courte durée, Robert faisant rapidement justice dans ses troupes.

JEAN STUART, SIXIEME SEIGNEUR D'AUBIGNY (1543-1567)

Mathieu, frère aîné de Robert, mort en 1513 à Flodden Fields, son fils Jean assassiné, il ne reste que deux descendants aux Stuart : Jean et Mathieu, tous deux fils de Jean. Venus chercher en France une sécurité encore précaire en Ecosse, ils sont élevés par Robert comme ses propres fils.
Mathieu retourné en Ecosse, Jean est adopté, partageant l'intimité de son oncle. C'est le vieux maréchal qui arrange son mariage qui le lie à Anne de La Queille, demi-soeur de Jacqueline, sa propre épouse.
Décrit comme un "gentilhomme bon et fort, mais pas très avisé", Jean essuie les erreurs de son intrigant de frère, erreurs qui lui valent la Bastille en 1544 où il demeure emprisonné jusqu'à l'avènement d'Henri II, en 1547. Pour le dédommager de ses infortunes, le roi lui donne la jouissance de Beaumont-le-Roger et ordonne la mainlevée opérée sur ses biens et lorsque le roi décide, en 1558, la saisie de tous les domaines détachés des biens de la couronne, il en exempte la seigneurie d'Aubigny.
Jean semble avoir habité longuement en Berry. Nombreuses sont, dans les archives, les pièces se rapportant à l'administration du domaine: travaux, achats, ventes, locations...

Le testament d'Anne de La Queille (demi-soeur de Jacqueline )

Survivant de quelques années à son mari, Anne de La Queille aura dicté un imposant testament réglant dans les moindres détails ses ultimes volontés. Son corps devra être inhumé dans l'église d'Aubigny, à côté de celui de son mari, son coeur dans l'église d'Oizon, devant l'autel, ses entrailles dans le grand cimetière d'Aubigny, au pied de la croix. Elle règle aussi tous les détails de la cérémonie funéraire : le nombre de prêtres, d'ornements, de cierges, l'ordre du cortège, tout comme le nombre de messes et de prières qui seront dites pour son salut éternel. Elle réalise à cet effet les fondations nécessaires, notamment en consacrant de substantielles ressources à l'entretien et à la réparation des églises d'Aubigny, d'Oizon, de Saint Sylvain des Averdines, de Croisy et à de nombreuses oeuvres charitables.

ESME STUART, SEPTIEME SEIGNEUR D'AUBIGNY (1567-1583)

Fils de Jean et d'Anne, jouissant en France d'une belle situation, Esmé se sent malgré tout attiré par l'Ecosse ancestrale. Le roi Jacques VI, dont il est le cousin, l'ayant invité à venir le voir, il se rend sans hésiter à la cour du souverain dont il s'attire rapidement les bonnes grâces. A cet effet, Jacques VI n'hésite pas à prier le vieux Robert Stuart, évêque de Caithness et oncle d'Esmé, à lui céder ses avantages et titres en échange du comté de March. En 1581, deux ans plus tard, il élève le comté de Lennox en duché. Autant de faveurs qui suscitent la jalousie des grands d'Ecosse qui ne lui pardonnent guère ses attaches françaises.
Victime d'une intrigue, il doit quitter l'Ecosse pour rentrer en France, humilié et malade. On prétend que Jacques VI, pris de remords, l'aurait pleuré.

ESME STUART, HUITIEME SEIGNEUR D'AUBIGNY (1583-1624),
HENRY, GEORGE ET LUDOVIC, NEUVIEME, DIXIEME et ONZIEME SEIGNEURS D'AUBIGNY

