- Nouveau calcul de la puissance administrative (loi n° 98-546 du 2 juillet 1998, article 62)
- La puissance administrative des voitures particulières est calculée selon la formule suivante :
PA = (CO2/45) + (P/40)^1,6
où PA désigne la puissance administrative exprimée en chevaux-vapeur arrondie à l'entier le plus proche, P la puissance réelle du moteur exprimée en kilowatts et CO2 les émissions de dioxyde de carbone exprimées en grammes par kilomètre.
Ces deux paramètres sont mesurés conformément aux procédures prévues pour la réception communautaire des voitures particulières définies par les articles R. 109-3 à R. 109-9 du code de la route.
Pour les voitures particulières qui fonctionnent alternativement au moyen de supercarburants et de gaz de pétrole liquéfié, la puissance administrative est calculée sur la base d'un fonctionnement au gaz de pétrole liquéfié.
La puissance fiscale des voitures particulières, exprimée en chevaux-vapeur, est égale à la puissance administrative définie au I.
Les dispositions des I et II se substituent aux dispositions de l'article 35 de la loi de finances rectificative pour 1993 (n° 93-859 du 22 juin 1993) pour les voitures particulières mises en circulation pour la première fois à compter du 1er juillet 1998 sur le territoire métropolitain et dans les départements d'outre-mer, ainsi que pour celles qui y sont immatriculées après avoir fait l'objet d'une mise en circulation pour la première fois à compter de la même date dans un Etat membre de la Communauté européenne ou dans un pays tiers appartenant à l'Espace économique européen.
L'article 62 modifie, pour les véhicules mis en circulation à compter du 1er juillet 1998, les modalités du calcul de la puissance fiscale des véhicules automobiles qui détermine les tarifs de la vignette et de la carte grise ainsi que le montant de la taxe sur les véhicules de sociétés.
Le nouveau mode de calcul de la puissance fiscale, qui résulte d'une équation fort complexe, repose sur des paramètres clairs : la puissance du moteur exprimée en kilowatts et les émissions de dioxyde de carbone (CO2) mesurées en grammes par kilomètre.
Ce nouveau mode de calcul de la puissance fiscale supprime l'abattement de 30 % dont bénéficiaient les moteurs diesels, mais cette perte est atténuée par la prise en compte des émissions de CO2 qui est favorable aux moteurs Diesel "propres".
- Louis Schweitzer, PDG de RENAULT, dans le Bulletin de l'Industrie Pétrolière du 2.10.1998:
- "Une voiture qui n'a pas le droit de sortir de la ville est une voiture qui se condamne elle-même. PSA et nous avons à notre catalogue, pour pas cher, des voitures électriques mais nous ne voyons pas de client."
- 1898-1998 Le roman de la bagnole
- Il y a cent ans, Paris lui consacrait son premier Salon. Depuis, elle a envahi la planète, chamboulé l'organisation du travail et les politiques sociales et économiques. Elle tue et elle pollue. C'est la bagnole. Une révolution dont voici la saga
On parle trop des automobiles depuis quelque temps pour que l'exposition qui s'ouvre dans le jardin des Tuileries ne soit pas une actualité bien parisienne. C'est la première du genre. Aux expositions vélocipédiques qui se sont faites ces dernières années, on avait bien vu figurer dans les coins obscurs, repoussées par la bicyclette, quelques timides automobiles. Aujourd'hui, la bicyclette a son siège fait, l'automobile apparaît, je ne dirai pas conquérante, mais envahissante, car, du train qu'elle y va, elle aura bientôt tout submergé." Le mercredi 15 juin 1898, le journaliste Paul Meyan - l'un des quatre fondateurs, trois ans plus tôt, de l'Automobile-Club de France, avec le comte Albert de Dion - consacre un long filet dans Le Figaro à l'événement du jour: l'inauguration du premier Salon de l'auto - ces "fiacres de demain", s'enthousiasme Meyan. Et le confrère de rassurer le lecteur: "Aucune voiture ne pourra figurer dans l'exposition si elle n'a, au préalable, effectué, en présence d'un commissaire, le trajet de Paris à Versailles et retour (...), sur un itinéraire qui n'est pas des plus commodes..."
Cent ans plus tard, le Salon de l'automobile (rebaptisé le Mondial en 1988) s'apprête, du 1er au 11 octobre, à accueillir plus de 1 million de visiteurs, porte de Versailles. Près de 1 000 marques et quelque 40 pays seront représentés. Comme ses 15 prédécesseurs à l'Elysée, depuis Félix Faure, le président Jacques Chirac inaugurera ce temple de la bagnole. Avec toute la solennité qui s'impose: chaque seconde, plus d'une nouvelle voiture vient au monde!
Les "fiacres" sont devenus rois. Ils ont envahi la planète, villes et campagnes, bouleversé l'existence des hommes, bousculé leurs habitudes. L'automobile n'est plus seulement un moyen de transport: elle remodèle les espaces, déplace les lieux de résidence, d'emploi, de loisirs... Elle gagne la mer, gravit les montagnes. Elle est au cúur des politiques économique, sociale, environnementale... Moteur industriel, elle a chamboulé l'organisation du travail et les modes de production. Elle tue et elle pollue aussi, défigure le paysage et encombre les rues. Mais elle est devenue indispensable. Elle a même parfois changé le cours de l'Histoire! Depuis 1914, on remporte les guerres en roulant...
Edouard Delamare-Deboutteville n'imaginait pas, en 1884, l'impact de sa découverte. Qu'à la fin du IIe millénaire circuleraient dans le monde près de 490 millions de voitures particulières et 170 millions de poids lourds, autobus et autocars. Cette année-là, ce Rouennais, fils d'un filateur de coton normand, conçoit et construit le premier véhicule digne de ce nom - un break de chasse hippomobile à quatre roues équipé d'un moteur, dont il dépose le brevet. Un document désormais considéré comme le véritable acte de naissance de l'automobile. Pourtant, Delamare n'est pas passé à la postérité. Si ce n'est ses héritiers et quelques fondus de mécanique, tout le monde a oublié ce jeune bourgeois éclairé, auteur également d'une grammaire sanskrite et d'une brochure sur l'amélioration... de la culture des moules! Et pour cause: le Normand n'a pas poursuivi l'aventure. "Difficile surtout d'attribuer à un seul homme la paternité d'une telle invention", souligne l'historien Patrick Fridenson, cofondateur du Gerpisa (1).
Sans remonter à Joseph Cugnot et à son fardier à vapeur (1771), d'autres avant Delamare avaient ouvert la brèche, comme Amédée Bollée et son Obéissante (1873) ou Nicolas Raffard et son omnibus électrique (1881), équipé de 9 tonnes d'accumulateurs! Mais que les plus cocardiers se consolent: ce sont toujours des Français - René Panhard, Emile Levassor et Armand Peugeot - qui industrialisent, dès 1891, les premières voitures à essence à moteur sous licence... Daimler.
