L'aérodynamisme

aéro quoi ? - des marchands de vent (wing cars)
aérodynamique automobile (M. J. Graviche)
étude aérodynamique d'une maquette (Bernard Gironnet)
vulgarisation de l'aviation, travail remarquable paru en... 1905 (pdf)
quelques valeurs de Cx-SCx (Cd-Cw)

retour en page pédagogie - retour en page automobile - retour en page d'accueil


Puissance absorbée :
la puissance absorbée pour vaincre la résistance de l'air dépend:
de la forme du véhicule (coefficient de forme Cx),
de sa surface frontale (maître-couple S).
de sa vitesse (V),
de la ventilation de l'habitacle et du refroidissement du moteur.

Equation de Bernoulli : P + r V2/2 = constante (pression totale)
r V2/2 = pression dynamique

Puissance absorbée par le roulement Pr en ch : Pr = ( Pd . 9,81 . kr . Vmax ) / ( 3,6 . 735,5 ) = ( Pd . kr . Vmax ) / 270
où Pd poids en kg, Vmax vitesse maxi en km/h,
f coefficient d'adhérence (pour un bon asphalte, 0,013)

Puissance absorbée par l'air Pa en ch : Pa = ( 0,5 . mv . SCx . Vmaxˆ3) / ( 36 . 735,5 ) = ( mv . SCx . Vmaxˆ3) / 52960
où mv masse volumique air (sans unité) (1,202 g/dm3)
SCx coefficient aérodynamique en m2, Vmax vitesse maxi en km/h
SCx = S . Cx où S maître-couple en m2 (80 % de largeur x hauteur), Cx coefficient de forme (sans unité)

Pour rouler à 120 km/h :
CITROEN B21921 il faut 5ch pour un SCx de 1.437m2
CITROEN Traction1934 561,230
CITROEN DS1956480.817
CITROEN GSA X31980310.575

Avec un poids de 1 000 kg et un Cx de 0,40, un maître-couple S de 2 m2, soit un SCx de 0,800 m2, il faut 5 ch à 50 km/h, 15 ch à 190 km/h et 39 ch à 130 km/h.

CxSCx50 km/h90 km/h130 km/h
0,400,8005 ch15 ch39 ch
0,350,7004 ch14 ch35 ch
0,300,6004 ch13 ch31 ch
0,250,5004 ch12 ch27 ch
0,200,4004 ch10 ch23 ch
0,150,3003 ch9 ch19 ch



Influence des organes sur le Cx :
selon Goodyear (Salon de Genève, Jon Jablonski, 05.1982)
Spoiler -4,8 % ; becquet -3,6 %
Phares additionnels +2,4 % ; Antenne radio + 1,2 % ; Glace ouverte + 7 % ; Rétroviseur extérieur +3,1 %; Galerie de toit +13 %; Bavettes +7,1 %
Pneumatiques +0.5 % pour 10 mm de largeur (consommation +0,3 %)
Lors d'ssai de la soufflerie Saint-Cyr sur une Citroën GSA X3 (1981)
SCx 0.570 m2
Glaces avant ouvertes + 1.6 % (0.579)
Galerie de toit en place + 11.2 % (0.634)
Galerie de toit chargée + 60 % (0.915), vitesse maxi en baisse de 30 km/h, consommation augmentée de 20 %.
Sur Citroën Eco 2000
Cx 0,21 SCx 0,320 m2 (forme 65 %).
Continuité des surfaces et volume des passages de roue 15 %, sous véhicule 10 %
Rétroviseur et essuie-glace 7 % ; Circulation d'air interne 3 %.

Travaux Spéciaux :
Audi 200 Turbo Record (5.1988)
5 cylindres, 2226 cm3, 2 ACT, 25 soupapes, Rv 7.5, 650 ch à 6.200 tr/mn, 810 Nm à 5000 tr/mn
Cx 0.27, Cz Av 0, Cz Ar 0.05
Assiette légèrement plongeante, amélioration de l'étanchéïté de la face avant, soubassement caréné, extensions des bas de portes, spoiler avant, spoiler arrière très fin
Roues étroites BBS magnésium à fixation centrale, pneus Michelin spéciaux 215/55 VR 16 (18 cm de largeur de bande de roulement); 1.200 kg, 350 km/h.
1000 km à 326.403 km/h, 500 miles à 324.509 km/h (4.1988, Nardo I).

Peugeot Vera (4.1981)
Réduction de 25 % des consommation; CX 0.318, SCx 0.566.
Coffre surélevé et aileron arrière; Pare-brise et lunette arrière collés (Sans joint externe); Jets d'eau supprimés et extracteurs d'air latéraux modifiés ; Phares avec carénage étanche; Déflecteur avant sous pare-choc ; Etanchéïté de la face avant ; Buse en amont du radiateur avec calandre modifiée ; Carénage de plancher sous assise arrière ; Flasques de roue dans le plan du pneumatique (Roues en résine synthétique); Déflecteurs de vitres avant ; Déflecteurs latéraux de bas de caisse et carénage des passages de roues arrière ; Roues équipées de pneumatiques à faible résistance au roulement (-16 à 20 %); Déflecteur de pavillon entourant la lunette arrière et se prolongeant sur les ailes.
Gain de poids 188 kg (740 kg contre 928 kg); Tôles HLE, vitrages fins (3 mm au lieu de 4), portes en polyester (Gain 3.5 kg par porte), moteur dérivé Peugeot 104 (Gain 18 kg).
4.2 l à 90 km/h, 5.6 l à 120, 6.3 l en cycle urbain (305 6.5 9.0 9.2).

Détermination expérimentale du Cx

Données
masse m de l'auto pendant l'essai 907 kg
maître-couple S 1,858 m2
accélération de la pesanteur g 9,81 m/s
masse volumique de l'air a 1,225 kg/m3, pression atmosphérique Pa 0,848 bar, température ambiante T 20,8°C

1ère méthode
Résistance au roulement Cr 0,014 (Cr = m * (Vr1 - Vr2) / dt * 1 / (m * g))
Sur sol horizontal, sans vent, depuis une vitesse constante (15 km/h),
mesurer le temps (t) entre 10 (Vr1) et 5 km/h (Vr2).

Vr1 2,78 m/s (10 km/h), Vr2 1,39 m/s (5 km/h), dt 10 s
Résistance de l'air Cx 0,234 (Cx = (m * (Va1 - Va2) / dt - m * g * Cr) / (1/2 * a * Va2 * S))
Sur sol horizontal, sans vent, depuis une vitesse constante (130 km/h),
mesurer le temps (dt) entre 120 (Vo) et 115 km/h (V1).

Va1 16,67 m/s (60 km/h), Va2 15,28 m/s (55 km/h), dt 6,5 s
Va 15,97 m/s (vitesse moyenne (Va1 + Va2) / 2)

2ème méthode
Résistance au roulement Cr 0,014 (Cr = 28,2 * (ar * Va2 - aa * Vr2) / (10^3 * (Va2 - Vr2)))
Résistance de l'air Cx 0,234 (Cx = 6,3 * m * (a1 - a2) / (S * (va2 - vr2)))
Vr1 10 km/h, Vr2 5 km/h, dt 10 s
Va1 60 km/h, Va2 55 km/h, dt 6,5 s
Va 60 km/h (vitesse moyenne (Va1 + Va2) / 2), aa 0,77 km/h/s (accélération (Va1-Va2) / dt)
Vr 7,5 km/h (vitesse moyenne (Vr1 + Vr2) / 2), ar 0,50 km/h/s (accélération (Vr1-Vr2) / dt)

AERO QUOI ?
(Patrick Camus, Auto Hebdo, 10.3.1983)

Aérodynamique... "Qui a trait à l'étude de l'air en mouvement. Permet d'évaluer les forces nées de l'action de l'air sur les différentes parties de l'avion et d'en déduire les efforts de traction, de compression et de torsion correspondants. Elle donne en particulier les valeurs de portance, de déportance et de traînée."
Voilà, en deux phrases, la définition encyclopédique de cette science offerte par le Larrousse universel de 1948. Autant vous dire que l'automobile ne semble pas très concernée ! Pourtant, quelques années plus tard, un homme se battait pour faire admettre l'existence de ces forces au niveau de la voiture. Ce que certains pensaient être un art, un exercice de style pour carrossier, Charles Deutsch le considérait comme science exacte. Au même titre que l'avion, l'automobile se déplace dans l'air et ce déplacement entraîne des réactions complexes non seulement au niveau du fluide, l'air, mais également sur le solide, la voiture.
Forces longitudinales (la traînée) et verticales (portance et déportance) et latérales. Pour une voiture de compétition ces phénomènes sont capitaux puisqu'ils conditionnent tenue de route et performances tandis que la voiture de série en souffrira au niveau de la stabilité et, surtout, de la consommation d'essence. Le Gaspi ne vit que par trois facteurs : l'énergie consommée en accélération (aussitôt perdue dans les freinages), la résistance au roulement et la traînée. Le fameux Cx.
Or, s'il est relativement aisé de calculer la portance d'un avion en fonction de conditions données, il est quasi impossible de quantifier les forces soumises à une carrosserie à cause de la complexité de ses formes, des conditions de roulage jamais parfaites ni reproductibles à 100 % et de l'existence d'une masse d'air peu concernée par la voiture en mouvement mais néanmoins néfaste : celle qui glisse sous le plancher et que l'on appelle la couche limite. Dès lors, rien ne vaut la soufflerie et les essais routiers.
Aujourd'hui, c'est décidé. Grâce, ou à cause de Chapman et de ses "wing-cars", l'automobile a droit de cité dans le domaine aérodynamique et chacun, petit artisan vivant de la course, géant de la série ou scientifique aguerri, va essayer de résoudre au mieux le problème n° 1 : parvenir à ce que la combinaison des forces dégagées par l'air avec les réactions du sol favorise la stabilité de la voiture en mouvement.
   Quelques exemples de Cx.
Le profil A, le meilleur,
pose néanmoins quelques problèmes.
A commencer par positionner
un moteur, quatre roues, quatre sièges
et un coffre à bagages.
De plus, une fois
posée sur la route,
cette voiture-aile ne cherchera
qu'à décoller sur la
première bosse venue.
Seule solution : lui trouver du Cz.
Soit en lui ajoutant un aileron,
soit en lui greffant des jupes !
L'aileron lui redonnera un Cx
équivalent à celui du dessin D
tandis que les jupes provoqueront une
déportance pratiquement gratuite.
Le Cx en question
Coefficient de pénétration dans l'air, résistance à l'avancement, frein aérodynamique, tout est bon pour définir cette gangrène de l'automobile. Comme toutes les forces, engendrées par le glissement du véhicule dans l'air, le Cx est proportionnel au carré de la vitesse. Sur votre Renault 5 GTL, il vous fera consommer 1 à 2 litres de super, sur votre Formule 1, il nécessitera 85 à 90 % de la puissance de votre Cosworth. D'où le combat actuellement mené par certains et rares constructeurs de série, et l'apparition des voitures dites "à effet de sol".
Après avoir appliqué la formule magique qui vous permettra d'obtenir la valeur des forces engendrées par l'air sur votre voiture (voir en bas de page) observons quelques valeurs de Cx. Un poids lourd de 35 tonnes : 0.9 ; une BMW 525 : 0.43 ; une Audi 100 : 0.30 ; une Fl/82 : 0.624 et une Fl/68 : 0.45.
Quelles disparités ! Comment expliquer qu'une Mercedes ou une BMW alignent un Cx de 0.45/0.43 alors que l'Audi se contente de 0.30 ? Les porte-à-faux sont identiques, l'inclinaison du pare-brise, le coffre long, les dimensions.., tout y est relativement semblable malgré une réduction de Cx de 25 %
"Tout s'explique par un épurement de l'écoulement de l'air sur la partie supérieure de la carrosserie. Une voiture en déplacement est un obstacle que l'air cherche à contourner. Pour ce faire, il va accélérer autour de la carrosserie et cherchera aussitôt à se tranquilliser. Accélérer, il le fait très bien, se tranquilliser, il le fera d'autant plus mal qu'on lui proposera des trajectoires aberrantes : accidents de formes, joints, cornières, gouttières, poignées, grilles, angles vifs... Autant de choses qui créent des tourbillons et polluent l'écoulement de l'air sur l'arrière de la voiture. Sur l'Audi l00, la réduction du Cx ne relève que de détails : étanchéité des joints, glaces affleurantes, hauteur du coffre... Il y a quelques années, lorsque l'on parlait d'un Cx de 0.30 les spécialistes voyaient une voiture en forme de goutte d'eau et bien non ! L'Audi reste de formes classiques et un carénage inférieur bien étudié permettrait de descendre à 0.27."
Quant à la Formule 1, c'est carrément du délire : 0.624. Pneus larges, à l'extérieur de la carrosserie, suspensions en plein écoulement, cockpit ouvert, radiateurs volumineux (traînée de refroidissement importante), les causes sont nombreuses. Le point le plus capital est toutefois le Cz (forces verticales).
Ces charges aérodynamiques sont énormes et ont une contrepartie non négligeable sur le Cx en ce sens que les efforts verticaux créent une divergence des écoulements avant et arrière. Cette traînée induite s'ajoute alors à la traînée d'origine, causée par les formes anguleuses de la carrosserie.
Que faire pour limiter le Cx et augmenter le Cz ? Chapman l'a démontré de toute beauté. Aujourd'hui pour rien.