Pendant qu'Esmé, premier du nom, goûte les charmes de l'Ecosse, sa femme, Catherine de Balsac, reste à Aubigny où elle s'occupe de l'éducation de leurs cinq enfants et de l'administration des terres. Devenue veuve, elle se consacre à ces deux tâches avec une volonté tenace.
Délaissant la charge de commandant de compagnie de la garde du roi, Ludovic, le fils aîné, quitte la France pour l'Ecosse, bientôt rejoint par Esmé. Catherine assure alors seule la gestion des terres du Berry avec prudence et fermeté.
Des six fils d'Esmé, trois survivants (Henry, George et Ludovic) lui succèdent tour à tour à la tête de la seigneurie d'Aubigny.
Henry, le plus âgé des trois, a trois ans quand son père lui transmet les biens qu'il a en France.
Son frère George, né en 1618, meurt à la bataille d'Edgehill, en 1642.
Reste Ludovic ; il entre dans les ordres après avoir suivi l'enseignement de Port Royal des Champs. Résidant peu à Aubigny, il s'en sépare en devenant l'aumônier de la reine Henriette-Marie d'Angleterre, veuve de Charles 1er. Il accompagne Charles II à Londres quand celui-ci prend possession de son trône en 1660. Quand aux deux autres fils de Esmé et de Catherine Clifton, ils meurent tous deux lors de la guerre civile anglaise.
Cette première moitié du XVIIe siècle n'est guère heureuse pour la seigneurie d'Aubigny, délaissée des Lennox qui ne s'y rendent guère. Seul événement marquant de ce demi siècle : le passage du roi, en route pour Bourges en 1652, et qui demande par courrier que ne lui soit faite "aucune entrée ni autre cérémonie" à son arrivée au château.
La gestion du domaine est assurée par l'inépuisable Catherine de Balsac qui administre pour ses petits-fils comme elle l'avait fait pour son mari et son fils Esmé.
Elle meurt en 1631. Désormais, les actes administratifs du château portent le nom de Mathurin Poncourt, maître des Eaux-et-Forêts d'Aubigny, agissant comme agent des affaires des Stuart.

CHARLES STUART, DOUZIEME SEIGNEUR D'AUBIGNY (1665-1672)

Lorsque Ludovic meurt en 1665, la seigneurie d'Aubigny se trouve dépourvue de maître.
Le Parlement français prononce, en 1666, sa réunion aux biens de la couronne par droit de réversion.
C'est compter sans les liens qui unissent les Stuart. George, le prédécesseur immédiat de Ludovic, a eu de son mariage avec Catherine Howard un fils, appelé Charles.
Alors âgé de 26 ans, duc de Lennox et de Richmond, Grand Chambellan et amiral d'Ecosse, il n'entend pas se faire oublier.
Après de longs pourparlers, il reprend ses droits grâce à un arrêt du Conseil d'Etat prononcé en 1668. Peine perdue : quatre ans plus tard, il meurt à Copenhague sans avoir eu d'héritier de Frances Stewart, sa femme, l'une des beautés de la Cour d'Angleterre.
Ainsi s'achève la seconde période de l'histoire des Stuart d'Aubigny, sans doute moins fastueuse et éclatante que la première.

LA DUCHESSE DE PORSTHMOUTH


La mort de Charles Stuart crée une situation délicate. Charles II d'Angleterre, par son aïeul Henri de Darnley, descend en ligne directe de Jean Stuart, et peut prétendre aux biens cédés par Charles VII en 1422. Mais, il ne lui plaît guère de devenir le vassal du roi de France en revendiquant ces terres. De son côté, Louis XIV ne souhaite en rien céder la moindre parcelle du royaume.
Les deux monarques se mettent bientôt d'accord pour confier à la favorite de Charles, Louise de Penancouët de Keroualle, créée par lui duchesse de Portsmouth, les terres du Berry. Utilisant la jeune femme pour entraîner Charles II dans sa politique, Louis XIV obtient sa neutralité dans la guerre qu'il mène contre l'Europe coalisée.
En 1673, la duchesse de Portsmouth reçoit la jouissance de la seigneurie d'Aubigny, s'aliénant un peu plus une opinion publique défavorable dont elle subit critiques et jalousies, ce qui l'oblige à quitter l'Angleterre.
En France, son existence se partage entre Paris et Aubigny où elle décide de s'installer. Mais les difficultés financières s'accumulent, les biens considérables que Charles II lui avait accordés en Angleterre lui étant lentement retirés.
Usée, malade, elle se retire dans son appartement parisien où elle est, un matin, retrouvée morte. Ses domestiques se sont enfuis, après avoir fait main basse sur tout ce qu'ils trouvent.
Désormais, Aubigny rentre dans l'ombre. Certes, son nom figure encore en bonne place dans l'Armorial de France, et dans celui d'Angleterre, mais ses seigneurs délaissent de plus en plus la terre que leurs pères avaient illustrée.