L'auto reste alors l'apanage de quelques pionniers, aristocrates et sportifs: les anciens Bottin mondain (jusqu'en 1942) font état de la possession d'une voiture; les sièges sociaux des constructeurs s'installent dans l'Ouest parisien, là où réside la clientèle fortunée. Mais ce nouvel engin n'est qu'une innovation intéressante, pour ne pas dire étrange. Les conducteurs, baptisés "chauffeurs" (parce qu'ils allument le feu pour "chauffer" le pétrole de manière à l'enflammer à l'intérieur du moteur), ne sont pas loin - encapuchonnés jusqu'aux oreilles - d'être pris pour de doux dingues. Marcel Proust dit joliment du sien qu'il ressemble à une "nonne de la vitesse". L'accueil qui leur est réservé demeure plutôt frisquet. Jusqu'en 1896, les automobilistes anglais sont ainsi tenus d'être précédés par un homme à pied brandissant un drapeau rouge! Le conducteur à "casquette et peaux de bique" reste alors assimilé à un "gros", à un "dépravé", rapporte Gabriel Dupuy, professeur à l'Ecole nationale des ponts et chaussées (Les Territoires de l'automobile, éd. Anthropos). Quand il n'est pas caricaturé comme dans ces brochures de propagande datées de 1906 et 1907: "(...) C'est le fils de famille dévoyé, déclassé ou dégradé qui passe sa vie dans les maisons de jeux... C'est le sportsman stupide au faciès bestial... C'est le parasite oisif... C'est la fille de joie, théâtriculeuse (sic), vivant un peu d'art et beaucoup de prostitution..." Plus charitable, le Daily News publie, vers la même époque, un article dont l'auteur doute que l'on puisse à la fois monter en auto et demeurer bon chrétien: "Doubler les piétons avec autant d'aisance et de désinvolture manque par trop d'humilité." Bref, les sceptiques et les empêcheurs de circuler en rond sont légion. En 1913, une trentaine de villes françaises, comme Toulouse - on les baptisera les "villes mendiantes - tenteront même de s'opposer à l'entrée des véhicules étrangers en instaurant un péage. En vain...
Sa diffusion va révolutionner le siècle
La voiture a ses adeptes, de plus en plus nombreux. En novembre 1895, la revue américaine Horseless Age (L'Ere sans cheval) prophétise dès son n 1: "(...) Une industrie géante lutte pour venir au monde. Tous les signes indiquent que le véhicule à moteur est la suite nécessaire des méthodes de locomotion déjà établies et approuvées. (...) Le public croit en lui (...)." Témoin ce médecin de l'Oise qui, en 1904, raconte: "La semaine dernière, réveillé à 2 heures du matin pour un assassinat, j'étais à 2 h 20 près de la victime, à 6 kilomètres de Méru, et à 3 heures rentré chez moi. Cocher, cheval et lanternes eussent été à peine partis." Cet autre praticien, lui, compare, avec force détails, les frais inhérents à l'usage de deux chevaux et ceux d'une auto. Sa conclusion paraît, le 15 janvier 1898, dans La France automobile: une différence en faveur de son véhicule de plus de 40%. Et l'homme en blanc d'argumenter: "Cette économie deviendra d'autant plus sensible que vous laisserez certains jours votre voiture en remise tandis que votre dépense de chevaux continuera quand même lorsqu'ils resteront à l'écurie." CQFD.
Rien ne peut freiner la conquête de l'automobile. Plus que son avènement, sa diffusion en masse va révolutionner le siècle. Les retombées initiales sont évidentes: les automobilistes ont besoin de routes pour circuler, de cartes et de panneaux pour s'orienter, de stations-service pour se ravitailler. Ils ont aussi faim et soif, parfois sommeil: il faut les sustenter et les loger. L'expression "prendre la route" a du sens.
La France dispose certes du meilleur réseau grâce aux grandes voies royales tracées sous Louis XV, grâce aussi à son Ecole des ponts et chaussées - le plus vieil établissement de génie civil du monde. En outre, depuis le début du XIXe siècle, un ingénieur écossais, un certain John Loudon McAdam, a mis au point un composé de cailloux pour remédier au bruit des charrettes sur les pavés. On y ajoutera plus tard un liant (de l'asphalte, du goudron, du bitume...) et on appellera ce cocktail le macadam. Les chaussées ainsi revêtues sont plus lisses. Et ce n'est pas un luxe, compte tenu des suspensions de l'époque et de l'absence de pneumatiques (la diffusion du pneu démontable des frères Michelin, inventé en 1895, ne sera que progressive). Avec l'automobile, l'état des routes ne va plus cesser de s'améliorer. Comme les techniques de construction: il faut entendre, aujourd'hui, certains ingénieurs s'enflammer en évoquant le Régétherm, l'Hydroplast, le Salviacim ou encore l'Accroplast - cet enrobé drainant qui facilite l'écoulement des eaux... Plus tard, avec l'accroissement de la vitesse, on songera à aménager des voies spécialisées, sans intersections - baptisées "autoroutes" - avec leur corollaire, le péage. La première, longue de 65 kilomètres et large de 10 mètres, fut ouverte en 1914 aux Etats-Unis, dans l'île de Long Island.
Peu à peu, les restaurants, les hôtels, puis les motels (histoire de mieux sentir sa "caisse" au pied du lit...), les garages vont fleurir le long des axes routiers les plus fréquentés. Dès 1918, l'essence, vendue jusqu'alors en bidon dans les épiceries, drogueries et cafés-tabacs, est distribuée par les pompes. Sur le bord des routes apparaissent de "multiples objets montés sur pieds, points colorés aux formes géométriques variées", raconte Marina Duhamel (Un demi-siècle de signalisation routière, Presses des Ponts et Chaussées). Il faut aider les pionniers à trouver leur chemin, leur indiquer aussi les dangers. Le signal avertisseur d'obstacles le plus ancien (sur la RN 7, près de Cannes) date de 1894. Dans l'Hexagone, il n'existe alors que six panneaux de signalisation, contre plus de 200 modèles aujourd'hui. Le premier feu bicolore (rouge et vert) apparaît en 1914 à Cleveland, aux Etats-Unis; le feu tricolore fera son entrée en 1918 à New York. En France, il sera posé quatre ans plus tard au carrefour Sébastopol, à Paris. A l'origine, ce sont les clubs automobiles, les entreprises privées qui balisent et jalonnent les routes, diffusent cartes et guides. Comme Michelin. Son célèbre petit livre rouge, "offert gracieusement aux chauffeurs", naît en 1900. Dix ans plus tard, les premières cartes routières le rejoignent dans la boîte à gants.
Dès 1893, les automobilistes doivent posséder un "certificat de capacité". La vitesse est alors limitée à 12 km/h en ville, à 20 km/h en rase campagne. La très excentrique duchesse d'Uzès est la première femme à obtenir son certificat, en 1897. Les auto-écoles ne verront le jour (à Paris) qu'en 1917 - cinq ans avant la création du permis de conduire. Le fameux parchemin, de couleur rose déjà, est délivré après des épreuves pratiques où "l'examinateur devait apprécier, notamment, la prudence, le sang-froid, la présence d'esprit du candidat et la justesse de son coup d'úil (...)".
Plus les autos prolifèrent, plus la police se renforce. Et s'équipe face aux gangs. Depuis Clemenceau, certains agents, las d'être ridiculisés par la bande à Bonnot - circulant à bord de Delaunay-Belleville ou de Dion-Bouton - ont troqué leurs vélos pour des Renault bi- et quadricylindres ou des Clément-Bayard. Rebaptisés par le bon peuple les "brigades du Tigre", ces pelotons d'élite furent les premiers à être motorisés (Voitures de police, par Dominique Pagneux, éd. EPA). Après la guerre de 14, on les dota de torpédos Renault monoquatre. Mais les flics semblent toujours avoir eu un... métro de retard sur les voyous. A la Libération, Pierrot le Fou et Jo Attia les baladaient à bord de leur traction Citroën.