Formule pour calculer la force appliquée par l'air sur un véhicule en déplacement
Fx = 1/2 P S Cx V2
Fx : Force de traînée, en N
P : masse volumique de l'air mètres carrés soit 1.225 kg/m2
S : surface de référence (surface frontale) en m2
V : vitesse du véhicule
Cx : coefficient aérodynamique de traînée

Formule pour calculer les forces verticales
F2 = 1/2 P S C2 V2
A vos souhaits !


Qui est la S.E.R.A. ?
Fondée en 1962 par Charles Deutsch, la Société d'études et de réalisations automobiles (mais nous pourrions également l'appeler Société d'études et de recherches aérodynamiques) se compose aujourd'hui d'une équipe maîtresse de quatre personnes : Robert Choulet comme directeur technique, François Sylvain Crosnier pour l'aérodynamique, Gilles Schafer pour la dynamique et un nouveau venu, Jean-Louis Favero, chargé de la sécurité et des véhicules industriels;
Autour de cette équipe gravitent d'autres ingénieurs (ils sont dix au total) ainsi qu'un certain nombre de dessinateurs, de maquettistes, de secrétaires, etc. Vingt-trois personnes en tout.
Côté moyens d'études et de calculs, l'ordinateur règne en maître. Il suffit de savoir pianoter. Au cas où un problème s'avère particulièrement ardu, on branche l'ordinateur personnel sur le terminal éléphantesque de l'université de Paris Sud (la faculté d'Orsay)... Tout a une solution.
Sur le plan pratique, la S.E.R.A. se repose sur la soufflerie Eiffel, qu'elle "exploite" régulièrement. Très rétro, cette soufflante, mais super ! Du moins est-ce l'avis de Crosnier.
"C'est l'une des premières souffleries installées dans le monde et sa précision nous étonne encore aujourd'hui. Nous avons souvent l'occasion d'établir des recoupements de mesures entre Eiffel et la plupart des souffleries privées, beaucoup plus modernes, et aucune "panne" n'est relevée."
De ce tunnel venteux, à l'échelle 1/4 ou 1/5, sont sortis de nombreux projets et quelques réalisations à succès : Porsche Le Mans, Porsche CANAM, CD, Ligier JS6/7/9 et 11, Alfa proto 33, TT12, Alfa Fl 177, 179...
C'est certainement la voiture de M. Tout-le-Monde qui bénéficiera le plus des compétences de la S.E.R.A, mais là, la discrétion est de rigueur. Disons que deux constructeurs français font appel à ses services dans l'incognito tandis que quelques étrangers n'hésitent pas à officialiser la collaboration, comme Opel et Audi.
"La mort de l'effet de sol en Formule 1 est la preuve de l'existence du phénomène aérodynamique, avoue Sylvain Crosnier, c'est donc la reconnaissance d'une nouvelle science appliquée à l'automobile et de notre raison d'être. Lorsqu'en 1973 nous proposions notre collaboration à des constructeurs pour des carrosseries de 0.23 de Cx, ils nous répondaient savoir-faire ou n'en voyaient pas la nécessité. Puis, au fur et à mesure de nos travaux, ils sont venus vers nous, mais les deux ans de retard pris par certains ne se rattraperont pas. A titre d'exemple, on peut citer la colère et la surprise de BMW le jour où ils ont aperçu l'Audi 100. Et il y en aura, d'autres surprises, chez Audi ou chez d'autres !"
A telle enseigne que la plupart des constructeurs de série consacrent aujourd'hui une partie de leur budget aux études aérodynamiques extérieures et même à la création de leur propre soufflerie où, parfois, les ingénieurs de la S.E.R.A. sont appelés en consultation privée. C'est le cas de FIAT à Orbassano, de Volkswagen à Wolfsburg, de Mercedes à Stuttgart, de Volvo, de BMW, etc.
Se faire écouter d'un grand constructeur est inévitablement très difficile. Les gens écoutent, mais n'en pensent pas moins. Ils doutent qu'un bureau d'études extérieur puisse amener autre chose que ce qu'ils connaissent depuis des lustres. Il faut les convaincre tout en se faisant le moins gourmand possible.
"Nous ne sommes pas chers par rapport à l'entretien permanent d'un bureau d'études interne, par contre, nous représentons une charge extérieure, donc supplémentaire. Mais la mentalité change."
Durant ces toutes dernières années, la S.E.R.A. s'est ainsi vue confier d'importants programmes de la part de quelques géants européens soucieux non seulement d'abaisser le Cx de leurs voitures aux environs de 0.18/0.25, mais surtout d'obtenir une parfaite stabilité dans le comportement routier de ces voitures nouvelle génération.
Réalisés en pleine intelligence avec les départements Conception et Style de ces sociétés, ces projets sont déjà réalisés ou en cours d'achèvement et pourront entrer en production dés 1985.
Les deux-roues et poids lourds ne sont pas oubliés puisque S.E.R.A. est à l'origine du déflecteur de cabine le plus performant (moins 24 % en traînée et moins 10 % en consommation) et d'un projet de "38 tonnes" offrant une grande résistance au renversement réalisé en collaboration avec Renault Véhicules industriels.

HORIZON 2000
Pour nous, le projet le plus ambitieux de la S.E.R.A, réside dans un double programme "top secret". Le premier est une demande officielle du ministère des Transports pour un véhicule dont la consommation devra se situer aux environs de 3 litres aux 100 km.
Renault, Bertin et Matra sont de la partie.
Le second possède l'Aérospatiale, Valeo et le Moteur Moderne pour partenaires et le but essentiel réside dans l'obtention d'un Cx de 0,18 à 0.25 pour une voiture presque classique. Présenté très bientôt au ministère concerné, ce projet sera repris aussitôt par Renault et Peugeot.
Et tout cela grâce à un moulin à vent datant du début du siècle... Il y a de quoi être étonné.
"A moitié", répond le duo Crosnier-Schafer, "car le phénomène de pompage d'une Formule 1 et la stabilité d'une voiture de série possèdent des similitudes de comportement. L'outil de travail est donc le même. La Fl a servi de détonateur pour la série, elle a amplifié les phénomènes et nous sert de témoin de choc, L'effet de sol n'est pas l'apanage de la seule Fl mais de tout véhicule dès lors qu'il est en mouvement et l'exagération, la caricature de la Formule 1 nous permet de mieux comprendre les interactions touchant une carrosserie banale."

TECHNIQUE - DES MARCHANDS DE VENT
(Patrick Camus, Auto Hebdo, 10.3.1983)




Pour la rédaction de cet article, que soient remerciés l'équipe de la S.E.R.A., Lucien Romani, auteur d'une étude sur l'aérodynamique des véhicules de série, et Robert Choulet pour son étude "Contribution de l'effet de sol à la sécurité active des véhicules de compétition" ainsi que Bernard Boyer de Matra.

Accusé de tous les maux de la terre durant sa vie, l'effet de sol vient de mourir de sa belle mort. Rendons-lui un dernier hommage, ne serait-ce que pour ceux qui furent à son origine.

C'est bien connu, le plus mauvais des hommes devient un saint dès son dernier souffle ? Admiré à sa naissance, critiqué le jour où il s'est imposé, l'effet de sol, n'a pas survécu à la grogne des pilotes et au raz de marée de J.-M. Balestre le réformateur. A cause de lui, l'effet de sol pas Balestre, les temps au tour du circuit Paul Ricard ont chuté de 15 secondes en dix ans. A cause de lui, les F1 avaient gagné 28 km/h de moyenne sur un tour, alors que leur vitesse de pointe restait la même. La belle invention ! Adieu courbes rapides, virages et dérives... tout se passait pied au plancher en vertu d'une adhérence démoniaque. Par quel miracle en étions-nous arrivés là ?
Nous sommes dans la première moitié des années 70 et il faut bien reconnaître que les ingénieurs automobiles se trouvent confrontés à un problème épineux : est-ce la peine d'augmenter la puissance d'un moteur dans la mesure où la voiture ne permet pas de l'exploiter ? Accélérations, freinages, dérive... les pneus n'en peuvent plus de glisser et de transformer les chevaux vapeur en fumée bleutée. La question resta posée longtemps, et les monoplaces continuèrent à évoluer dans le cadre d'un compromis à cette époque favorable à la puissance que les pilotes avaient de plus en plus de mal à maîtriser. Jusqu'au jour où... L'on savait qu'une automobile, à fortiori de course, était soumise à des forces verticales et transversales plus ou moins élevées, mais dont la plus néfaste était la "portance", cette force perpendiculaire au sens de la vitesse, dont la première conséquence était de délester la voiture. La direction devient légère, la stabilité en ligne droite fait défaut et la plus petite bosse fait figure de dangereux tremplin. Que faire pour gagner en adhérence ? Augmenter les appuis. Pour cela, deux solutions : augmenter le poids de masse (châssis, moteur, lest...), ce qui est très gênant pour les performances, notamment en virage, ou augmenter le poids adhérent. Cette notion fut introduite par les ailerons, puis par les carrosseries en coin. Le résultat escompté était bien là, mais à quel prix ! Les 120 kg d'appui d'un aileron se payant par une traînée (le Cx) limitant la vitesse de pointe à une valeur ridiculement basse.
Influence de la déportance (Cz) sur les performances d'une F1, Le circuit de référence étant le Paul Ricard 5 800 mètres.