D'incessantes tracasseries

Après avoir connu les fastes des cours de France et d'Angleterre, Louise de Keroualle s'épuisera en démarches juridiques pour sauvegarder ses droits sur les terres d'Aubigny.
contre l'administration des Eaux-et-Forêts, d'abord, qui lui réclame le versement d'une partie de ses baliveaux ; contre le marquis de Dreux-Brézé ensuite, qui installe une verrerie concurrente à Nancré malgré les protestations de la duchesse ; mais aussi contre des voisins comme les seigneurs d'Ivoy ou de la Chapelle-d'Angillon à propos de droit de pêche ou d'usage. Problème de taxes impayées également avec des contribuables de marques, comme les chanoines du prieuré d'Aubigny, voire des procédures judiciaires contre de simples villageois pour des délits forestiers, de braconnages...
La duchesse s'est également battue pour voir organiser un service de messagerie entre Bourges et Gien par Aubigny.

LES DUCS DE RICHMOND

Par un testament en date du 8 juin 1726, la duchesse de Portsmouth désigne son petit-fils, Charles Lennox, deuxième duc de Richmond, légataire universel de ses biens. A son arrivée en France, de nombreuses assignations l'attendent, émanant de tous les légataires particuliers, désireux de recouvrer devant la justice les legs faits à leur profit.
Après avoir payé ces légataires et les derniers créanciers, Charles emporte à Goodwood, en Angleterre, les oeuvres les plus intéressantes du château auquel il ne consacre que peu de temps. Pressenti au poste d'ambassadeur à Paris, il exprime quelques remords à quitter ses terres et ses chasses au renard. La nomination se fait attendre. Il meurt peu de temps après, non sans avoir revu une fois Aubigny.
Charles, troisième duc de Richmond, lui succède à l'aube des événements révolutionnaires. Pendant cette période, les documents relatifs à la verrerie sont rares, les privilèges se perdent, et avec eux, le duché-pairie.
La Convention inscrit le propriétaire, Charles, sur la liste des émigrés et ses biens sont mis sous séquestre.
Lorsqu'en 1806, Charles meurt sans postérité, c'est le fils aîné de George, son frère, qui prend le titre. Il faut attendre la fin des guerres napoléoniennes, pour qu'il recouvre le domaine de La Verrerie, qu'il vient visiter en 1817.
Revendiquant alors une part des terres conformément à la loi française, les héritiers de Charles, troisième duc de Richmond, entament une longue procédure qui aboutit à la vente des terres. En 1841, pas moins de soixante-douze cohéritiers sont assignés devant le tribunal. Nombre d'entre eux ont déjà vendu leur part à une compagnie d'hommes d'affaires parisiens, MM. Legentil, qui vendent aux enchères le château de La Verrerie en l'audience du 25 mai 1842.

Un gibier réputé

Un chapitre nouveau apparaît dans les comptes de la seigneurie d'Aubigny vers 1740 : celui des envois de gibiers. Tous les ans à l'époque de la chasse, des caisses de perdrix, principalement des perdrix rouges, partent pour l'Angleterre. il est aussi fait mention de pâté dont le compte de fourniture du fermier donne le détail de la composition. Tous ces colis arrivent à bon port et sont reçus avec force compliments.
Quelques années plus tard, ce petit commerce perdure malgré les inimitiés qui déchirent les puissances européennes. Le duc de Richmond prend part, en 1741, à la bataille de Dettingen où les Français subissent un sanglant revers. Pendant ce temps, les perdrix continuent à passer la Manche, les anglais envoyant en échange thé, étoffe, flanelle ou de l'eau des Barbades...