Le conducteur moyen, pendant ce temps-là, est enserré dans une réglementation de plus en plus stricte. Depuis le 10 mars 1899, chaque voiture doit être immatriculée. En 1921, surtout, apparaît le Code de la route: il s'adresse aussi bien aux "conducteurs de véhicules automobiles ou d'attelages qu'aux piétons et aux bêtes de trait"! Depuis deux ans déjà, il est obligatoire de circuler la nuit avec "deux lanternes à feux blancs à l'avant et une lanterne à feu rouge à l'arrière". Plus tard, l'automobiliste devra aussi apprendre à boucler sa ceinture sur route puis en ville, à l'avant puis à l'arrière; à limiter sa vitesse; à être sobre avant de prendre le volant; à jongler avec les points de son permis...
"Dieu bénisse Henry Ford"
La galère... Mais, à la clef, beaucoup de satisfaction! Avec l'automobile, les gens désormais voyagent. Ils ne sont plus transportés comme avec le train. La voiture offre une extraordinaire liberté, elle permet aussi de se distraire et... d'épater les voisin (e) s. Surtout, elle rend service. Dans les campagnes américaines, par exemple, où "nulle part l'auto n'a apporté de changements aussi positifs (...), la voiture supprime l'isolement des ruraux" (La Révolution automobile, par Bardou, Chanaron, Fridenson et Laux, Albin Michel). En 1938, un fermier de l'Ohio écrivait à Edsel Ford: "Jusqu'à ce que votre père nous ait fourni le moyen de voyager à bon marché, la grande majorité de nos familles étaient rarement allées à 5 miles de leur domicile. Chaque fois que je croisais une famille en auto, je m'écriais avec reconnaissance: ``Dieu bénisse Henry Ford! ''" Retournement de l'Histoire: aujourd'hui, certains Etats américains, comme l'Illinois, obligent les personnes âgées de plus de 65 ans à passer un test de conduite tous les deux ans. En cas d'échec, celles-ci se retrouvent coincées, loin de tout. Comme les fermiers d'antan!
Mais, pour l'heure, grâce à l'auto, les gens découvrent les joies du tourisme. Au prix parfois de certains compromis avec leur toilette. Il faut voir, saisie par l'objectif de Robert Doisneau, cette Bigouden avec sa coiffe bretonne traditionnelle tâchant, tête baissée, de s'engouffrer dans une Vedette... Les déplacements explosent: on rallie sa marina "pieds dans l'eau" à Saint-Jean-de-Monts ou son duplex "au pied des pistes" à Font-Romeu. L'institution du week-end se développe, avec son "appendice": le conducteur du dimanche. Dès 1900, Maurice Barrès voyait juste: "(...) Errer à des distances que jamais ne parcouraient le cavalier ni le piéton (...), ne compter qu'avec sa fantaisie, voilà ce que permet la voiturette (sic); elle satisfait un instinct antique et constant: le vagabondage."
L'automobile, en réalité, bouleverse les modes de vie. Elle permet aux entreprises d'élargir le recrutement de leur personnel; elle renforce la domination des grandes villes sur leur région... Sa diffusion génère une kyrielle de services "au volant". Très tôt, dans les villes d'Amérique du Nord, d'Australie et de Nouvelle-Zélande, on se rend au cinéma, au restaurant sans descendre de sa voiture. Et même à la banque ou à l'église! La première drive-in bank est apparue dans la région de Los Angeles, dès 1937, et une drive-in church est inaugurée en 1954 à Garden Grove, en Californie. Plus couramment, l'auto permet l'éclosion de nouveaux temples du commerce, les hypermarchés et leurs vastes parkings, envahis chaque samedi par des cohortes de ménages tout occupés à pousser des Caddies et à remplir leurs coffres.
Elément de standing, instrument d'évasion, symbole de la société de consommation, l'auto, peu à peu, façonne la culture des hommes. Elle exalte la liberté, renforce l'individualisme, participe à l'émancipation féminine. Plus concrètement, elle aide à acclimater dans l'opinion le progrès technique, l'innovation, la modernité. La vente de voitures à crédit est à l'origine de l'extension massive du crédit à la consommation. De même, c'est l'automobile qui, très tôt, nourrit les plus gros budgets des agences de publicité. Et engendre sa propre presse. Aujourd'hui, le premier magazine (Action Auto Moto) diffuse à plus de 403 000 exemplaires. Mais, dès la fin de 1900, il existait déjà 25 publications en France alors qu'il ne circulait que 5 386 voitures! Et ces journaux organisent des compétitions pour montrer les possibilités extrêmes des véhicules. Magny-Cours n'est que l'héritier de la coupe Gordon-Bennett. Le 18 décembre 1898, le pilote Chasseloup-Laubat dépasse les 63 km/h; Jenatzy atteint les 105 km/h sur sa Jamais Contente en 1899. Puis on dépasse les 200 en 1909, les 300 en 1927, les 500 en 1937... Le 14 octobre 1997, une "voiture" franchissait le mur du son à 1 223,28 km/h dans le désert de Black Rock (Nevada)... On songe aux propos du philosophe Paul Virilio: "La conquête de l'espace agrandit notre monde, mais la vitesse, qui la rend possible, le rétrécit."
Révolution du siècle? Il suffit, pour s'en convaincre, de prendre la mesure de la puissance économique acquise par l'industrie automobile. Les deux premières firmes mondiales s'appellent General Motors et Ford. On trouve 5 constructeurs parmi les 20 principales entreprises de la planète! Qui produisent, bon an mal an, quelque 50 millions de voitures et emploient 10% environ de la population active des pays développés. Si l'automobile a provoqué la disparition d'autres modes de transport (à Paris, le dernier omnibus à cheval est mis à la retraite en 1913; les carrioles et les fiacres s'effacent dans les années 20) et concurrencé sévèrement le rail, elle a entraîné un développement spectaculaire de multiples activités, comme les pneumatiques, le verre, les matières plastiques, le textile, les assurances, les machines-outils, l'acier, les composants électroniques... A eux seuls, voitures et camions en circulation sur la planète absorbent chaque année plus de 1 milliard de tonnes de pétrole. L'an dernier, 45% environ de la consommation française de carburants a disparu dans les réservoirs. Pour la plus grande joie de l'Etat. En 1997, l'auto a rapporté au budget français plus de 300 milliards de francs. Le fisc frappe à tous les étages, sous forme de TVA sur les voitures neuves, l'entretien des véhicules, les assurances (obligatoires depuis 1958), mais aussi via les péages, cartes grises, permis de conduire et autres vignettes... Sans compter les PV! Nouveau corps d'auxiliaires féminines, les contractuelles sont aussi "filles" de l'automobile. Lorsque les premières "aubergines" ou "pervenches" battent le pavé parisien, en juillet 1971, le préfet de police pense que "le sourire de ces demoiselles sera plus efficace que leur carnet de contraventions"!
Un formidable moteur d'innovations
Ce n'est pas le seul métier, loin de là, que l'auto ait engendré. Ainsi, vers 1905, émerge le marché des taxis - les "voitures de place", dont la percée est possible grâce à l'invention du taximètre, permettant de déterminer avec précision le prix de la course. Dans un tout autre domaine, l'élimination des épaves - un problème éternel: en 1648, déjà, la ville de Paris prit un édit contre les coches abandonnés... - les démolisseurs-récupérateurs, baptisés "dépeceurs d'autos" jusqu'en 1939, traitent chaque année 10 millions de véhicules mis au rebut en Europe. Autre exemple: les loueurs automobiles. Walter Jacobs crée la première entreprise à Chicago en 1918. Il dispose d'un parc de 12 Ford T. Mais, en 1926, il se fait racheter par John Hertz, propriétaire des Yellow Cabs (les taxis new-yorkais), firme devenue aujourd'hui le n 1 mondial malgré la concurrence d'autres vénérables enseignes, comme celle fondée en 1946 par un certain Warren E. Avis à Detroit - le premier loueur à s'installer dans un aéroport. Enfin, il suffira, en 1932, que Solido - la plus ancienne marque de miniatures du monde, fondée par le Français Ferdinand de Vazeilles - se lance dans la production de modèles réduits pour que des générations de petits garçons délaissent leurs soldats de plomb.