Cz- 0.5- 1.0- 1.5- 2.0- 3.0
Temps au tour1'41"91'38"51'36"31'33"71'30"5
Vitesse maxi306306306306306
Vitesse Signes212236266286291
Accélération latérale1.92.42.93.43.5
Fraction de temps où le
pilote est pied au plancher
56 %62 %66 %70 %73 %

Deux constatations : l'effet de sol ne pénalise pas le Cx puisque la vitesse maxi demeure identique
malgré la charge aérodynamique. Le gain sur un tour n'est donc dû qu'à la vitesse de passage en courbe.
 
Influence du poids sur les performances d'une F1.

Poids515 kg550 kg585 kg
Temps au tour1'37"51'38"51'39"4
Vitesse maxi306306306
Vitesse Signes243236232
Vitesse dans Pont939291
Consommation55 l55 l54 l
Influence de la puissance du moteur

Puissance500 ch550 ch
Temps au tour1'38"51'37"6
Vitesse maxi306316
Vitesse Signes236239
Vitesse dans Pont9292
Consommation55 l58 l
 
Influence du Cx sur les performances d'une F1.

Cx0.40.450.50.60.7
Temps au tour1'36"71'37"61'38"51'40"61'42"7
Vitesse maxi327316306289273
Vitesse Signes241238236233230
Vitesse dans Pont9292929292
Consommation53 l54 l55 l56 l57 l

Cx moyen d'une Fl 1982 : 0.624. La puissance d'un moteur turbo est donc un avantage énorme
puisque les Ferrari et Renault franchissent les maxi.
Quelque chose pour rien
Au château de Ketteringham Hall, repère discret, mais non dépourvu d'allure des bureaux d'études Lotus, quelques cerveaux effervescents tentaient de résoudre le problème. Chapman, Southgate et Wright (en consultant extérieur) planchent sur un cahier des charges bien particulier et intitulé "Quelque chose pour rien". Ce Peter n'en est pas à son coup d'essai. Déjà, en 68/70, il avait imaginé la March 701 avec des structures inférieures capables d'augmenter les appuis, mais l'expérience n'était guère concluante. Pourtant, cette idée de réservoirs latéraux carrossés en aile d'avion inversée était la bonne... Il n'y manquait que les jupes pour rendre le travail de cette aile totalement indépendant de l'air extérieur !
Dans un premier temps, l'on borda le ponton de crin, puis de jupes en lexan pour en arriver aux vraies jupes rigides doublées de patins en tungstène. Avec sa Lotus 79, Chapman venait de créer la première des wing-cars. Une carrosserie fine, un carénage moteur-boîte, des suspensions à basculeurs, la 79 allait dominer la saison de la tête et des épaules. Désormais, à appui identique, il est possible de régler les ailerons avec moins d'incidence, diminuant d'autant la traînée et augmentant d'autant la vitesse de pointe.
"Quelque chose pour rien" disait Chapman. "Rien pour beaucoup" dirions-nous. De quelle façon Wright était-il venu à assimiler cette notion de déportance "gratuite" ? En observant une aile d'avion. Dès 200 km/h, une aile d'avion subit deux phénomènes aérodynamiques majeurs : sur sa face supérieure (l'extrados), l'air accélère et créé une dépression ; sur sa face inférieure (l'intrados), l'air ralentit et créé une surpression. Or, la force engendrée par la dépression est pratiquement double de celle engendrée par la surpression. Bilan : l'aile d'avion est aspirée à 75 % par la surface supérieure de ses ailes et portée à 25 % par la surface inférieure. Retournons cette aile. Les forces demeurent identiques mais s'inversent : l'extrados va aspirer l'avion vers le sol et plus l'on rapproche ce profil du sol plus le flux d'air inférieur accélère et plus la dépression s'accroît. Coupons donc une tranche d'aile et collons-la de part et d'autre d'un châssis. Oui mais voilà... 50 cm d'aile d'avion, ça ne sert strictement à rien sinon à créer d'énormes turbulences. Une aile d'avion n'a d'efficacité que grâce à sa grande longueur qui parvient à maintenir bien séparés la dépression du dessus et la pression du dessous. Au-delà de cette partie efficace c'est l'anarchie, le tourbillon marginal que l'on peut observer quelques fois lors du décollage d'un avion. Or, greffer un moignon d'aile inversée revient à ne conserver que la partie inefficace ! A moins de porter ces moignons d'aile à 4 mètres, il fallait donc trouver un système d'étanchéité et Chapman a parfaitement compris que sa tranche d'aile d'avion avait tout simplement besoin de deux plaques pour empêcher les dépressions inférieures d'être comblées par les surpressions supérieures. Le cloisonnement par les jupes était né.
Dès lors, le phénomène allait être perfectionné, peaufiné et les dépressions capables d'entraîner un effet de succion représentant 2 500 kg à 300 km/h. Le Cz passant de - 0.5 à - 1.7 à seulement 180 km/h. Plus qu'il n'en faut pour qu'un avion ne décolle !
"Et ceci compte tenu des variations d'assiette", rectifie Sylvain Crosnier. "Roulis, cabrage, plongée... entraînaient des cassures dans l'étanchéité et les valeurs de crêtes obtenues en conditions idéales pouvaient atteindre 3 000 kg."
Soit, avec la voiture, l'essence et le pilote, une masse totale de 4 000 kg ! De quoi rêver, mais aussi de s'effrayer.
"Au début", poursuit Gilles Schaffer, "nous avons assisté à ce que j'appellerai des gags : direction qui se bloquait, couples de coques qui se criquaient, pontons qui s'affaissaient... Je me souviens d'un constructeur qui m'avait traité de plaisantin lorsque je lui ai annoncé 600 kg d'appui par profil de ponton. Cette année, nous en étions à 1 250 ! Au fil des années, ils ont, malgré tout, compris, et prenaient conscience des véritables problèmes."
Ces problèmes, c'étaient surtout les accélérations transversales subies par les pilotes. Des forces proches de 3 G. C'était des contraintes mécaniques multipliées par cinq sur des éléments de suspension dont le matériaux était resté le même qu'à l'époque des 600 kg d'appui. C'était également de brusques changements d'adhérence lorsque les conditions de roulage n'étaient pas excellentes. Un peu trop de roulis et la jupe intérieure se lève, perdant son rôle d'étanchéité. Dans ce cas, le Cz diminue de 5 à 10 % et la dérive prend des proportions inquiétantes. Qu'importe ! Course après course, séance de soufflerie après séance de soufflerie, les ingénieurs réussissaient à parfaire leur science à tel point que les bonnes F1 de 1982 avaient pratiquement perdu 70 % de leurs appuis extérieurs pour n'obtenir de tenue de route que par ce puissant effet de sol. Au bout du compte, la wing-car devenait quasi parfaite, le seul point noir restant les mouvements de caisse parasites. Jusqu'au jour où les forces verticales devinrent si importantes que les ingénieurs butèrent sur une nouvelle difficulté : le pompage. Soit du fait d'un léger accident de terrain, soit du fait de la croissance de la charge aérodynamique, les suspensions s'écrasent, fléchissent, entraînent les profils à fleur de bitume et le beau phénomène de succion se transforme en vilain tourbillon l'espace de quelques dixièmes de seconde. Les filets d'air inférieurs décrochent, soulagent la voiture de leurs contraintes et la caisse remonte de quelques centimètres. De là, la déportance reprend, les suspensions s'écrasent, ramenant l'aile trop près du bitume, d'où nouveau décrochage... La piste prenait des allures de tôle ondulée plus qu'inconfortable. Que faire ? Supprimer toute possibilité de variation de hauteur de caisse ; c'est l'apparition des suspensions en béton et des colonnes vertébrales en coton. Une solution techniquement peu élégante dans la mesure où elle engendre d'importantes fluctuations d'adhérence sur sol irrégulier. Pour sa part, Renault détenait peut-être le remède miracle en étudiant un correcteur d'assiette hydraulique fixant la garde au sol à environ 8 cm.
L'origine de la déportance, donc de l'effet de sol, et
son fonctionnement, sont analogues à ceux d'une manche d'aile d'avion placée à l'envers.
Extrados = dépression = déportance ; lntrados = surpression = portance.
La dépression crée une force double de celle provoquée par la surpression. Un avion est donc aspiré dans l'air et non porté.



Ceci est valable pour les pontons mais également pour les ailerons avant et arrière qui ne sont pas poussés vers le sol mais aspirés.



Rapprocher l'aile inversée du sol augmente l'accélération du flux d'air sur l'extrados et accroît la dépression.

La vitesse atteinte par l'air ainsi prisonnier peut dépasser les 500 km/h.
Sur ce schéma, l'air est canalisé par les jupes.



Mais attention ! Si l'aile est trop près do sol (suspensions trop souples s'écrasant sous la charge aérodynamique), le flux d'air
décroche et entre en turbulences.
L'effet de sol disparaît. La caisse remonte, redescend sous la charge et le phénomène recommence. C'est le pompage.



Pourquoi les jupes ? Parce que la surpression de l'intrados a la facheuse manie de vouloir combler la dépression de l'extrados.
Sur une aile d'avion le phénomène est limité grâce à la grande longueur du profil mais existe sur les bords extérieurs.
Une tranche d'aile de 45 cm fonctionnant comme ce bord, il a fallu séparer les trajectoires des deux flux.
Ce que Chapman a réalisé avec les jupes. Sans elles, c'est l'anarchie et seulement 35 % d'effet de sol.
Le même système est appliqué sur l'aileron arrière dont les "tôles" latérales sont appelées fences.



Un fond plat à proximité du sol et isolé par des jupes est également déporteur si on le dispose en position "piqueuse" vers l'avant.
Sans jupe, le phénomène est amoindri dans une grande proportion.