LES VOGUE


"je tenais à trouver pour nos enfants un coin de sol sur lequel pussent se reposer la souvenirs de leur imagination de jeunesse et l'affection locale du foyer paternel. Ce lieu traduit parfaitement ce thème de mon coeur et de ma sollicitude."
L. de Vogüé, novembre 1849

Une famille vivaroise en terre berrichonne : Les Vogüe

"Hier, je me suis dirigé au galop, à travers mes bois d'lvoy, vers le vieux château d'Aubigny ; le temps était charmant, le soleil égayait le site sauvage, la vieille tour se réfléchissait dans l'étang. Il y avait je ne sais quoi d'engageant dans l'aspect du paysage. La chapelle était ouverte et ornée ; le curé m'a écrit le matin une lettre en style biblique pour m'engager à protéger de la destruction cette sainte demeure."
C'est en ces termes que Léonce de Vogüé écrit à sa femme le lendemain de son acquisition du domaine auprès des marchands de biens parisiens. Désormais, le château de La Verrerie va revivre.
Jeune descendant d'une vieille famille vivaroise, Léonce-Louis-Melchior de Vogüé est né à Paris. Fils de Charles de Vogüé et de Zéphirine de Damas, petit-fils, par celle-ci, du duc Charles de Damas et d'Aglaé de Langeron, arrière-petit-fils, par cette dernière, du marquis de Langeron et de Marie-Louise Perrinet du Peseau, Léonce de Vogüé, d'abord destiné à une carrière militaire - il entre à seize ans au Corps des Pages du Roi à Versailles - devient héritier des grandes propriétés de la famille Perrinet en Sancerrois et en Pays Fort.
Après sa participation aux campagnes d'Espagne (1823) et d'Algérie (1830), il démissionne de l'armée pour retrouver sa femme, Henriette de Machaut d'Arnouville, en Berry. Dès l'automne 1834, il acquiert les propriétés d'lvoy, voisines de Boucart, comprenant 3 000 arpents de bois et une forge.

La Verrerie, demeure familiale

C'est Louis qui décide de faire du château de La Verrerie une maison familiale confortable qui accueillera les nombreux enfants qu'il souhaite avoir de son union avec Louise d'Arenberg ; leurs neuf enfants rempliront de leurs rires les pièces de la vieille bâtisse. Depuis cette époque date l'idée de travaux incessants pour accommoder au confort moderne le château des Stuart.
Pour l'heure, La verrerie est inhabitable sans de gros travaux. Le couple voit grand : il veut un salon, un deuxième salon pour le billard, une grande salle à manger, une petite pour les enfants, un office, une vaste cuisine, un garde-manger, une pièce à chaussures sans compter d'innombrables pièces à coucher et quelques salles de bains. Plutôt que de s'accommoder des bâtiments existants, l'architecte Sanson préconise une nouvelle aile composée d'une galerie intérieure flanquée de deux excroissances avec tours pointues. En sus, des gargouilles pour faire bonne mesure.
Reste à trouver le financement de tels travaux. Les dépenses du couple sont réduites au strict minimum. Bientôt, le gros oeuvre de l'aile Sud débute, alors que les intérieurs de l'aile Est retrouvent lentement une nouvelle jeunesse, parés de nouveaux tissus, meubles, tapis persans et autres bimbeloteries à la mode...
Après la Seconde Guerre mondiale, il convient de s'organiser différemment : la famille ne peut plus s'accommoder de rares passages au château de La Verrerie. Il faut qu'un des membres de la famille s'y installe de façon permanente pour le restaurer et l'entretenir.
Antoine, fils de Melchior et père de Béraud, l'actuel propriétaire, suit alors les cours de l'Ecole Agricole d'Angers pour reprendre le domaine familial et en assurer la gestion. A la mort de sa mère Louise en 1956, il occupe le château et commence d'effectuer, avec sa femme Françoise de Hautecloque, d'indispensables travaux de consolidation et d'aménagement aboutissant à une ouverture au public en 1960.

