- Il me paraît nécessaire de faire découvrir ici ce métier tant il paraît méconnu de la part de trop de gens, semble-t-il.
Pour plus d'informations sur ce métiers, et les métiers connexes, consultez mes ressources documentaires
Je parle ici non d'injustice mais de faute grave, tant la valorisation du travail manuel n'a jamais été affaire que de mots et non de faits concrets dans notre société (voir Le secteur automobile à la recherche de main-d'oeuvre).
Et là je pense à tous ceux qui, par méconnaissance, affichent trop souvent cette condescendance tranquille de "ceux qui savent" sans jamais rien connaître de ce qu'ils méprisent par facilité.
Je parle de mon métier, celui que j'ai choisi et que je revendique encore, et qui m'a conduit, par choix, parce que j'ai toujours envie de mieux de faire connaître, mieux le transmettre, vers le métier (c'est en un) de professeur.
Je l'affirme haut et fort, tant ceux qui répètent à l'envi que l'on devient enseignant par facilité méritent juste d'être ignorés (et ce quelque soit leur inestimable "statut") tant ils sont ridiculement "à côté de la plaque".
Il est tout aussi dommage de remarquer que l'on confond trop souvent maintenance et production (voire la ridicule "cartérisation" des moteurs qui ne protège que les ouvreurs de parapluie qui prolifèrent, comme toute espèce nuisible, de nos jours)
Par exemple, alors que si la production peut se caractériser par son cadre très rigide, très défini (ceci dit sans intention d'en minimiser la difficulté d'apprentissage), la maintenance, parce qu'elle vient "après" sera toujours plus affaire d'hommes que de machines.
Il est tout à fait certain qu'il n'y aura jamais de robot capable de réparer une automobile, comme ils serait bien incapable de réparer une tuyauterie qui fuit sous un évier ou une tuile manquante sur un toit centenaire.
Un véhicule routier, système déjà très difficile à modéliser quand il est neuf (il n'est qu'à voir les difficultés de mise au point d'une Formule 1, par exemple, et ce malgré des moyens mis en oeuvre sans commune mesure avec ceux mis en oeuvre pour un simple véhicule particulier), devient encore moins nettement "maîtrisable" quand il aura accumulé les kilomètres, voire les mauvais traitement, soit, en un mot, quand il aura "vécu".
Alors, tant que des véhicules rouleront, ou voleront, il y aura des mécaniciens pour les entretenir.
Car, au fond, qu'est-ce qu'un mécanicien automobile ?
Est-ce ce personnage un peu bougon aux ongles noirs, plongé dans le cambouis, sentant l'essence ou le gazole, en bref un être frustre, hermétique à la culture parce que, horreur !, il travaille avec ses mains ?
Pourtant comment ne pas parler d'art en contemplant une Silver Ghost du mécanicien Henry Royce, un type 35 du mécanicien Ettore Bugatti (sur et sous le capot), lui qui déclara "qu'une oeuvre ne peut être techniquement parfaite que si elle est esthétiquement parfaite", une GTO ou autre Testarossa du mécanicien Enzo Ferrari, voire un prototype du mécanicien Franco Sbarro...
Et puis, la lecture de l'Auto Journal est moins valorisante que celle de la NRF, bien que l'une n'empêche pas l'autre...
Alors, qu'est-ce qu'un mécanicien automobile ?
Je vais essayer d'en donner ma définition (ce n'est que ma définition, je n'ai pas la certitude arrogante de "ceux qui savent") par le biais de ses qualités, qui sont aussi, heureusement, ses travers les plus marquants.
Un mécanicien, c'est, d'abord, quelqu'un de curieux, par goût et par obligation, étant donné l'évolution constante de la technique automobile et, par voie de conséquence, des techniques de la réparation automobile.
Il ne s'agit pas là d'acquérir un savoir encyclopédique mais de comprendre les bases de ce qui compose tout système mécanique ou électronique appliqué à l'automobile, en une phrase, "ne pas chercher ce que c'est, mais trouver à quoi cela ressemble que je connais déjà" (je sais, ce n'est pas très à la mode, aujourd'hui, en ces temps où la connaissance prime sur le bon sens, l'érudition sur l'intelligence).