Filière économique imposante, l'automobile éclaire encore à elle seule l'histoire industrielle. C'est un formidable moteur d'innovations: "Objet technique, explique Gabriel Dupuy, elle s'est enrichie des apports de multiples découvertes et progrès" (L'Auto et la ville, Flammarion). En vrac: le rétroviseur (1906), la boîte automatique (1907), le pare-brise feuilleté (1910), les essuie-glaces (1916), la traction avant (1926), la direction assistée (1950), le frein ABS (1973), l'Airbag (1981), l'embrayage électronique (1988)... Ironie de l'Histoire: la voiture électrique, qui tente un retour, avait été enterrée au début du siècle par l'invention du démarreur... électrique. Mis au point par l'Américain Charles F. Kettering, il permettait, sans aucun effort ni danger - adieu la manivelle! - de mettre en route des moteurs à essence.
Encore plus révolutionnaire: l'industrie automobile bouleverse définitivement, dès le début du siècle, les modes de fabrication, puis de commercialisation et même de recrutement! Si la voiture reste alors en Europe un produit d'élite, fait sur mesure, "l'Amérique va l'intégrer dans son projet démocratique et la produire en masse" (Je suis l'automobile, par Jean-Pierre Orfeuil, éd. de l'Aube). L'idée de mécaniser le processus industriel faisait déjà son chemin dans d'autres branches - à Cincinnati, dès le milieu du XIXe siècle, les conserveries de viande utilisent les premières chaînes mobiles - mais c'est bien dans l'automobile que l'organisation tayloriste du travail trouve son expression la plus achevée. Toute sa vie, Frederick Winslow Taylor - ce ne pouvait être qu'un Américain - s'est employé à accroître la productivité de la main-d'úuvre. Ce qui suppose "l'utilisation maximale de l'outillage et la suppression des gestes inutiles". Henry Ford sera l'industriel le plus zélé pour exploiter ces principes. Dès 1908, il fonde son expansion sur un modèle unique, une voiture robuste, de conception simple et d'entretien facile: le modèle T. De son petit nom la "Lizzie", noire parce que les ingénieurs avaient observé que cette couleur de peinture séchait le plus vite! Ford ne va cesser d'en baisser le prix afin d'élargir sa clientèle, et pour cela réduire ses coûts de revient en produisant en grande série. Il en vendra plus de 15 millions!
Le taylorisme et le fordisme - raillés avec tant de talent par Chaplin, en 1936, dans Les Temps modernes - permettront de satisfaire une demande croissante. Car, depuis la guerre de 14, l'utilité de l'automobile est véritablement reconnue. "Le recours aux taxis parisiens lors de la bataille de la Marne, l'approvisionnement de Verdun en 1917 par les camions de la Voie sacrée, l'omniprésence de la Ford T sur les champs de bataille du monde entier (y compris en Arabie, où Lawrence remplaça ses chameaux par des Ford) ont rendu la présence de la voiture encore plus familière" (La Révolution automobile). Ce succès n'assure pas pour autant un avenir durable à l'industrie, qui, aux Etats-Unis, dès le milieu des années 20, connaît des excédents de capacité. Il faut faire preuve d'imagination, stimuler la demande. La concurrence porte non plus seulement sur les prix, mais aussi sur les produits. Le marketing est né, ou plutôt le sloanisme, du nom du directeur général de General Motors. Alfred Sloan invente la politique de gammes pour satisfaire les besoins de différenciation sociale et entraîner le renouvellement rapide des modèles. Options, couleurs, design... on n'attrape pas les clients avec du vinaigre. Plus tard, après la Seconde Guerre mondiale, l'industrie automobile sera encore à la base de nouvelles méthodes de production, très flexibles, qu'emprunteront d'autres secteurs. Un ingénieur de Toyota, Taiichi Ohno, réduira au minimum les stocks pour une production "au plus juste" et réhabilitera le travail des salariés pour une qualité optimale.
Ces nouvelles techniques de fabrication ont transformé en profondeur le travail en usine. Les ouvriers sont désormais interchangeables, leurs tâches parcellisées, l'automatisation va croissant. Les constructeurs ont introduit des engins hautement spécialisés, confiés à des ouvriers que l'on appellera peu à peu, du nom de leurs machines, les ouvriers spécialisés - les OS. En contrepartie, la compétence des "compagnons", dans la tradition artisanale, sera de moins en moins recherchée. Ce qu'il faut aux constructeurs, c'est une main-d'úuvre bon marché - salariés agricoles, ouvriers-paysans et, surtout, immigrés... L'automobile apparaît ainsi comme un lieu de concentration et un facteur de migration de main-d'úuvre sans précédent. Le mouvement s'amorce, dès les années 10-20, aux Etats-Unis. "Detroit devint une ville polyglotte et la compagnie Ford afficha des avis en au moins huit langues différentes, dont le grec et l'arabe" (La Révolution automobile). Avec, à la clef, d'inévitables problèmes d'intégration. Comme en 1967, lors de la "grande rébellion" des ouvriers noirs à Detroit. Bilan: 41 morts, 347 blessés, 3 800 arrestations et 500 millions de dollars de dommages!
Contestée par ses salariés, l'industrie automobile va surtout faire l'objet, dans ce dernier quart de siècle, d'une opposition de plus en plus virulente dans l'opinion, au fur et à mesure que le public prend conscience de ses retombées néfastes. Dans son livre Unsafe at Any Speed, paru en 1965, un jeune avocat, Ralph Nader, lâchera son fameux: "L'automobile, ça tue, ça pue et ça pollue." Pourtant, à ses débuts, celle-ci fait bonne figure. Elle occupe moins de place au sol qu'un attelage. Elle supprime les inconvénients des chevaux: crottin, urine, cadavres, sans parler des risques sanitaires, en particulier le tétanos. Enfin, plus "docile" que les animaux, n'est-elle pas plus sûre? Une fois encore, c'est sa diffusion en masse qui va se retourner contre elle. Trop d'auto tue l'auto.
C'est vrai en matière de pollution. Les moteurs rejettent dans l'atmosphère des oxydes de carbone, d'azote, des hydrocarbures volatils, des particules. Dès 1961, la Californie promulguait des mesures en matière de contrôle des gaz d'échappement. Sur la base du Clean Air Act, au moins 10% des véhicules mis en vente dans cet Etat à partir de 2003 devraient être propres. Ailleurs, mise en place de procédures d'alerte, pastille verte, "fêtes de l'air", circulation alternée, interdiction des véhicules en centre-ville, covoiturage, les initiatives ont fleuri. Mais la pollution est aussi visuelle. Le XXe siècle a vu la ville "capituler devant l'automobile et s'offrir à elle sans résistance", selon le mot de l'urbaniste Moshe Safdie.