Léonce L.M., marquis de Vogüé (1805-1877). Un homme de terrain

De nombreuses expériences agricoles le mènent à l'Académie d'agriculture. Il s'illustre aussi dans le domaine métallurgique, en fondant, en 1846, l'usine de Mazières, près de Bourges.
Il devient conseiller général du Cher en 1839, et préside le Conseil en 1849 après avoir été élu député à l'assemblée Constituante de 1848. Très sollicité, grand chasseur et grand voyageur, il n'en trouve pas moins le temps de fonder la revue Le Correspondant avec son ami E. Cazales (1829). Il acquiert les châteaux de Vogüé et de Rochecolombe (1840) dont son grand-père avait été dépossédé, sauvant le premier édifice (1843) de la ruine et y installant une école tenue par la congrégation de Saint Joseph d'Aubenas, qui en assurera la marche jusqu'en 1860.

Le souvenir de Robert de Vogüé (1835-1870)

frère de Léonce de Vogüé, Robert trouvera la mort lors d'une attaque menée par le Maréchal de MacMahon en personne, à la tête de cinq bataillons d'infanterie à la bataille de Reichshoffen, le 6 août 1870. Son père lui avait remis le sabre qu'il avait lui-même porté en Espagne et en Algérie. un officier prussien le ramassa sur le champ de bataille et eut la courtoisie de le rendre à la famille.

£ugène-Melchior, vicomte de Vogüé (1848-1910). L'écrivain

Ayant passé sa jeunesse au château de Gourdan, près d'Annonay, Eugène-Melchior, arrière-petit-cousin de Charles-Melchior, ambassadeur et académicien, est engagé volontaire en 1870 et blessé à la bataille de Sedan.
A la faveur d'un début dans la vie diplomatique, ses talents littéraires se révèlent au contact de l'orient (Turquie, Egypte, Palestine) puis de la Russie. Il publie en 1886 son oeuvre principale, Le Roman Russe. En révélant à l'opinion française les richesses intellectuelles et spirituelles de la Russie, ce livre marque une date importante dans l'histoire littéraire et politique de la fin du XIXe siècle ; il contribue à l'élection de son auteur à l'Académie française.
Collaborateur régulier de la Revue des Deux Mondes et du Journal des Débat, il influence le rapprochement de Léonon XIII avec la Troisième république, favorise le mouvement du catholicisme social, les initiatives françaises aux colonies.
Eugène-Melchior de Vogüé s'illustre également par son oeuvre de romancier (Jean d'Agrève, Le Maître de la Mer, Les Morts qui parlent). Il fut par ailleurs député de l'Ardèche entre 1893 et 1898.

Louis, marquis de Vogüé (1868-1948). L'homme de la terre

Louis de Vogüé, petit-fils de Léonce et fils de Charles-Melchior ambassadeur et académicien, fait partie de ce groupe d'individus désintéressés qui, sous l'efficace influence d'Albert de Mun et de La Tour du Pin, fonde en France, à la fin du XIXe siècle, les institutions professionnelles et de prévoyance du monde agricole.
Son action le mène à la présidence de l'Union Centrale des syndicats agricoles et de la société des Agriculteurs de France qu'il assure de 1919 à 1948.
Elu à l'Académie d'Agriculture en 1919, il succède en 1924 à Jules Méline comme président de la confédération internationale de l'agriculture.
Cette activité syndicale s'accompagne aussi d'une importante activité économique et diplomatique : il sera un temps le président de la Compagnie du Canal de Suez et régent de la Banque de France. Il accorde aussi un peu de son temps à des oeuvres de charité, présidant entre autres la Société Philanthropique.
Commandeur de la Légion d'Honneur, il est maire d'Oizon de 1900 à 1929 et conseiller général du Cher de 1911 à 1945.