Et demain ?
Evidemment, tout ne va jamais pour le mieux, même dans le meilleur des mondes et l'effet de sol fut longtemps la bête noire de certains constructeurs. Si quelques-uns avaient compris la nécessité d'études en soufflerie très approfondies, d'autres, sans moyens, jouaient de la tôle et du rivet pop. Or, pour bien fonctionner, ce phénomène ne souffrait aucune improvisation. Suspension avant et arrière très dégagée, aile sans rivet, excellente étanchéité des pontons, freins dans les roues, échappements spéciaux, carénage moteur-boîte intégral, etc. la perfection.
L'idée première de Chapman, puis plus tard de quelques-uns de ses adversaires, était la réalisation d'une monoplace totalement démunie d'appendices extérieurs, moustaches, ailerons et l'apparition de la Brabham 48, de la Lotus 80, puis de l'Arrows A3 laissait entrevoir une telle issue. Pourtant, personne n'y parviendra, et encore moins les auteurs de la JS19. Ceci pour plusieurs raisons. La première réside dans le fait que l'aileron arrière, aussi peu cambré soit-il, joue non seulement un rôle "d'équilibreur" aérodynamique, mais également celui d'un amortisseur aérien que les pontons déporteurs ne proposent pas. La seconde raison se situe dans un accord parfait et naturel entre flux supérieur et inférieur. En remplaçant l'aileron classique par un bavolet intégré le risque était grand de voir disparaître cet accord obtenu avec difficulté. Une troisième raison nous est apportée par la situation précise de la charge verticale provoquée par l'effet de sol : entre le premier tiers avant et le milieu de l'empattement. Il était donc obligatoire d'apporter une correction de charge et une modification de la répartition des masses afin de limiter le survirage. Bien sûr, l'on chercha à modifier la position du centre de pression en reculant les pontons, mais le flux d'air butait sur d'inébranlables obstacles tels que les arbres de transmission et les triangles arrière inférieurs. Pouvait-on alors envisager une amélioration de l'effet de sol ? Pourquoi pas. L'industrie aéronautique existe depuis soixante ans, et les équipes de recherches se complètent de jour en jour. Le peaufinage du matériel existant était largement envisageable, mais aussi de nouvelles idées. C'est ainsi que des chercheurs se sont aperçus qu'un avion pouvait décoller sur une plus courte distance dès lors que les réacteurs crachaient sur les ailes.
"Tout progrès est question de temps, de mise au point et d'argent", précise Crosnier, "et la S.E.R.A. possédait bien quelques petites recettes dans ses cartons."
A commencer par les "soufflages" dans les profils de ponton : la surface de l'aile interne est coupée pour permettre un passage d'air complémentaire. Ce que l'on voit sur la plupart des avions modernes et sur quelques ailerons arrière.
"En voyant beaucoup plus loin," poursuit l'ingénieur Schaeffer, "et compte tenu d'une certaine stabilité des règlements techniques, on pouvait réaménager totalement la Formule 1 en fonction de son aérodynamique."
En effet, étant donné le site avancé des appuis verticaux, pourquoi ne pas imaginer le profil déporteur ailleurs qu'entre les roues ?
Puisque les lois physiques sont immuables, modifions ce qu'il y a autour, c'est-à-dire la voiture tout entière. Déplaçons le centre de gravité, abandonnons le moteur central arrière pour le moteur central, ou avant, pour exploiter une déportance phénoménale et obtenir une répartition des masses de 50/50 au lieu de 35/65 telle qu'elle était. Une idée comme une autre, comme il en vient tous les quinze ans... mais les contraintes de la Fl moderne interdisent désormais tout caprice. Voyez la 6 roues Williams, le double châssis de Chapman.
"La Fl est un sport de risques pour les pilotes, mais aussi pour les ingénieurs. Aujourd'hui l'on pense d'abord aux résultats, donc aux solutions techniques éprouvées".
Pas sûr. Avec la suppression des jupes, les ingénieurs se retrouvent aujourd'hui dans un cul de sac dont ils vont devoir sortir d'ici six mois. Si, dans un premier temps, le championnat du monde se courra avec matériel recyclé, il n'y a plus aucune raison de conserver les bases techniques actuelles : suspensions dures, carrosseries carrées, coques étroites... Le Cz est divisé par trois, le Cx va regrimper vers des sommets vertigineux, la vie recommence sous une autre forme. Sera-t-il judicieux de conserver des solutions envisagées sous le règne de l'effet de sol ?
Non, et les domaines devenus mineurs par la force des choses sont devenus majeurs.
Tout ce que l'on a sacrifié pour les jupes sera reconsidéré, jusqu'aux moteurs en V, atmosphériques ou turbo, conçus pour le seul dieu Eole. Non, le turbo n'est pas condamné à mort dans la mesure où son surplus de cavalerie servira toujours à tirer un aileron plus cambré que celui d'un Cosworth, mais le rapport des forces a bigrement changé. Quelques bons vieux 12 cylindres à plat doivent y songer... En fait, il faudra rechercher une nouvelle voie et celui qui voudra à tout prix obtenir autant d'appui avec un fond plat qu'avec les jupes le paiera par un Cx catastrophique. Le résultat de l'opération sera donc nul, autant se dire que les pontons sans jupe ne servent que de coffres à échangeurs ou à injection électronique.
"La seule chose qu'il est nécessaire de garder à l'esprit est la possibilité de récupérer de la déportance dés lors que le plancher d'une F1 est en défilement par rapport au sol. Il faut connaître ce phénomène, mais pas obligatoirement l'exploiter. En outre, ce nouveau règlement nous paraît relativement bien écrit, c'est-à-dire difficilement contournable. Mais vous savez, c'est un règlement... Trois personnes ont mis trois mois à le concevoir, cinquante ingénieurs mettront cinq ans à le démolir ! Les interprétations possibles sont limités au maximum : profiter de l'arrondi de 5 cm de rayon pour caréner l'arrière du fond plat en forme d'aile inversée ou disposer le fond plat en position "piqueuse" par rapport au sol. C'est peu et en tout cas bien insuffisant pour ceux qui pensent retrouver les appuis d'antan.
Et pourtant, les puissants moteurs suralimentés vont bien devoir en retrouver de la déportance, sinon à quoi bon posséder 6 ou 700 ch si on ne peut les transmettre à la piste. Rien que pour cela, le recours aux gros ailerons, ou à une carrosserie en angle très ouvert sera obligatoire. Techniquement nous sommes face à un retour en arrière magistral, mais aussi à un regroupement inespéré de toutes les voitures constituant le plateau d'un grand prix.
Lors de ses récents essais privés, Lotus nous a permis de voir un fond plat incliné vers l'avant et il est vrai que cette solution autorise une légère déportance, mais à une condition : que le plancher soit suffisamment large pour empêcher le flux inférieur de se transformer en gigantesque turbulence de "bout d'aile". Les jupes ne sont plus là pour l'étanchéité ! Qui dit plancher large dit ponton.., mais à quoi bon les conserver, à moins d'être turbo ? Les monoplaces à moteur atmosphérique vont donc changer d'esthétique et prendre des allures de guêpes, un peu à la mode 75/76/77. Il faut remarquer qu'à cette époque l'aérodynamique n'était pas le souci majeur des ingénieurs, les lignes 83/84 seront donc plus fines, plus efficaces. Dans une certaine mesure contraints de conserver leurs pontons "because manque de place", les turbos auront la possibilité d'exploiter le fond plat "piqueur" et obtiendront une déportance supérieure à celle d'une voiture à taille fine. Deux voies peuvent se dessiner. Soit l'intégralité du plancher est plane et un correcteur d'assiette hydraulique (merci Renault) se chargera de maintenir une position piqueuse en toute occasion, soit l'intégralité du fond plat, y compris l'ensemble moteur-boîte, est inclinée vers l'avant. Dans ce cas, les pilotes peuvent se réjouir de la suppression des jupes puisque la position piqueuse ne pourra être maintenue en permanence que grâce à... l'absence de suspension ? Vous le voyez, rien n'est simple, ni parfait.
Pour Michel Têtu, l'ingénieur de développement châssis de la régie, le correcteur hydraulique sera de toute évidence une bonne chose.
"Cabrage à l'accélération, plongée en freinage, changement d'adhérence en courbe, le manque d'effet de sol nous provoque un déséquilibre complet qui affecte non seulement la motricité, mais aussi la stabilité du train avant. La correction hydraulique fixant la hauteur de caisse de façon permanente limitera ces transferts de masse très sensiblement."
Les ingénieurs n'ont pourtant guère à parier sur un amortissement nul, pertes d'adhérence, mauvais contrôle de retombée de la voiture sur les inégalités de la piste, etc. tout pour une motricité déplorable. L'effet de sol n'étant plus là pour écraser les pneus au sol, il ne reste plus qu'à assouplir les débattements de suspension, Des ailerons pour plaquer la voiture ? Certes, mais le "chasse-neige" de De Angelis ne dépassait pas les 260 km/h sur la ligne droite du Mistral ! Alors, peu de Cz pour peu de Cx ou beaucoup de Cz pour beaucoup de Cx ? Non non, ne cherchez pas. La Fl 83 marque le début d'une nouvelle cuisine, aux ingénieurs de déterminer les meilleurs ingrédients. Les études en soufflerie demeureront-elles rentables ? Certainement pas et le modestes constructeurs ne se sentiront plus obligés d'y sacrifier les trois sous qu'il leur restait en poche.
"Les grosses améliorations de performances ne viendront plus de nous", conclut l'équipe de la S.E.R.A. "Pour nous, la suppression des jupes revient à mettre au placard des années d'études et d'expérimentation. C'est désagréable et stimulant à la fois."
Mais n'est-ce donc pas l'officialisation de leurs recherches, la reconnaissance de leur science fantastique et de leurs talents ?
Deux variantes légales pour récupérer une partie de la déportance disparue et diminuer le Cx causé par un gros aileron arrière.
Dans les deux cas, l'effet de venturi fonctionnera d'autant mieux qoe le plancher sera large. Faute d'étanchéité latérale.
A utiliser pour les monoplaces contraintes de conserver les pontons actuels, donc les turbos.



a) Fond plat avec caisse en position "piqueuse".



b) Fond plat jusqu'à l'aplomb avant des roues arrière.
Ensemble moteur-boîte relevé vers l'arrière avec carénage inférieur en aile inversée.

Sor ce schéma, nous avons matérialisé les filets d'air.
Le flux supérieur lèche la carrosserie, est perturbé par les ailerons >et constitue, à l'arrière, la traînée.
Le flux inférieur, prisonnier du ponton, subit une accélération (+ de 500 km/h), puis une détente.



1. Aile inversée.
2. Jupes et panneaux d'étanchéité pour éviter aux forces positives de contrarier les forces négatives.
3. Les forces positives, la portance, sur ce schéma égale au tiers des forces négatives, seront majoritaires sur une F1 à fond plat.
D'où la nécessité d'ailerons très cambrés. La traînée (Cx) en sera d'autant augmentée.
4. Zone de turbulences provoquée par les formes de la carrosserie, la portance des ailerons et, dans une moindre mesure,
la traînée induite de l'effet de sol. A 300 km/h, cette résistance à l'avancement absorbe 510 ch.