C'est clair, la voiture a bouleversé le décor. Outre les panneaux de signalisation et les feux de circulation, déjà évoqués, il a fallu généraliser les trottoirs, marquer les passages pour piétons par des clous puis par des bandes peintes, installer des lampadaires, concevoir des ralentisseurs, construire des carrefours giratoires, multiplier bordures, barres, grilles et plots contre le stationnement sauvage... Payant, ce dernier a nécessité des horodateurs et autres parcmètres (le premier a été installé à Oklahoma City en 1935 et en Europe, à Londres, en 1958). Puis de véritables parcs dédiés: on en a créé ces dix dernières années, en France, autant que durant les vingt années précédentes! Le développement prodigieux du trafic a également entraîné la réalisation d'un réseau dense de voies (jusqu'à 30% de la surface du tissu urbain; 40% à Los Angeles!) et d'infrastructures pour "enjamber", "éviter", "survoler", "contourner"... De Saint-Cloud, de Fourvières ou de Bagnolet, les plus jeunes ne connaissent que les échangeurs ou le tunnel. Et si Paris a pu échapper à la voie express de la rive gauche, à la radiale Vercingétorix, si l'autoroute A 14 épargne la forêt de Saint-Germain-en-Laye, les Parisiens subissent depuis vingt-cinq ans le périphérique - l'axe routier le plus fréquenté d'Europe: plus de 1 million de véhicules quotidiens!
Les Franciliens, eux, ne s'entendent plus. Un sur dix est exposé, du fait de l'automobile, à un bruit excessif. D'après le conseil régional, sur près de 90% des axes routiers la limite légale des 60 décibels est dépassée. La prolifération des voitures et leur utilisation plus fréquente - les Français effectuent 80% de leurs déplacements en auto - génèrent aussi de plus en plus d'encombrements. En 1994, en France, on estimait le nombre d'heures perdues dans les embouteillages à 80 millions. Et ce malgré l'apparition de drôles d'animaux, tel Bison futé (1976), et de multiples mesures, comme les couloirs de bus (à Paris, le premier remonte à 1964).
Mais ce sont les coûts sociaux des accidents de la route qui frappent le plus les esprits. En un siècle d'existence, révèle un rapport de la Croix-Rouge, l'automobile a fait 30 millions de victimes dans le monde! Et 500 000 morts en moyenne annuelle depuis 1990, soit la population d'une agglomération comme Nantes. Si les décès diminuent dans les pays du Nord, ils ne cessent d'augmenter dans le Sud, où les accidents de la route représentent dans les pays en développement un coût presque égal à l'aide qu'ils reçoivent!
Banalisée, désacralisée, la bagnole a cependant encore de beaux jours devant elle, tant on voit mal l'humanité y renoncer. "Cette fin du XXe siècle ne correspond à aucune rupture identifiable, explique Gabriel Dupuy. On a pu croire au milieu des années 70 que le choc pétrolier signifiait sa condamnation. Il n'en a rien été." Personne d'ailleurs ne table sur un fléchissement de la croissance du parc. Selon les prévisions, il pourrait atteindre 2 525 millions de véhicules en 2060. Près de quatre fois plus qu'aujourd'hui! Dans le même temps, le trafic mondial devrait doubler d'ici à 2020, puis doubler une nouvelle fois d'ici à 2050. C'est ainsi: l'automobile s'est rendue pour longtemps indispensable. Parce qu'elle s'est adaptée (les véhicules mis actuellement en circulation polluent environ dix fois moins que ceux du début des années 70) et que ce n'est pas fini (les voitures électriques ou hybrides, ou les Midgets, ces très petits véhicules, finiront par se généraliser). Parce que notre rapport à la bagnole, l'usage que l'on en fait, est en train de changer. Déjà, certains constructeurs proposent de nouvelles formes de commercialisation et de propriété.
L'automobile? Elle devait faire du cheval "un objet de luxe ou de boucherie", prophétisait un visiteur du Salon en 1898. Cent ans plus tard, le slogan du prochain Mondial proclame qu'elle est "le seul rêve qui nous transporte". En voiture!.
(1) Le Gerpisa, ou Groupe d'études et de recherches permanent sur l'industrie et les salariés de l'automobile, a été créé en mars 1981 par le sociologue Michel Freyssenet et l'historien Patrick Fridenson. Associé au centre de recherches historiques de l'Ecole des hautes études en sciences sociales, ce réseau regroupe de nombreux chercheurs français et étrangers. Qu'ils soient ici remerciés, et tout particulièrement les deux cofondateurs.
Bruno Abescat, L'Express, 27.8.1998
- Les piles à hydrogène font le plein
- Technologie alternative de production d'énergie électrique, les piles à combustible s'apprêtent à faire leur entrée chez les constructeurs automobiles.
Dès 2002, les piles à combustible représenteront un marché annuel de 8 milliards de dollars, d'après les analyses du Jet Propulsion Laboratory. Elles sont de plus en plus utilisées pour la génération stationnaire d'énergie, mais c'est le marché automobile qui suscite l'engouement dont elles sont l'objet. L'occasion de s'y imposer est sans doute unique car, bon gré mal gré, les constructeurs sont obligés aujourd'hui de s'intéresser de près aux technologies alternatives. Ils risquent sinon d'être exclus du marché de la Californie et de plusieurs autres Etats américains, qui seront soumis à des quotas de voitures propres, et d'être incapables de s'adapter au traité de Kyoto limitant les émissions de CO2. De toutes les alternatives (voitures hybrides, batteries), la pile à combustible est la plus hasardeuse, mais aussi la plus prometteuse. En effet, cette technologie unique permet de transformer de l'hydrogène en énergie électrique et en eau : si l'hydrogène est délicat à stocker, on peut aussi l'obtenir à partir de méthanol. Les piles sont constituées de deux électrodes séparées par une membrane électrolyte, et leur principe est l'inverse de l'électrolyse de l'eau. A l'anode, l'hydrogène est décomposé en électrons libres et en protons. Les électrons circulent dans le circuit extérieur tandis que les protons migrent à travers la membrane vers la cathode, où ils se combinent avec l'oxygène de l'air pour donner de l'eau. L'enjeu technologique actuel est de baisser les coûts, avec deux objectifs essentiels. D'une part, réduire la quantité de matériaux nobles (platine, ruthénium) qui composent les catalyseurs, par l'augmentation de leur activité ou l'utilisation de matériaux alternatifs. D'autre part, trouver un matériau peu coûteux, poreux, conducteur électrique et insensible aux réactions électrochimiques, capable ainsi de constituer les plaques où circulent les flux d'air et de combustible. Actuellement, on est obligé d'usiner à un coût prohibitif des canaux dans des plaques de graphite de haute densité. La solution a peut-être été trouvée au Laboratoire national d'Oak Ridge (Tennessee) avec une résine chargée de fibres de carbone, dont les canaux sont directement moulés. De telles avancées technologiques suffiront-elles à maintenir l'intérêt des constructeurs, laboratoires ou pouvoirs publics ? Ford et Daimler ont déjà investi des centaines de millions de dollars pour s'associer au leader actuel du marché, la société canadienne Ballard Power Systems. L'objectif du consortium est la production en série de véhicules dès 2004. De quoi encourager d'autres initiatives...
La Recherche n° 314, 11/1998
- Voitures et CO2 : Sur la route des réductions
- La nouvelle n'est pas passée inaperçue au sommet de Buenos Aires : l'industrie automobile européenne s'engage à réduire de 25 % l'émission de CO2 par les voitures particulières avant 2008.