C.-J. Melchior, marquis de Vogüé (1829-1916). L'archéologue

Après avoir préparé l'école de Saint-Cyr et l'Ecole de Polytechnique, Melchior de Vogüé s'engage dès sa jeunesse dans une carrière d'archéologue et d'historien.
A la suite de nombreuses expéditions au Moyen-Orient, il publie des ouvrages d'archéologie sur Les églises de Terre Sainte (1860), Le Temple de Jérusalem (1864), ou La Syrie Centrale (1865-1868 et 1877) où il évoque "l'état des ruines, leur solitude, le vaste désert qui les environne".
De même que l'ampleur de ses études archéologiques le conduit à l'Académie des Inscriptions et Belles Lettres en 1868, ses travaux historiques, mais aussi ses nombreuses oeuvres précédentes, lui ouvrent les portes de l'Académie Française où il est élu en 1901.
Appelé à la vie politique par Thiers, puis par Mac-Mahon, Melchior est nommé ambassadeur à Constantinople (1871-1875) puis à Vienne (1875-1879), tout en assurant la présidence, à partir de 1877, de la revue Le Correspondant. Poursuivant, avec soin, les travaux d'exploitation agricole de son père, il préside aussi la Société des Agriculteurs de France à partir de 1896. Souhaitant jouer un rôle social important, il est bientôt le président de la Société de secours aux blessés militaires (1904), puis, de la Croix Rouge Française (1907).
La dernière partie de sa vie est aussi magnifiquement remplie. Il l'évoque en ces termes : "jamais je n'ai tant travaillé, ni si bien supporté le travail".
En 1901, on le désigne pour lui confier la présidence de la Compagnie des Glaces et Produits chimiques de Saint-Gobain, dont il était membre du Conseil d'administration depuis huit ans.
Ses attaches berrichonnes (il est conseiller général de Léré de 1871 à 1904) ne l'empêchent aucunement de consacrer la fin de sa vie à l'histoire du Vivarais, en relation avec sa famille, dont il publie une monographie en 1906, Une famille Vivaroise.

Melchior, marquis de Vogüé (1893-1965). De la finance à la clôture

Après son mariage avec Geneviève Brincard, petite-fille d'Henri Germain, fondateur du Crédit Lyonnais, il devient l'administrateur de l'établissement de 1935 à 1955.
Maire de Oizon de 1929 à 1953, il quitte avec son épouse toutes ses activités familiales et professionnelles pour se consacrer à Dieu : il est ordonné prêtre en 1961 au monastère bénédictin de la Pierre-qui-Vire. sa femme, qui a fait ses voeux perpétuels au monastère de Limon, est ensevelie auprès de lui à la Pierre-qui-Vire, en 1974.

VETERA NOVIS AUGERE

"j'ai aimé la vérité, la justice et la liberté dans l'ordre ; j'ai beaucoup souffert des outrages qu'elles reçoivent chaque jour. j'ai aimé l'étude ; je lui dois des heures heureuses et une assistance efficace dans les épreuves de la vie. J'ai aimé passionnément mon pays et j'aurai voulu pouvoir le servir plus utilement ; les circonstances ne l'ont pas permis et j'ai assisté impuissant au naufrage des causes que j'ai essayé de servir. Je souhaite à mes enfants des circonstances plus favorables ; j'espère qu'ils pourront en profiter en s'inspirant de nos traditions de famille et en les adaptant aux besoins nouveaux" écrit Melchior de Vogüé dans son testament.
La maxime VETERA NOVIS AUGERE exprimée dans la dernière phrase, sera reprise par ses descendants.

Antoine J.-M., comte de Vogüé (1923-1998). Un homme engagé et dévoué

Durant la Seconde guerre mondiale, il entre dans la Résistance sous les ordres de son oncle le colonel Colomb (Arnaud de Vogüé). Au sortir du conflit, il crée la coopérative forestière du Centre, l'une des plus importantes de France, et devient maire d'Oizon, il le sera pendant 45 ans.
Parallèlement, il siège au Conseil général du Cher (34 ans), où il sera notamment vice-président, et participe activement au développement du tourisme dans ce département.