La jupe invisible Autohebdo !
L'expérience l'a démontré : un fond plat "piqueur" crée une déportance dès l'instant où l'étanchéité latérale est retrouvée. Les jupes sont interdites, mais le fond plat existe. Pourquoi ne pas imaginer des jupes invisibles ? Vous connaissez sans doute un grand magasin où, en plein hiver, et malgré l'absence de porte, l'air chaud intérieur n'est aucunement contrarié par l'air glacial extérieur. Un miracle ? Non, un rideau d'air, donc invisible, est soufflé de haut en bas, servant de cloison thermique hyper efficace.
Imaginons dès lors une lame d'air issue d'une fente courant le long des pontons. Une prise d'air dynamique ou une mini-turbine pourrait suffir à alimenter cette tricherie pour le moins difficile à matérialiser !
Faute de motricité, les 650 ch d'un moteur turbo n'ont plus guère d'utilité qu'en ligne droite, alors, pourquoi ne pas en consacrer 50 à une soufflante ?
10 % des gains F.O.C.A, à son auteur...

Aérodynamique Automobile
(M. J. Graviche, SIA)

L'Automobile est souvent traitée en parent pauvre par les aérodynamiciens. Il nous a donc semblé utile de rassembler diverses études présentant un caractère suffisamment général pour constituer un aide-mémoire d'aérodynamique automobile. Cette brochure groupe des chapitres dont les destinataires sont :
- soit les aérodynamiciens pour lesquels elle fait le point de notre pratique expérimentale,
- soit les mécaniciens auxquels elle précise ce qu'ils peuvent attendre des mesures aérodynamiques,
- soit les stylistes auxquels sont présentées des études d'influence de modification de forme sur la traînée.
Ce travail a été entrepris à la Société des Automobiles Peugeot et il a bénéficié de nombreux échanges de vue avec la Régie Nationale des Usines Renault, particulièrement avec M. Jousserandot, auquel nous adressons nos plus vifs remerciements.

Première partie - Aérodynamique proprement dite
Introduction : Description d'une étude de maquette en six composantes

I - Description théorique d'une balance

Examinons le cas d'une soufflerie équipée d'une balance à six composantes.
L'intersection des deux diagonales du quadrilatère défini, par les points de contact des quatre roues de la maquette est sensiblement située sur l'axe vertical de la balance. De plus la balance tourne avec la maquette au cours des essais automobiles an dérapage pur, si bien que les mesures sont directement liées au véhicule et sont alors exprimées en ce que les aérodynamiciens appellent système de Lilienthal, par opposition au système de coordonnées d'Eiffel liées au vent.

Position des jauges de mesure

Les mesures sont effectuées au moyen de six jauges (J1, J2, J3, ... J6) conformément au schéma ci-joint. Cette figure indique leur disposition, qui. est à compléter par les remarques suivantes :
-A, B, C et D sont alignés
OB = OC
OE= OF
Il faut noter que le plan horizontal, auquel appartiennent les quatre points de repos des roues de la maquette sur la balance, coupe l'axe vertical de celle-ci en un point O' caractérisé par :
00' = h
(Les utilisateurs expriment ceci en disant que le plan de mesure est situé à une distance h au-dessous du sol).

L'incidence i caractérise l'inclinaison de la caisse de la maquette par rapport à l'horizontale. Précisons le cas où elle n'est pas nulle : la construction de la balance a pour conséquence que les mesures sont alors liées aux roues qui restent fixes et dont les axes définissent le plan origine des incidences de la caisse. Mais comme l'incidence ne dépasse guère 2° en valeur absolue, les résultats peuvent être considérés comme obtenus au cours de mesures liées à la caisse, comme dans le cas du dérapage pur.

II - Expression des mesures effectuées

Les six composantes sont exprimées mécanographiquement sous forme de trois coefficients de force (Cx, Cy et Cz) et de trois coefficients de moment (Cl, Cm et Cn).

a) En multipliant Cx, Cy et Cz par la pression dynamique de l'air r V2/2 et par le maître-couple S de la maquette, nous obtenons respectivement les efforts de :
traînée Fx,
dérive Fy
et portance Fz (ou sustentation),
dont le signe algébrique est lié à l'orientation par rapport au trièdre de référence.
V2
nous avons par exemple : Fx = r S ------ Cx
2

b) Pour exprimer des moments, les coefficients Cl, Cm et Cn sont à multiplier par la pression dynamique de l'air et par le volume de référence, qui est lui-même le produit du maître-couple S par l'empattement E.
Nous obtenons alors respectivement les moments de roulis L de tangage N et de lacet N donnés par des formules du type
V2
L = r S E ------ Cl ...
2

Notons au passage que l'utilisation du volume de référence S.E n'est pas générale et la littérature technique américaine adopte parfois le produit maître-couple x voie du véhicule dans le cas des moments de roulis.
Les moments sont rapportés au plan de mesure des forces et L, M et N sont donc des moments respectifs autour de Ox, Oy et Oz.
De plus nous pouvons convenir que les moments sont comptés positivement lorsqu'ils accompagnent un virage de la maquette vers sa droite (cas de L et de N) ou qu'ils la font cabrer (cas de N).
Enfin, l'angle de dérapage j est compté positivement lorsque la maquette reçoit le vent sur sa gauche.

III - Utilisation des résultats

Les effets du vent sur la maquette sont réduits à trois forces (traînée, dérive et portance). Les moments de roulis, tangage et lacet permettent de déterminer leurs axes porteurs et l'intersection de ceux-ci avec des plans de référence définit les centres de poussée respectifs.

1/ - L'effort de traînée permet d'étudier la vitesse maximum du véhicule à partir des données qui concernent son moteur et sa transmission.

2/ - Mais la soufflerie permet également d'étudier le comportement du véhicule sous l'effet d'un vent latéral. Cette étude doit être faite en s'attachant à la répartition des efforts entre l'avant et l'arrière : plus précisément, nous cherchons à connaître ce qui se passe au niveau du contact des pneus avec le sol, mais il reste toujours possible de calculer les réactions à un autre niveau (au niveau des essieux par exemple).

a) Effectuons le calcul littéral dans le cas du tangage autour de l'axe O' y', en utilisant comme plan de projection le plan x O z.


La balance est construite pour équilibrer Fx porté par Ox et Fz porté par une droite verticale distante de xM de l'axe Oz.
Equilibrons les moments autour de O' y',
- l'un est dû à la force Fz et est donc proportionnel à xM .. Oz
- l'autre résulte du moment de tangage mesuré autour de Oy et transporté autour de O'y' par application de la formule de transport des moments autour de deux axes parallèles : ce transport fait intervenir la force Fx, dont le moment par rapport à Oy est nul.

Avec le même coefficient de proportionnalité r S V2/2 que précédemment et en désignant par E l'empattement et par Cm, Oy et Cm, O' y' les coefficients de moment de tangage respectivement autour de Oy et O'y, nous pouvons écrire :
xM . Fz = MO'y' = MOy - Fx . h sous la forme (1) xM . Cz = CmO'y' . E = CmOy . E - Cx . h
formule où Cx, Cz et Cm, Oy (=Cm) sont trois coefficients résultant directement des mesures.

Nous pouvons alors décomposer Fz an Fz AV et Fz AR et déterminer ainsi deux termes Cz AV et Cz AR, rapportés au niveau du contact pneus-sol.
Pour cela nous utilisons les deux équations complémentaires suivantes
(2) Cz AV + Cz AR = Cz
(3)Cz AR . E = Cz (E/2 - xM)
Cette dernière exprimant l'égalité des moments par rapport à l'essieu avant.
AO' = O' ; B = E/2
CO' = xM


Nous en déduisons
1xM1xM
Cz AV = Cz( ------ + ------ )et Cz AR = Cz ( ------ - ------ )
2E2E

ou, compte tenu de la relation (1)
1h1h
Cz AV = ------ Cz + Cm - ------ Cx et Cz AR = ------ Cz - Cm + ------ Cx
2E2E

Notons au passage que le transfert du moment de tangage aurait été différent si nous avions étudié les réactions au niveau des essieux et que la hauteur h devrait alors être remplacée dans la formule (1) par h + R en désignant par R le rayon du pneu sous charge ramené à l'échelle maquette.

b) Le calcul littéral est similaire dans le cas du lacet, avec cependant une simplification, car il n'y a aucun transfert de moment à effectuer.
La répartition avant-arrière est alors
11
Cy AV = ------ + Cn et Cy AR = ------ - Cn
22

et le centre de poussée est caractérisé par son abscisse xN définie par
xN . Cy = Cn . E

c) Nous avons enfin à faire un calcul similaire pour l'étude du roulis.
Le coefficient de moment Cl correspond à une mesure effectuée dans le plan xOy, si bien que le coefficient de moment est à transporter au niveau du sol (plan x'O'y') suivant la méthode déjà utilisée pour l'établissement des second et troisième membres de la formule (1) de l'étude tangage.
Nous avons ainsi
Cl O' x' . E = Cl Ox . E - Cy . h

Nous avons cependant estimé trop théorique de tirer des valeurs de Cl la répartition des efforts entre droite et gauche du véhicule.

3/ - Il existe aussi une méthode permettant de présenter clairement l'évolution des centres de poussée en fonction du dérapage : c'est la méthode des courbes métacentriques, dont le principe est le suivant :
Pour un dérapage angulaire j donné, la maquette est soumise à des forces horizontales, qui sont proportionnelles aux Cx et Cy correspondants (Cx j et Cy j).
Leur résultante a donc une valeur proportionnelle à
CH j = ( (Cx j)2 + (Cy j)2 )0,5
Cette résultante est une force horizontale, comme le rappelle son indice H, et elle est portée par une droite dont la distance à l'axe Oz est d tel que le moment de CH j soit équilibré par le moment de lacet Nj mesuré pour le même angle j.
Nous avons donc
CH j . d = Cn j . E

Par ailleurs la droite qui porte la résultante fait avec l'axe Ox un angle a défini par
Cy j
tg a j = ------ 
Cx j

La connaissance de a et de d permet de tracer la projection sur le plan horizontal des diverses droites portant les résultantes aérodynamiques horizontales pour divers dérapages.
L'enveloppe de ces projections est la courbe métacentrique, cependant que le point d'intersection de chaque droite avec l'axe Ox définit le centre de poussée pour la valeur du dérapage correspondante.


Courbe métacentique (projection horizontale)

Les courbes métacentriques ont l'inconvénient d'être difficiles à tracer à partir des résultats expérimentaux, si bien qu'elles sont peu utilisées en Automobile.
Cette méthode peut également s'appliquer en projection sur le plan vertical de symétrie, mais l'angle à utiliser comme paramètre n'est alors plus le dérapage mais l'incidence.

4/ - Il existe également une méthode, tirée de la technique aéronautique : c'est le tracé des polaires Eiffel, que nous allons décrire dans les cas respectifs de l'incidence et du dérapage.