La Commission européenne vient de planifier avec l'Association des constructeurs automobiles européens (ACEA) une réduction d'environ 25 % des émissions de gaz carbonique par les voitures particulières vendues en Europe à partir de 2008, soit une moyenne de 140 g par kilomètre pour 186 g aujourd'hui (pour comparaison, la moyenne américaine atteint 260 g, la japonaise 191 g). Conclu cet automne, l'accord lie tous les grands constructeurs automobiles européens, mais aussi les divisions européennes de Ford et General Motors. Ce qui représente 85 % du marché communautaire. Pour remplir leur contrat, les membres de l'ACEA comptent réaliser des progrès sur cinq terrains technologiques : l'injection directe, l'allégement des matériaux, la réduction des frottements, l'amélioration de l'aérodynamisme et le perfectionnement de la transmission. Dans cette perspective, les constructeurs viennent de lancer un vaste programme commun fédérant 150 projets de recherche sous l'égide de l'European Council for Automotive R&D. Le budget global du programme jusqu'en 2008 est évalué à 320 millions d'écus. Selon les projections de la Commission, cette réduction des émissions permettrait à l'Europe de remplir une partie non négligeable (environ 15 %) de ses obligations fixées en décembre 1997 lors du sommet de Kyoto. D'autres mesures sont envisagées à l'échelle communautaire, qui relèvent principalement de la politique énergétique : notamment favoriser la cogénération et les énergies renouvelables mais aussi développer des technologies non polluantes (voir l'article ci-dessous). En mars dernier, l'Union avait déjà accompli un premier acte politique important en fixant la contribution respective de ses Etats membres à l'effort global*.
Consulté sur le projet d'accord avec l'ACEA, le Parlement européen a toutefois regretté que l'effort ne soit pas programmé sur des bases plus contraignantes. Les députés s'étaient notamment prononcés en faveur d'un effort beaucoup plus important de la part de l'industrie automobile : 90 g/km en 2010.
La Recherche n° 315, 12/1998
- Prime aux véhicules électriques
- 15.000 F pour tout achat entre le 1.9.1998 et lz 31.12.1999, limité à 3000 véhicules
576 voitures vendues au premier semestre 1998
91.900 F sans les batteries pour la 106 électrique contre 63.400 pour la version essence
- Automobile et développement durable : bilan environnement-matières premières 1975-2050, Les Cahiers du CLIP (Club d'Ingénierie Prospective Energie et Environnement), décembre 1998.
- Les résultats sont riches d'enseignements à plus d'un titre. Tout d'abord, ils montrent que la simple généralisation des pots catalytiques devrait permettre la réduction des rejets globaux de polluants du parc automobile d'environ un facteur trois d'ici à 2015. Ainsi, à moyen terme le défi majeur à relever pour l'industrie automobile est celui de la consommation d'énergie et des émissions de CO2. Dans ce cadre, parmi l'ensemble des technologies qui ont été étudiées, la pile à combustible alimentée par de l'hydrogène électrolytique présente les plus mauvais résultats. Par contre, le véhicule hybride essence (mais dont le principe peut être appliqué à d'autres carburants : gazole, GPL, gaz naturel, etc.) possède le meilleur potentiel de réduction de la demande globale d'énergie et des rejets de CO2 et ce malgré un accroissement du parc de 40 %. Cette solution a d'autant plus d'intérêt qu'elle ne suppose pas de bouleversement majeur du paysage industriel (les infrastructures de production et de distribution de carburant sont déjà en place) et qu'elle pourra profiter des avancées sur les moteurs thermiques et électriques.
Par ailleurs, un véhicule pile à combustible fonctionnant avec un système de production embarquée d'hydrogène à partir de méthanol a été étudié. Ce carburant dont la production et la distribution ne sont pas sans soulever des difficultés ne devrait être qu'une étape. L'objectif de certains constructeurs est d'arriver à employer l'essence comme source d'hydrogène à bord du véhicule. D'importants travaux de recherche sont menés pour la réalisation de réacteurs compacts basés sur ce principe. Mais, jusqu'à présent leur réelle faisabilité est loin d'avoir été démontrée. Outre les problèmes communs avec le reformeur embarqué de méthanol (compacité et temps de mise en marche élevé), il faut souligner qu'ils ne peuvent pas fonctionner avec une essence classique (notamment à cause de la teneur en soufre). Les hydrocarbures liquides dont les caractéristiques seraient susceptibles de convenir pourraient par exemple être des carburants de synthèse produits à partir de gaz naturel (DME sous une pression de 5 bars, hydrocarbures issus du procédé Fischer-Tropsch). Ces filières sont proches de celles du méthanol. Les résultats présentés où le méthanol est utilisé comme source d'hydrogène pour alimenter une pile à combustible donnent une bonne image de leurs avantages et inconvénients : un faible niveau d'émissions à l'échappement du véhicule, mais une importante consommation d'énergie pour la production du carburant. Dans un objectif de réduction des émissions globales de CO2, ces solutions offrent, a priori, de moins bonnes performances que la voiture hybride essence.
Du point de vue du développement durable, les travaux prospectifs montrent donc qu'il est possible d'améliorer la situation de la filière automobile au cours des prochaines décennies.
A plus long terme, le principal problème sera celui de l'évolution du cours du pétrole et l'épuisement des réserves.
Les rendements des diffénts types de carburants
| Rdt GM | Rdt Fil. | Rdt total |
Véhicule (gaz naturel cycle combiné) | 85 % | 50 % | 43 % |
PAC hydrogène RSV (pétrole) | 55 % | 63 % | 35 % |
PAC hydrogène (gaz naturel) | 55 % | 60 % | 33 % |
Hybride essence 2005 | 40 % (2) | 81 % | 32 % |
Véhicule électrique (centrale au fioul) | 85 % | 36 % | 31 % |
Diesel 2005 inj. direct "common rail" | 33 % | 84 % | 28 % |
PAC réformeur méthanol | 44 % | 60 % (1) | 26 % |
Essence 2005 inj. directe | 25 % | 81 % (1) | 20 % |
PAC hydrogène électrolyse | 55 % | 19 % | 10 % |
Rdt GM : rendement groupe motopropulseur ; Rdt Fil. : rendement filière carburant ; Rendement total
PAC : pile à combustible ; RSV : résidus sous vide ; (1) Source PSA ; (2) équivalent sur le cycle urbain
Le véhicule électrique
Le véhicule électrique, contrairement aux véhicules thermiques, n'émet aucun polluant lors de son utilisation. Néanmoins, il faut prendre en compte les émissions associées à la production d'électricité lorsque celle-ci est d'origine thermique (les émissions associées à la production de l'électricité nucléaire et hydraulique sont considérées comme négligeables). On comprend donc aisément que les émissions dépendent des modes de production propres à chaque pays. On a envisagé deux cas :
- l'électricité utilisée par le véhicule électrique est produite à partir des modes de production nationaux actuels.
Ici, on considère que le véhicule électrique peut être rechargé à toute heure du jour et de la nuit. On ne tient donc pas compte des périodes creuses et des périodes de pointe...
- l'électricité utilisée par le véhicule est produite uniquement à partir du gaz.
Dans ce cas, on considère que l'accroissement de la demande d'électricité engendré par le marché du véhicule électrique est satisfait par de nouvelles capacités de production. On fait l'hypothèse que cette production supplémentaire est issue de centrales utilisant du gaz naturel de type “cycle combiné” fonctionnant avec un rendement de 45 %.
Les résultats montrent que les véhicules électriques permettent de réduire de manière tout à fait significative les émissions de gaz à effet de serre dans toutes les zones étudiées.
Ces réductions seraient de l'ordre de 50 % en Amérique du nord, 60 % en Europe, 90 % au Mercosur, et 40 % pour la CEI dans le cas où les modes de production électrique restent inchangés.
Dans l'hypothèse où l'électricité est produite uniquement à partir du gaz naturel dans des cycles combinés la réduction des émissions au km de gaz à effet de serre est d'environ 60 % par rapport aux carburants classiques.
L'utilisation du véhicule électrique offre donc sans conteste les meilleurs avantages en terme d'environnement. D'une part, parce qu'il ne participe en aucune façon à la pollution urbaine, et d'autre part, parce qu'il permet quasiment dans tous les cas une réduction importante des émissions de CO2 et de CH4.