Françoise de Hautecloque. L'inébranlable volonté de faire vivre une demeure familiale et historique

Lorsque la nièce du Maréchal Leclerc entreprend avec son mari la restauration et l'embellissement de La verrerie, le logis Est du château est occupé par de nombreuses pièces secondaires : logis du cuisinier, dépôt de bois, sacristie-lingerie, pièce frigorifique, pièce à chaussures et grande cuisine s'y succèdent le long d'un grand couloir.
En quelques décennies, les pièces changent d'attributions, se recomposent pour retrouver un éclat, comme en témoigne la cheminée ornée des armoiries des Stuart, un des rares éléments anciens non détruit par les Richmond vers 1830.
En 1978, elle décide de lancer un restaurant dans la petite maison qui fait face au pavillon du château. Grillades, mais aussi de succulentes terrines et autres salades légères remportent un franc succès.
Deux ans plus tard, une dizaine de chambres du château - de belles suites pour certaines - sont prêtes à accueillir leur première clientèle française et étrangère pour quelques moments de bonheur, dans un cadre idyllique et préservé.

Béraud, comte de Vogüé. Premier propriétaire né à La Verrerie

Après une enfance passée dans le Cher, et des études de droit à Paris, il part en Amérique du Nord où il passe près de 15 ans. De retour à La Verrerie à la demande de son père Antoine, il entreprend avec sa femme, Diane Paul-Boncour de développer l'activité touristique de la demeure de famille, berceau de son enfance.

Les rendez-vous de Louise d'Arenberg

Béraud de Vogüé a conservé quelques beaux souvenirs de sou arrière-grand-mère, Louise de Vogüé, née Princesse d'Arenberg.
Tous les jours que Dieu faisait, tous les petits-enfants et arrière-petits-enfants de la famille avaient obligation de visiter leur aïeule à heure fixe. Chaque matin, entre neuf et dix heures, elle accordait quelques minutes, écoutant, conseillant, réprimandant, et prodiguant à chacun sa sagesse et son expérience. Suivaient ensuite le maître d'hôtel, veillant à l'organisation du jour, et le courrier.
A seize heures, et par tous les temps - "on n'échange pas ses projets à cause du temps" précisait-elle souvent - elle faisait une promenade sur le domaine avant de rentrer pour le thé, à dix-sept heures.

Béraud de Vogüé. La chasse, un plaisir vivace

Stuart, Lennox et Richmond s'adonnaient sans déplaisir à la chasse. L'arrivée de la famille de Vogüé en terre berrichonne n'aura pas bouleversé une tradition séculaire. Charles, l'un des fils de Léonce de Vogüé, est sans doute le premier à disposer d'un équipage à La Verrerie. De cette époque datent les relations d'excellent voisinage avec les équipages locaux qui parcourent, la saison venue, les domaines de La Verrerie.
Dans les années 1950-1960, du temps de la marquise de Cossé-Brissac, née princesse d'Arenberg, l'équipage Vouzeron-Sologne sillonne la forêt. Béraud, actuel propriétaire du château, y fait ses premières armes à côté de son père, Antoine de Vogüé. Il acquiert ses six premiers chiens basset en 1972, puis des harriers qui lui permettent de s'adonner à sa vraie passion : la chasse au lièvre à pied.
En 1975, il fonde le Bouquin Berrichon, équipage auquel se joignent une bonne trentaine de passionnés désireux, comme lui, de ne pas vivre une chasse dénaturée par quelques rendez-vous mondains.
Aujourd'hui, une dizaine de membres de cette association cynégétique pratiquent la vénerie du lièvre, tous les dimanches à partir du mois de septembre.
Pourquoi le lièvre ? "Pour son intelligence, sa subtilité qui en font un animal difficile à prendre" avoue monsieur de Vogüé. "C'est une chasse où, plus que toute autre, la patience est capitale et, à mon goût, la communion avec la nature, totale".
"Elle permet aussi d'exprimer l'amour pour ces chiens de meutes dont je me suis entouré. Sûrement, ce n'est pas l'aspect flamboyant de cette chasse qui m'attire, mais plutôt sa difficulté", un gage d'authenticité...