Polaire Eiffel en incidence

Le mode opératoire a pour conséquence que les mesures incidence ne sont pas liées à la maquette, mais au vent.
Ainsi que nous l'avons indiqué précédemment, ce point ne présente qu'un intérêt de rigueur scientifique pour les incidences dues aux seuls débattements de suspension et donc limitées pratiquement à des valeurs absolues de l'ordre de 2°.
Mais il est intéressant d'étudier l'aérodynamisme au-delà des incidences de débattement.
Le Cx et le Cz, donnés par la balance pour chaque incidence i, appartiennent au système de coordonnées d'Eiffel, liées au vent. La polaire d'Eiffel est la courbe de variation du Cz en fonction du Cx, qui est généralement graduée en i ; elle a l'allure parabolique représentée ci-dessous.
Cette courbe montre que le C est minimum pour une incidence aérodynamique nulle et correspondant généralement à une position en piqué.
La différence entre le Cx effectif, pour une incidence quelconque, et le Cx minimum est due au Cz et constitue le coefficient de traînée induite par la portance Cxj.


Polaire Eiffel en dérapage

Le tracé de la polaire Eiffel en dérapage suppose un passage du système de Lilienthal au système Eiffel : le Cx et le Cy donnés par la balance Bréguet doivent être remplacés par un CX et un CY rapportés à des axes rectangulaires ayant la rnême origine, mais décalés angulairement de l'angle de dérapage j dans leur plan.
L'application des formules de changement d'axes de coordonnées nous donne
CX = Cx cos j + Cy sin j
CY = - Cx sin j + Cy cos j

Nous pouvons alors tracer la courbe de variation de CY en fonction de CX en la graduant en j.
Elle est caractérisée par l'existence d'un maximum en CY et surtout par l'angle de dérapage correspondant, appelé "angle de décrochement".


P.S. - Nous indiquons ci-dessous un programme qui peut être considéré comme le programme type d'un essai en soufflerie.

Mesure des coefficients d'effort Cx, Cy et Cz et des coefficients de moment Cl, Cm, Cn à vitesse sensiblement constante et voisine du maximum possible dans la soufflerie (assiette de la voiture en charge nominale).
- en dérapage i(angle d'incidence) = O
j(angle de dérapage) variant de - 6 à + 3° degrés ou, si possible,
jusqu'à l'angle de dérapage provoquant le "décrochement".
- en incidencej= 0
ivariant d'abord de l'une à l'autre des valeurs extrêmes de l'incidence déterminées
d'après les caractéristiques de la suspension puis au-delà de l'une d'entre elles
jusqu'à détermination de l'incidence aérodynamique nulle.
Mesure du Cx à diverses vitesses et dans les configurations voitures lège et en charge.
Maquettes


I- Définition

La maquette de soufflerie doit correspondre à une représentation technique d'un projet de voiture ou d'un véhicule existant, ce qui oblige à un travail d'analyse portant sur les détails aérodynamiques et sur les conditions de mesure. L'échelle adoptée dépend du type de la soufflerie utilisée ainsi que des techniques de réalisation de la maquette.
Une maquette représente la réalité à différents degrés qui sont précisés par les définitions de configurations suivantes :
1/ - Maquette - forme pure
Une maquette de forme pure ne présente aucun détail de surface. Le plancher lisse se raccorde à la forme définie par les stylistes.
2/ - Maquette conforme - plancher lisse
En figurant sur une maquette lisse tous les détails de surface (roues, passages de roues, enfoncement des plans de glaces, joints des baies, feux, pare-chocs sans étanchéité) on crée une maquette conforme. Mais le dessous de la voiture est figuré par un plancher lisse, raccordé à la maquette.
3/ - Maquette route
La maquette route est une maquette conforme qui possède une circulation interne respectant la circulation d'air par le radiateur et qui comporte une reproduction de la mécanique du véhicule.


Justfication de ces configurations
La maquette de forme pure et la maquette conforme - plancher lisse, représentent les types les plus courants des maquettes fabriquées par l'atelier de style.
La maquette route autorise l'étude aérodynamique précise en six composantes d'un véhicule. Elle implique pratiquement l'existence réelle de ce véhicule
L'assiette normale "zéro" d'une maquette correspond à l'assiette en charge nominale du véhicule figurée sur les plans de débattement de suspension ou adoptée par les stylistes. L'ancrage des roues sur la maquette doit être fourni par un dispositif autorisant une plage de variations d'incidence allant de + 10 degrés (cabré) à - 10 degrés (piqué).

II - Réalisation

Pour fabriquer les maquettes on utilise divers matériaux tels que terre, plâtre, bois ou matière plastique selon des méthodes de modelage ou de moulage.
La maquette en terre occupe une place privilégiée. Elle représente l'étude de forme par excellence. Elle permet une définition rapide respectant la géométrie et accélérant l'étude aérodynamique.
Mais les essais aérodynamiques an soufflerie nous ont amené à rechercher des maquettes légères, stables, rapidement obtenues et comportant à volonté un plancher lisse ou un plancher mécanique. D'où l'adoption d'une technique de réalisation par un tirage plastique.

Rôle du plancher des maquettes dans les essais
Un programme d'essais comportait l'étude comparative de diverses maquettes dans les deux versions :
- plancher mécanique avec refroidissement ("maquette route")
- plancher lisse ("maquette conforme - plancher lisse")
Cette étude avait pour but de nous fixer notre doctrine sur la nécessité des planchers mécaniques des maquettes.

Les conclusions sont les suivantes : (voir planches jointes)

1°/ Le coefficient de traînée Cx est fortement influencé par la nature du plancher. Le passage du plancher lisse au plancher mécanique le majore d'une quantité qui varie suivant l'angle de dérapage.

2°/ Le coefficient de dérive Cy est identique dans les deux configurations.

3°/ Le coefficient de portance Cz est fortement accru dans le cas des maquettes à plancher mécanique.

4°/ Le coefficient de moment de roulis Cl est identique dans les deux cas, et ce résultat est indépendant du niveau auquel est ramené ce moment, car le transport ferait intervenir Cy qui est lui-même identique pour les deux configurations.

5°/ Le coefficient de moment de tangage Cm est ramené au niveau du sol pour être comparé entre les deux configurations de chaque véhicule : les courbes présentent des différences importantes en allure et en valeurs absolues des mesures.

6°/ Le coefficient de moment de lacet Cn est identique pour les deux configurations.

L'étude précédente montre donc que, sur six composantes, trois sont identiques lorsque le plancher lisse est remplacé par un plancher mécanique.


Conclusiion
Le plancher mécanique a une importance considérable sur la détermination du Cx des maquettes en soufflerie. Il influe notablement sur Cz et Cm, mais ne joue aucun r8le sur Cy, Cl et Cn. Le bilan de ces diverses influences est qu'une étude de maquette à plancher lisse donne une bonne approximation des efforts aérodynamiques verticaux et transversaux lorsque le plancher est mécanique.
Les six composantes des efforts aérodynamiques peuvent donc être étudiées dès le stade de la maquette de style à plancher lisse.

P.S. - Les courbes montrent l'allure rectiligne des variations de Oy, Cl et Cn en fonction de l'angle de dérapage j, ce qui justifie l'habitude anglo-saxonne de remplacer ces trois coefficients par leurs dérivées partielles
d Cyd Cld Cn
 ------ ; ------ ; ------ 
d jd jd j

Souffleries

Il n'est pas dans notre propos de décrire les souffleries utilisées pour l'étude des maquettes automobiles. Certaines d'entre elles font d'ailleurs l'objet d'une étude dans le traité d'Aérodynamique expérimentale de P. Rebuffet (1) . Nous nous pencherons par contre sur deux problèmes dont la solution facilite la comparaison des résultats obtenus avec une même maquette dans deux souffleries différentes et nous traiterons donc de :
- l'effet bouchon
- l'influence de la vitesse sur les caractéristiques aérodynamiques.

Effet bouchon

En présence d'une maquette, la limitation de la veine impose des contraintes aérodynamiques locales dans une soufflerie et elle modifie la répartition des vitesses et des pressions. Le terme d'effet bouchon est réservé aux phénomènes qui modifient la valeur de la vitesse, par rapport à ce qu'elle serait autour de la maquette dans une veine de section infinie. Son étude est essentielle pour connaître la vitesse effective du vent au cours d'un essai en soufflerie.

Considérons une veine de soufflerie, dans laquelle sont disposés deux tubes de Pitot, l'un A dans une zone amont jugée stable, l'autre B au droit de la maquette.

La vitesse de l'air en A peut être considérée comme la meilleure approximation directe de la vitesse non perturbée. Nous allons examiner les diverses méthodes de correction qui lui sont appliquées.

Une première méthode consiste à estimer que la perturbation aérodynamique causée par la maquette en A résulte de la pression statique en B. Son application revient à définir comme vitesse de l'air, pour l'essai considéré, la vitesse V obtenue à partir de la pression totale en A et de la pression statique en B.
Nous avons, par définition de la pression totale Pt en A,
VA2VB2VB2
PtA = pA + r ------  = pB + r ------  + k r ------ 
222

d'où
V2VB2
r ------ = PtA - pB = (1 + k) r ------ 
22

ou
(1) V2 = (1 + k) VB2

Ce coefficient k peut d'ailleurs être calculé avec une bonne approximation, à partir des pertes de charge de paroi et des pertes de charge du fait du "décollement" provoqué par la réduction de section au droit de la maquette.
En désignant par Sv et Sm les surfaces respectives de la veine et de la maquette perpendiculairement au vent, la loi de conservation du débit s'écrit entre A et B.
(2) VA . Sv = VB (Sv - Sm)
L'élimination de VB entre les équations (1) et (2) nous permet d'écrire :
Sv
(3) V2 = (1 + k) ( --------- )2 VA2
Sv - Sm

Une seconde méthode consiste à utiliser une formule de correction tenant compte des dimensions respectives de la maquette et de la veine.
Entre autres, nous avons relevé sous la signature du Professeur Morelli (2) l'existence d'un facteur de correction du Cx qu'il dénomme z et qui est une fonction des "rayons" respectifs R et r de la veine et de la voiture, sensiblement égale à
1,21,2 Sm
1 - ---------  en veine fermée et donc à 1 - --------- 
(R/r)2Sv

Cette pratique revient sensiblement à multiplier la vitesse VA par un coefficient égal à
1,2 Sm
(1 - ------ )0,5 pour obtenir V.
Sv

Les résultats obtenus par ces deux méthodes sont concordants.

Examinons maintenant le cas d'une veine libre.
Considérons une maquette étudiée avec prise de pression totale en A et de pression statique en B, dans une veine dont la dimension relative croît par rapport à la maquette et qui peut donc être considérée mathématiquement comme devenant libre. La formule de base est la formule (3) que nous pouvons d'ailleurs simplifier par un développement en série limitée. Nous avons
SvSm2 Sm
V2 = (1 + k) ( --------- )2 VA2 = (1 + k) (1 + --------- )2 VA2 (1 + k + --------- ) VA2
Sv - SmSv - SmSv - Sm

Pour Sm donné, lorsque Sv croît, le rapport 2 Sm / (Sv - Sm) décroît en tendant vers zéro; simultanément les pertes de charge par décollement et le coefficient k se rapprochent d'une valeur nulle.
Compte tenu de l'allure des variations de k et de 2 Sm / (Sv - Sm), lorsque Sv croit, nous constatons qu'en veine libre les valeurs de V et de VA sont plus voisines qu'en veine guidée.