Seul un véhicule consommant une électricité produite à partir de charbon uniquement engendre une augmentation des émissions de gaz à effet de serre par rapport aux véhicules essence et diesel.
...
Le principal attrait des véhicules électriques est la promesse d'une amélioration de la qualité de l'air dans les villes. Quant aux émissions imputables aux combustibles utilisés pour produire l'électricité, leurs niveaux restent dans bien des cas très inférieurs à celles engendrées par les véhicules à moteur à combustion interne.
En effet, que l'électricité soit produite à partir des parcs de production nationaux ou qu'elle le soit uniquement à partir du gaz, la réduction des émissions de GES par rapport à tout autre véhicule possédant un moteur à combustion interne est considérable.
Cependant, même si le V.E possède des avantages inégalables en terme d'environnement, sa faible autonomie et son coût l'empêchent pour l'instant de rivaliser avec ses concurrentes “thermiques”. A titre de comparaison, l'autonomie d'un VE est estimée à 100 km, celle d'un véhicule essence à 500 km et celle d'un véhicule GNV à 300 km.
Conclusion
Parmi les différents moyens envisagés aujourd'hui pour "rouler au gaz ", seuls les véhicules GNV et les véhicules électriques permettent de réduire significativement les émissions de GES. Le véhicule GNV permet une réduction d'environ 20 % (+ ou - 4% selon l'origine de l'électricité avec laquelle est comprimé le gaz) par rapport au véhicule essence. Pour le véhicule électrique, il permet dans la quasi totalité des cas une réduction considérable des émissions de GES par rapport à un véhicule essence, de l'ordre de 50 % en Amérique du Nord, 60 % en Europe, 90 % au Mercosur et enfin 40 % pour la CEI. Dans l'hypothèse où l'électricité est produite uniquement à partir du gaz naturel dans des cycles combinés, la réduction est d'environ 60 %. L'utilisation du véhicule électrique offre donc sans conteste, les meilleurs avantages en terme d'environnement. D'une part, parce qu'il ne participe en aucune façon à la pollution urbaine, et d'autre part, parce qu'il permet quasiment dans tous les cas une réduction importante des émissions de GES. En effet, seul un véhicule électrique qui utiliserait exclusivement de l'électricité produite à partir du charbon n'offrirait aucun avantage en terme d'effet de serre.
Néanmoins, compte tenu des contraintes inhérentes à ce type de véhicules (autonomie et coût pour le véhicule électrique, réseau de distribution pour le GNV), mais aussi compte tenu des contraintes liées au renouvellement du parc automobile, la proportion de véhicules GNV et de véhicules électriques envisageable dans le parc automobile à l'horizon 2020 reste faible. En conséquence, l'impact sur les émissions de GES reste très limité.
La pénétration de véhicules GNV et de véhicules électriques dans les parcs se justifie donc d'abord par des considérations d'environnement local. Mais, pour être efficace, leur pénétration ne doit pas se limiter aux flottes captives. En ce qui concerne l'effet de serre et malgré des hypothèses de pénétration "optimistes", on ne peut pas attendre d'impact important avant 2020. Par conséquent pour les 20 prochaines années, la réduction des émissions de GES imputables à l'automobile continuera de reposer très largement sur l'amélioration des véhicules essence et sur les mesures facilitant les transferts modaux.
- Principaux avantages de différents carburants
carburant | essence, gazole | GPL | hydrogène | électricité |
émissions | xx... | xxxx. | xxxxx | xxxxx |
potentiel énergétique | xxx.. | xx... | xxxx. | x.... |
coût d'un plein | xxx.. | xxxx. | x.... | xxxxx |
temps pour faire le plein | xxxxx | xxx.. | xx... | x.... |
encombrement du réservoir | xxxxx | xxx.. | xx... | xxxxx |
réseau de distribution | xxxxx | xxx.. | x.... | x.... |
dépendance aux ressources naturelles | x.... | xx... | xxxxx | xxx.. |
performances | xxxxx | xxxxx | xx... | x.... |
autonomie | xxxxx | xxx.. | xx... | x.... |
recyclage | xxxx. | xxxx. | xx... | x.... |
potentiel de progrès | xx... | xxx.. | xxxxx | xxxx. |
- Partenariat Transport Energy Strategy (VES - Verkehrswirtschaftliche Energie Strategie) en Allemagne
- Fondé en 1998, cette association volontaire regroupe des représentants du gouvernement fédéral allemand (Ministère des transports, des bâtiments et de la ville, BMVBS), des constructeurs automobiles allemands, européens et des pétroliers et des distributeurs d'énergie : BMW, Daimler, Ford, GM/Opel, MAN, Volkswagen ; BP/Aral, Shell, Total ; RWE, Vattenfall.
Les travaux identifient la nécessité de se concentrer sur le potentiel des énergies renouvelables et de l'hydrogène.
Au travers du "Clean Energy Partnership", le consortium met en place une démonstration de station à hydrogène à Berlin.
- Dans la principauté de Monaco le véhicule électrique bénéficie des plus hauts égards (AutoVolt, 11.1998)
- Nous tirons de "Génération VE" l'information suivante :
Deuxième au hit parade du taux d'équipement par habitant, la Principauté de Monaco aime le véhicule électrique, conjuguant ainsi protection de l'environnement et passion pour l'automobile. Un développement initié par un fort engagement des pouvoirs publics. La Principauté de Monaco manifeste ainsi trois passions : la protection de l'environnement, l'attrait pour les techniques nouvelles et le sport automobile, avec le Grand Prix de Formule 1 et le Rallye de Monte Carlo. Trois passions qui se rejoignent dans le véhicule électrique. Avec 70 véhicules électriques pour 30 000 immatriculations, le Rocher arrive derrière la Suisse pour le taux d'équipement par habitant, et accueille un important rendez-vous international du véhicule électrique.
Les dimensions de la Principauté se prêtent au véhicule électrique, même si les rues pentues mènent la vie dure aux batteries. Mais surtout, l'engagement des pouvoirs publics est réel. Dès 1986, le Prince Rainier a lancé un groupe de travail sur le sujet. Depuis, les aides financières sont venues soutenir le développement. "L'Etat subventionne à hauteur de 30 % l'achat des véhicules électriques à usage professionnel, batterie comprise", indique Raoul Viora, directeur du contrôle technique et de la circulation.
Pour l'immatriculation, qui, à Monaco, doit être renouvelée tous les ans, les frais sont réduits de moitié. Enfin dans les parkings publics, les abonnés ont droit à une prise et l'énergie est gratuite. Les administrations locales ont bien sûr donné l'exemple elles détiennent la moitié du parc. Les entreprises de service public comme la SMEG (Société Monégasque de l'Electricité et du Gaz, le distributeur d'énergie local) et Monaco Télécom renouvellent leur flotte en partie en véhicules électriques. Enfin, grâce aux subventions du gouvernement, plusieurs petites entreprises ou commerces se sont équipés.
Mais le véhicule électrique mobilise aussi des citoyens monégasques, à l'image de Georges Dick, qui préside un club rassemblant une cinquantaine de membres. Le club organise des débats et cherche à sensibiliser les jeunes. "Nous avons ainsi distribué un livre dans toutes les classes primaires de Monaco", note Georges Dick, "et créé un site Internet pour les adolescents (wvvw.amave.mc). Au printemps prochain, le club proposera aux jeunes d'essayer des scooters." Autre projet : une journée sans véhicule thermique, comme celle réalisée à La Rochelle.