Alors, s'il connaît la mécanique, la chimie, l'électricité, etc. (on appelle cela la pluridisciplinarité), il aura toujours à l'esprit qu'il répare les voitures mais qu'il ne les fabrique pas...
C'est aussi un entêté, forcément, car comment justifier cet acharnement à trouver la solution du problème "insoluble" que peut être une panne automobile.
La maintenance automobile, par son évolution technique exponentielle, est de moins en moins réparation, échange mécanique de pièces, et de plus en plus diagnostic, recherche, compréhension.
Quoique il ne faille pas, au grand jamais, mépriser l'indispensable savoir-faire qui constitue la "culture" de base du mécanicien, son "alphabet" vital.
Et puis, de cet acharnement à réussir naît la récompense que peut être le ronronnement régulier d'un moteur qui, quelque temps auparavant, était en pièces détachés sur l'établi ou en proie aux plus épouvantables quintes de toux, la satisfaction d'un contrôle technique sans tâche, la perfection d'une tenue de route retrouvée, etc.
On aborde là un sens du merveilleux que notre monde si impitoyablement matérialiste tente, vainement je l'espère, d'étouffer.
C'est pourtant un pragmatique aussi car, il faut ne pas l'oublier, il y a toujours présent le sous-estimé client, celui pour qui l'on travaille (de la notion de service...), même si l'on rentre là, horreur !, dans des considérations bassement commerciales.
En mécanique, bien souvent, seul le mécanicien pense encore au client, comme dans notre belle Education Nationale, où seul le professeur pense encore aux élèves... (à l'opposé de nos remarquables "gestionnaires-comptables", "purs et durs"...).
Enfin, c'est, il faut l'espérer, un altruiste (le dernier ?), capable du geste gratuit qui fera plaisir même si cela ne rapporte rien.
Je pense à ce coup de chiffon donné, à ce petit réglage effectué qui sera la touche finale d'un travail "bien fait" (le goût du travail bien fait, encore une notion que nos remarquables "gestionnaires-comptables" semblent avoir oublié et qui nous ramène aux bases de l'idée de service).
Alors, former un mécanicien, est-ce l'assommer de contenus abstraits qui flattent l'ego de l'enseignant qui à trop à prouver mais qui sont propres à dégoûter le plus patient des élèves.
Est-ce, au contraire, en faire une machine à démonter, prince du pistolet pneumatique et autres marteau et burin, à qui l'on montre l'outil et l'endroit où le mettre, parce que c'est plus facile à enseigner (mais enseigner, est-ce la recherche de la facilité ?) parce que montrer est plus confortable qu'expliquer, quitte à transformer le mécanicien en un "ferrailleur" rentable à très court terme mais désespérément sans avenir.
Il me semble que la vérité se situe quelque part entre les deux, entre la nécessaire connaissance des bases techniques qui lui permettront d'envisager l'avenir de sa profession avec sérénité et la connaissance des gestes techniques de base qui assureront la sécurité des tâches professionnelles à accomplir, sans négliger la culture, indispensable, qui en feront un citoyen responsable.
Il me semble aussi qu'apprendre la réparation automobile consiste à apprendre comment on doit réparer une automobile (dans les trop oubliées "règles de l'art") et non comment on la répare effectivement, ce qui, parfois, est plus qu'édifiant quant au bien fondé du modèle de société que l'on tente de nous imposer.
On revient ici à cette idée, ancienne, de "travail bien fait" qui permet au mécanicien, la voiture livrée, de n'avoir pas à rougir de son intervention (voire les notions de fiabilité, par exemple).
A ce propos, je vous renvoi vers ma page qui traite la notion de service.
Alors, voyez-vous toujours le mécanicien réparateur d'automobile comme une "serre-boulons" ou comme un technicien moderne qui mérite le respect de ses pairs ?
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