Le Professeur Morelli indique des valeurs de z pour une soufflerie à veine libre, qui sont sensiblement égales à
0,40,4 Sm
1 - ------ = 1 - ------ 
(R/r)2Sv

Cela revient à écrire
VA
V = ------------------------ 
(1 - 0,4 Sm / Sv)0,5

La comparaison avec la formule
VA
V = ------------------------ en veine guidée
(1 - 1,2 Sm / Sv)0,5

montre que, pour le Professeur Morelli, l'écart entre V et VA est plus faible en veine libre qu'en veine guidée, ce qui est conforme à nos résultats expérimentaux.

Influence de la vitesses sur les coefficients aérodynamliques

Les coefficients de force (Cx, Cy et Cz) et les coefficients de moment (Cl, Cm et Cn) ne sont indépendants de la vitesse qu'en première approximation.
Mais les traités d'aérodynamique ne citent généralement que la variation de Cx en fonction du nombre de Reynolds (et donc de la vitesse).
Aussi avons-nous effectué la mesure des six composantes à des vitesses échelonnées de 15 à 30 m/s sur une maquette au 1/5.
Le tableau ci-dessous donne les résultats des mesures

CxCyCzClCmCn
15 m/s0,5251,4020,8930,4220,1090,136
21,5 m/s0,5281,4390,9350,4230,1110,141
25,3 m/s0,5211,4160,9180,4120,1080,139
30 m/s0,5161,4220,8970,4040,1030,138

La première conclusion concerne le Cx. Nous constatons une baisse de celui-ci qui est de l'ordre de 1,3 point lorsque la vitesse croit de 15 à 30 m/s.
Nous concluons que les résultats obtenus dans différentes souffleries ne sont comparables que pour une même vitesse d'essai.
La deuxième conclusion est d'un intérêt plus théorique. Nous avons calculé le rapport
(Cx2 + Cy2 + Cz2)0,5
r = ------------------------------ 
(Cl2 + Cm2 + Cn2)0,5

aux quatre vitesses considérées et nous avons obtenu les résultats du tableau ci-dessous :

V15 m/s21,5 m/s25,3 m/s30 m/s
r3,8203,9103,9404,000

Nous en déduisons que la valeur relative des efforts et des moments varie légèrement en fonction de la vitesse d'essai.
En fait l'influence de la vitesse sur les coefficients aérodynamiques est liée au problème général des conditions de similitude. Nous sommes ainsi conduits à rechercher une exécution minutieuse et fidèle des essais, qui doivent donner des résultats corrélatifs de ceux obtenus sur route.
Deuxième partie
Conséquences mécaniques de l'aérodynamique

Interprétation vectorielle des six composants aérodynamiques

I - Rappel de géométrie vectorielle

Soit un point M de coordonnées (a, b, c) par rapport à un trièdre de référence (O x y z).

Soient X, Y, Z les trois composantes d'un vecteur ayant M comme origine.
Le moment du vecteur par rapport au point O est défini par la relation vectorielle
m = OM L
et ses composantes (l, m, n) suivant les axes Ox, Oy et Oz ont pour valeurs respectives
l = bZ - cY
m = cX - aZ
n = aY - bX
I = bZ - cY

1) Le vecteur m10 est perpendiculaire au vecteur .
Leur produit scalaire est donc nul, ce qui s'exprime algébriquement par l'identité
lX = mY + nZ = 0

2) La connaissance de X, Y, Z et de l, m et n ne permet pas de déterminer a, b et c : ces trois dimensions sont indéterminées, conformément à la théorie des vecteurs glissants.
De l'expression des composantes m et n, nous tirons en effet
m + aZaY - n
 ------ = c et ------ = b
XX

et le report de ces valeurs dans l'expression littérale de l revient à écrire l'identité
lX + mY + nZ = O
sans permettre le calcul de a.

3) Les essais aérodynamiques conduisent à la détermination d'une force et d'un moment de composantes respectives X, Y, Z et L, M, N.
En règle générale nous avons
LX + NY + NZ 0
ou, sous une autre forme
Cl Cx + Cm Cy + Cn Cz 0

Le système n'est donc as réductible à un seul vecteur mais à un système comportant au moins une force et un moment..
II - Réduction du système à une force et à moment autour de la droite portant cette force

DT>Nous supposerons que la force F, de composantes X, Y et Z, est appliquée dans le plan de symétrie, en un point de coordonnées (a, o, c).
Nous supposerons que le moment autour de la droite portant la force F a pour composantes l, m et n avec la relation
1mn
 ------ = ------ = ------ = m
XYZ

Le moment mesuré, de composantes L, N et N, est la somme du moment de la force F par rapport à l'origine et du moment autour de la droite portant F.
Nous avons donc
L = - c Y + l = - c Y + m X
M = c X - a Z + m = c X - aZ + m Y
N = a Y + n = a Y + m Z
Nous déduisons de ce système
L X + M Y + N Z
m = ------------------------ 
X2 + Y2 + Z2

et le report de m dans les équations définissant L, N et N permet de déterminer a et c, de préciser ainsi l'origine du vecteur F et de calculer le module
(l2 + m2 + n2)0,5

L'avantage de cette réduction est de permettre une compréhension physique de ce que contiennent les coefficients aérodynamiques.
Considérons en effet le cas d'une berline classique roulant à 130 km/h et subissant un vent de travers soufflant de sa gauche à la force 8 (65 km/h).
L'étude numérique montre qu'elle est soumise :
- à un effort F de l'ordre de 3 000 N appliqué en un point de son plan de symétrie et tendant à déplacer la voiture vers la droite et à la soulever.
- à un moment de l'ordre de 250 Nm autour de la droite portant F.

Remarque

Il existe d'autres systèmes de réduction, dont le choix dépend de l'application envisagée : c'est ainsi que pour les problèmes de stabilité directionnelle, les six composantes peuvent conduire à une réduction comportant
- une force appliquée au centre de gravité G
- un moment de lacet autour de la verticale passant par G
- un moment de tangage autour d'une perpendiculaire au plan de symétrie issue de G
- un moment de roulis autour de l'axe de roulis du véhicule.

Coefficient de traînée Cx

Le coefficient de traînée est le coefficient aérodynamique le plus connu et c'est à sa diminution qu'est liée l'augmentation de la vitesse maximum d'un véhicule, il était donc essentiel de le déterminer sur maquette.
Par ailleurs les vitesses maxi peuvent aussi être utilisées pour déterminer le Cx sur un véhicule grandeur nature. Le point de départ de ce calcul est constitué par les deux courbes expérimentales donnant respectivement la puissance du moteur en fonction de sa vitesse de rotation et la puissance de roulement nécessaire par tonne à différentes vitesses. Il est complété par les deux renseignements suivants :
- dans la zone des vitesses étudiées, le rendement global de la transmission est r. C'est le rapport de la puissance transmise au sol à la puissance du moteur.
- en quatrième, 1000 tours/minute correspondent à une vitesse v km/h.

Ces renseignements permettent une détermination du Cx par le calcul suivant :
- soit V la vitesse maxi en km/h. Elle correspond à un régime moteur de V / v x 1000 tours/minute
La courbe de puissance du moteur donne la puissance correspondante P et la puissance utile est r.P. Celle-ci se décompose en puissance de roulement et en puissance de pénétration aérodynamique.
La courbe de puissance de roulement permet de connaître la puissance à la tonne pour la vitesse V considérée et sa multiplication par la masse N du véhicule donne la puissance réelle de roulement. En déduisant cette dernière de la puissance utile r. P, nous obtenons la puissance de pénétration aérodynamique Pa. Soient S le maître-couple du véhicule en m2 et 1,293 la masse spécifique de l'air. Si Pa est exprimé en ch, nous avons
2 x 75 Pa
S . Cx = ------------------------ 
1,293 x (V / 3,6)3

Si Pa est exprimé en kW, nous utilisons la même formule après division du second membre par 0,736.
Dans les deux cas, connaissant S, nous pouvons calculer Cx, qui est un coefficient sans dimensions.

Il existe d'autres méthodes, dont l'une est liée à la précédente par les modifications ci-dessous :

a) le rendement r pris en considération est le seul rendement de la transmission, permettant de connaître la puissance transmise à la jante à partir de la puissance du moteur. Il est donc a priori supérieur au rendement global de la transmission r utilisé précédemment, car il ne tient pas compte des pertes de puissance dues au rendement du pneu.

b) la perte de puissance due au rendement du pneu et la résistance au roulement sont groupés dans un seul terme qui est la puissance de roulement. Celle-ci est calculée par la formule de Hoerner [4], qui donne la puissance de roulement à la tonne WR par l'équation
WR = 3,71 K . V
où V est exprimé en km/h et W R en ch ou par l'équation
WR = 5,05 K.V
si nous exprimons WR en kW, K étant défini dans les deux cas par la formule
0,010559,53 . 10-7 V2
K = 0,005 + ------------ + ------------------------ 
PP

en désignant par p la pression de gonflage des pneus exprimée en bars et majorée de 0,3 bar dans le cas des pneus radiaux.

c) le solde est la puissance aérodynamique définie comme dans la première méthode.

Les résultats obtenus par les deux méthodes sont pratiquement identiques. Mais il est intéressant :
- d'une part de comparer les résultats obtenus sur maquettes à ceux obtenus sur route, afin d'avoir un ordre de grandeur de la précision des méthodes, ce qui peut être fort utile pour permettre des prévisions de performance en début l'étude d'un véhicule
- d'autre part de tracer la courbe exprimant la liaison entre le Cx et la vitesse V pour juger des variations de vitesse de pointe qu'entraînent les modifications de forme (et donc de Cx) que demandent les stylistes.


Allure de la courbe liant le CX à la vitesse au voisinage du maximum de celle-ci

Coefficient de dérive Cy

La notion de coefficient de dérive Cy et celle du coefficient de lacet Cn qui lui est associée sont essentielles pour l'étude de la stabilité sous vent latéral.
Nous pouvons en effet introduire les composantes aérodynamiques dans un modèle mathématique d'une voiture roulant à vitesse constante et subissant un vent transversal de vitesse donnée.
Considérons le cas extrême d'un conducteur qui serai t surpris par un vent latéral à un instant où il aurait lâché le volant en ligne droite.
L'angle d'attitude q de son véhicule est alors la somme
- de termes constants, qui expriment l'attitude prise statiquement par le véhicule dès qu'il est soumis aux efforts et moments aérodynamiques,
- d'un terme proportionnel au temps t et égal à
E Y1 t     avec E = empattement, l2 = distance du centre de gravité à l'essieu arrière, M = masse du véhicule,
V= vitesse du véhicule par rapport au sol, Y1 = effort aérodynamique sur l'essieu avant
- ------------ 
V M l2

qui exprime que la trajectoire de la voiture est déviée à une vitesse angulaire
E Y1
 ------------ 
V M l2

- et d'un certain nombre de termes transitoires de la forme e-a t sin (bt - y1), essentiellement liés aux conditions générales de stabilité volant libre et s'amortissant donc suffisamment vite pour être négligeables en première approximation.