Le véhicule électrique entrerait-il dans les moeurs monégasques ? Dans les moeurs princières en tout cas : le Prince Rainier est président du club du véhicule électrique. et il n'est pas rare de voir le Prince Albert circuler dans sa 106 électrique.
- Concept City Logistik expérimenté à Bâle de 1994 à 1998
En 1994, une entreprise de transport basée à Bâle (Suisse) se propose de grouper les livraisons en centre-ville. Le concept City Logistik voit le jour. Quatre ans plus tard, son concepteur tire les leçons d'un demi-échec et parle des projets liés à ce demi-succès.
En 1993, la Suisse lance un vaste programme d'économies d'énergie. Une isolation des maisons améliorée ainsi qu'une circulation routière limitée sont à l'ordre du jour d'Energie 2000. Riche d'une grande expérience professionnelle dans le domaine des transports, Christian Aeschlimman propose le concept de City Logistik, qui vise à grouper les transports dans le centre-ville de Bâle. Il ne s'agit pas de bannir le transport dans l'hypercentre, mais de le redéfinir.
"L'idée, explique notre chargé de projet, est d'éviter d'avoir 50 camions presque vides et de grouper ce fret dans quelques véhicules, si possible propulsés via des énergies propres."
Des platesformes de discussion ont eu lieu entre les transporteurs de Bâle (Danzas, La Poste), la municipalité et les chambres des métiers. Christian Aeschlimman raconte : "Nous ne voulions pas faire de City Logistik un monopole ou une obligation ; il fallait vendre l'idée aux détaillants et grossistes."
City Logistik, qui fonctionne comme une entreprise privée, n'a reçu à sa naissance que des maigres subventions du comité Energie 2000. Elle livre et prend le fret dans le centre-ville et dispose de trois dépôts. Le 1er septembre 1994, l'opération débute avec trois véhicules de 3,5 t : un électrique, un au gaz et un au diester.
"Au départ, il y a une sorte d'euphorie, se souvient Christian Aeschlimman. Nous livrons à la demande des commerçants et effectuons les livraisons de détail pour d'importants transporteurs. Vers 1995, l'intérêt diminue, la conjoncture est moins bonne et les détaillants ne veulent pas se compliquer la vie avec ce projet, ils restent liés à leur réseau de livraison traditionnel."
En juin 1995, les chauffeurs de City Logistik redistribuent 140 t de fret. Puis les chiffres tombent : 20 t en mai 1996, 65 t en septembre 1996. Désormais, la masse reste de l'ordre de 40 à 50 t par mois (la capacité maximale étant de 8 t par jour) ; seules deux des trois camionnettes circulent.
Une trop forte ambition
"Le véhicule électrique a vite été abandonné, raconte notre chef de projet. En 1993, cette propulsion était encore du bricolage, aujourd'hui la technique a vraiment progressé et l'électrique serait utilisable. Même chose pour le véhicule gaz, qui ne circule plus qu'à l'essence sans plomb. Nous avons alors commis l'erreur de vouloir faire deux choses en même temps : innover dans le transport et maîtriser de nouvelles motorisations."
Demi-échec? Peut-être. Mais tout n'est pas si négatif, comme le reconnaît Christian Aeschlimman : "Nous sommes toujours là. A deux ou trois reprises, j'ai voulu tout arrêter, mais je n'ai pas pu, nous sommes connus et ce projet est riche en informations pour la logistique urbaine. Les plates-formes de discussion entre transporteurs, municipalité et chambres de commerce fonctionnent toujours. Et même bien. On a vraiment prouvé que l'on peut mieux charger les camionnettes et faire beaucoup avec peu de véhicules."
L'expérience a montré que ce type de projet écologico-économique fonctionne bien lorsqu'il est subventionné à 100 %, or City Logistik a refusé cette facilité, et surtout n'a pas voulu solliciter un renforcement des restrictions municipales de type horaires de livraison très réduits (les zones piétonnes de Bâle sont livrables de 7 à 11 h, des horaires courants) ou des tonnages particulièrement restreints (les moins de 12 t sont admis en centre-ville). Si tout le monde s'accorde sur le principe de repenser la question du fret en ville, dans la réalité rares sont ceux qui font le premier pas.
A la limite entre écologie et économie, les Bâlois ont eu du mal à mordre au projet. Analyse de Christian Aeschlimman : "En fait, les détaillants sont à la fin de la longue chaîne du transport de marchandises ; ils n'ont pas assez d'influence, il est délicat de les motiver pour faire évoluer leur schéma de livraisons."
Un exemple de ce manque de motivation : les magasins clients de City Logistik n'ont jamais fait de publicité (sur leurs vitrines) afin de valoriser le projet auprès de leur clientèle.
Aujourd'hui, riche de ces enseignements, Christian Aeschlimman recommencerait différemment : Il faut grouper le fret en utilisant au maximum des structures qui existent et non en créer d'autres ; les transporteurs peuvent s'organiser et travailler ensemble."
Une bourse de fret sur Internet
D'où le nouveau projet à l'étude à Berne, capitale de la Suisse. "Une bourse de livraisons urbaines serait mise sur internet, commente Christian Aeschlimman. Le principe est simple : les transporteurs qui livrent en centre-ville s'y inscrivent, il y a des offres et des demandes. Chacun déclare les véhicules dont il dispose, une facturation est effectuée par un service comptable, il y a un contrôle sur la qualité des prestations."
Traduction dans la pratique : si vous ne pouvez pas aller à tel endroit, vous mettez votre fret sur cette bourse en appelant notre entreprise ou en tapant sur une console d'ordinateur disposée dans la cabine et vous placez les marchandises dans un dépôt de fret (de simples places de parkings grillagées), quelqu'un d'autre fera pour vous la livraison dans les délais.
Cette bourse de fret serait aussi une mine d'informations pour les logisticiens : elle permettrait de mieux étudier les tonnages transportés, les lieux de livraisons, les types de livraisons (lentes, express) et les contenus (produits frais, industriels, de détail, de gros). Mais attention, pour que certains 3,5 t et autres 12 t ne mobilisent pas tout le fret, il y aura un système de bonus et malus. Evidemment, plus vous avez de points et plus la rémunération est élevée. Si vous en faites trop, vous perdez des points. Et si vous faites l'effort de rouler au gaz, au diester ou en électrique, vos points valent plus !
Philippe Bovet, Les Routiers 748, octobre 1998
Un chauffeur et une secrétaire efficaces
Posez une question technique chez City Logistik, Monika vous trouve la réponse rapidement. A quoi tient la précision de son argumentation ? C'est simple, la secrétaire du dépôt est une conductrice poids lourd avec seize ans de métier à son actif et beaucoup d'international. Que fait-elle donc au téléphone? Elle se remet pour quelques mois encore d'un mauvais accident de sport ! Quant à Ernest, le chauffeur du Transporter Volkswagen, il a accumulé vingt-cinq ans de livraisons et apprécie ce concept de livraisons groupées. Surtout s'il y a le hayon.
Deux autres expériences suisses
Dans nombre de villes à forte fréquence touristique, des expériences sont tentées pour limiter tous les types de circulation, automobile comprise.
A Zurich, une expérience a regroupé sur un unique transporteur toutes les livraisons d'une même rue commerçante. Les livraisons étaient gratuites le temps de l'expérimentation. Les magasins ne furent clients de ce service que lors de la gratuité de l'opération !
A Burgdorf, dans le canton de Berne, les petites livraisons en centre-ville sont confiées à des cyclistes, équipés le cas échéant de remorques. Ces cyclistes sont des handicapés physiques légers ou des chômeurs en réinsertion. Ici, social et transport font bon ménage.
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