La somme du temps de réaction personnelle du conducteur et du temps mort d'action de la direction ne peut pas âtre inférieure à 0,3 seconde. Les applications numériques permettent alors de comparer les valeurs numériques des différents termes et de voir que la stabilité sous vent latéral en volant libre peut être caractérisée par la valeur absolue de la vitesse angulaire de déviation de la trajectoire, à savoir :
E Y1
 ------------ 
V M l2

Signalons au passage que ce résultat simple trouve ses correspondants dans les études du Cornell. Aeronautical laboratory sur la stabilité des véhicules. C'est ainsi par exemple que lorsque le couple de lacet est négligé en première approximation, notre formule simplifiée
E Y1 t
q = - ------------ 
V M L2

est voisine du développement en série limitée d'une formule que nous trouvons sous la plume de Whitcomb et Milliken [5] et qui s'écrivait avec nos notations complétées par un - K désignant la somme des rigidités de dérive des pneus avant et arrière.
- 2 Y1
q = ------------  (1 - e- K / Mv t)
K

Nous proposons donc le terme (E Y1) / (V M I2) comme critère de stabilité et nous le désignerons par le symbole y'.

A - Signification physique de y'

Pendant un temps D t, la déviation angulaire de la trajectoire varie de
E Y1
D q = y' D t = ------------ D t
V M l2


Or le terme M l2 / E représente la masse m1 sur l'essieu avant. Cette masse est soumise à la force Y1 qui lui donne une accélération transversale : l'action de celle-ci pendant le temps D t fait prendre à l'avant de la voiture une vitesse transversale définie par
Y1E Y1
v =  ------      D t = ------      D t
m1M l2

Nous avons donc :
vvitesse transversale de l'avant
y' . D t =  ------ =  ------------------------------------------ 
Vvitesse longitudinale du véhicule

Le coefficient y' résulte donc de la composition des vitesses transversales et longitudinales du véhicule.

D'un point de vue pratique, y' peut être modifié en agissant sur :
- la répartition des masses et la position du centre de gravité du véhicule
- la valeur de Y1 et, plus généralement, la répartition des efforts aérodynamiques transversaux entre les deux essieux.

B - Autre interprétation physique de y'

Désignons par f AV la valeur du coefficient de frottement fictif au sol, qui est nécessaire pour empêcher le déplacement transversal de l'essieu avant sous l'effet des forces aérodynamiques transversales.
Nous avons alors :
Y1
f AV =  ------------ 
P1 - Z1

en désignant par P1 le poids du véhicule au droit de l'essieu avant (p1 = m1 g) et Z1 l'allégement aérodynamique de l'avant.
Nous avons donc
Y1Y1E Y1V1
f AV = ------------ = ------------------------ = ------------------------ = ------ y' . ------------------ 
P1 - Z1m1 g (1 - Z1 / P1)M l2 g -1 - Z1 / P1)g1 - Z1 / P1


L'étude numérique d'un cas pratique nous a permis de vérifier que le terme variait que dans de faibles proportions lorsqu'avec une vitesse élevée du véhicule (V = 130 km/h par exemple) se composait une vitesse de vent transversal variant progressivement depuis la valeur nulle jusqu'à celle correspondant à la force 8 de la classification de Beaufort, si bien que les coefficients y' et f AV restent sensiblement proportionnels.

Remarque

Le coefficient y', que nous avons dégagé dans les calculs de stabilité mentionnés ci-dessus, présentent l'avantage d'être facile à mesurer.
Il suffit d'installer à bord du véhicule, un gyromètre.
C'est la raison vraisemblable pour laquelle ce coefficient est souvent utilisé dans la littérature, en particulier dans une étude publiée par General Motors [6] .

Coefficient de portance Cz

Ce coefficient, dont l'effet est d'ailleurs combiné avec celui du coefficient de tangage Cm, est essentiel pour l'aviation. Sa valeur est alors liée au profil de l'aile, qui provoque une différence de pression de l'air sur ses deux faces et donc une portance.

I - Signification en aérodynamique automobile

Le problème est beaucoup plus complexe en automobile. En effet l'écoulement d'air sous la voiture ne dépend pas seulement de la géométrie du plancher de celle-ci : il dépend du sol.
Il en résulte donc que le Cz d'une maquette de voiture dépend de la distance entre l'axe des roues et le plancher de la soufflerie.
Aussi le Cz doit-il être étudié avec des vitesses d'écoulement de l'air entre le plancher de la voiture et le sol qui soient liées à la vitesse de référence par la même proportionnalité en soufflerie et sur la route.

II - Rôle du délestage

Ainsi que nous l'avons vu dans l'introduction, le Cz et le Cm sont utilisés dans la détermination du Cz AV et du Cz AR qui permettent de calculer le délestage des essieux avant et arrière.
Les valeurs, déterminées sur maquette en soufflerie, peuvent être facilement vérifiées sur véhicule lorsque celui-ci est équipé d'une suspension oléo-pneunatique.

a) pour une voiture classique, le délestage annihile l'effet de moins de 20 % du poids supporté par chaque essieu. Il peut donc être considéré comme ayant une influence relativement faible, puisqu'il ne représente qu'une fraction de la différence entre le poids total autorisé en charge et le poids à vide.
Il est bien évident que cette conclusion n'est vraie que dans les limites des voitures particulières : un véhicule plus léger et plus rapide ne serait pas dans les mêmes conditions et pourrait donc "décoller".
Ce problème est essentiel pour les voitures de compétition.

b) les caractéristiques des pneus (et en particulier la rigidité de dérive) varient avec la charge qui leur est appliquée. Nous avons alors déterminé la rigidité de dérive de l'essieu avant pour diverses charges échelonnées entre les deux cas extrêmes suivants
- voiture lège subissant un délestage de l'avant pouvant être considéré comme le délestage aérodynamique maximum.
- voiture à pleine charge et ne subissant aucun délestage aérodynamique.
Nous constatons que le délestage n'a qu'une faible influence relative sur la rigidité de dérive des pneus.
L'intérêt de ce résultat ne se limite d'ailleurs pas à la portance : nous vérifions ainsi que le transfert latéral de charge, résultant du coefficient de roulis, n'affecte pas les caractéristiques des pneus.

III - Rôle indirect de la portance

Ce r8le a déjà été évoqué dans notre Introduction, au cours de la description de l'étude d'une maquette en six composantes.
Le tracé de la polaire Eiffel en incidence permet en effet de déterminer l'incidence aérodynamique nulle et de mettre en évidence le coefficient de traînée induite par la portance Cxi.
Diverses polaires ont subi une interprétation semblable à celle que les aérodynamiciens utilisent pour l'aviation. En effet il est possible d'étudier la variation du coefficient de traînée induit Cxi et de vérifier que le Cxi est lié au coefficient de portance Cz par une relation du type
Cz2
Cxi = ------------ 
P l e

en désignant par l e une constante appelée allongement effectif.

Cette formule nous a permis de calculer l'allongement effectif l e et de vérifier que sa valeur numérique était voisine de celle de l'allongement théorique l, qui serait défini, pour une voiture, par la relation
4 b2
l = ------------ 
S

où 2 b désigne la largeur de la voiture et S son maître-couple.

L'accord ainsi constaté justifie une poursuite de ce mode d'étude du rôle indirect de la portance, dont l'influence est certainement aussi grande pour les voitures de tourisme que son rôle direct.
Troisième partie
Aérodynamique et style


L'aérodynamique intervient dès le stade de la conception des véhicules. Les essais en soufflerie permettent alors de rechercher le meilleur compromis entre les caractéristiques aérodynamiques que nous venons d'analyser et le style. Mais la liberté de création d'une forme se heurte à de nombreux obstacles (ne seraient-ce même que les réglementations internationales), si bien que l'aérodynamicien interviendra souvent par des modifications qui affectent peu l'allure générale type d'une voiture. Nous allons donc voir l'incidence théorique de ces modifications de forme et nous présenterons ensuite quelques séries de résultats généraux pouvant orienter les stylistes.
Cette étude a essentiellement porté sur la traînée.

Incidence théorique des modifications de forme cumulées
(ou principe d'addivitté des effets aérodynamiques)

Les traités d'aérodynamique exposent que le groupement de deux corps n'a pas une traînée égale à la somme de celles de chacun d'eux étudié isolément ; il y a interactions des phénomènes aérodynamiques.

Qu'advient-il dans le cas de deux modifications d'un corps ?
L'étude de ce problème a été entreprise à la soufflerie de La Garenne, à partir d'une maquette au 1/5 dont l'état de référence comportait : plancher mécanique et simulation de refroidissement.
Nous avons utilisé cinq moyens de réduire sa traînée, à savoir :
- la suppression du refroidissement
- l'adjonction d'un nez aérodynamique
- le remplacement du pare-brise par un pare-brise plus incliné
- l'adjonction d'une lunette arrière assurant un raccordement progressif entre la ligne de tête arrière du pavillon et le haut de l'arrière du coffre.
- le carénage du plancher
Les quatre dernières sont explicitées par le schéma joint.


Modificatios aérodynamiques

Un programme parfaitement exhaustif aurait consisté à étudier l'effet de toutes les combinaisons possibles de ces cinq modifications, ce qui nous aurait conduit à étudier un nombre de cas égal à
p = 5p
S      (= 0
p = 00

Mais nous avons considéré que le refroidissement était inéluctable ai bien :
- que nous n'avons mesuré son incidence que dans deux cas et
- et que le nombre d'essais a été ramené à
p = 4p
2 + S      (= 18
p = 04

Les résultats expérimentaux peuvent être commodément exprimés sous la forme de traînées brutes de mesure.
Nous avons d'abord déterminé en soufflerie la diminution de traînée provoquée individuellement par chacune des cinq modifications. Puis nous avons comparé
- les valeurs mesurées sur la maquette subissant les diverses combinaisons de ces modifications
- et les valeurs calculées en considérant que les diminutions de traînée étaient additives.
Nous avons obtenu un excellent accord dans une zone dont il convient toutefois de préciser qu'elle ne couvrait qu'une réduction de 30 % de la traînée de référence.
Nous en avons donc conclu que, dans la plage des différences de style courantes, les effets des modifications de forme d'un corps sont additifs en traînée.

Ce principe peut apparaître comme une conséquence de l'allure linéaire des effets de petites variations d'une cause; il justifie d'entreprendre isolément l'étude de l'effet de diverses modifications de forme.

Etude de modifications de forme isolées


Pour présenter un intérêt général, ces études devaient reposer sur une définition géométrique des modifications de forme.
Une première série d'essais a été entreprise en ne modifiant que le profil de la voiture, défini par son plan de symétrie. L'écoulement était alors essentiellement modifié dans sa répartition sur et sous la voiture.
La deuxième série d'essais consiste à modifier les écoulements latéraux et à considérer les phénomènes aérodynamiques sur les parois du véhicule.
Les essais ont souvent été conduits sciemment jusqu'à des formes "absurdes" de façon à connaître vraiment l'incidence de chaque modification.

A - Modification de profil

Influence du pavillon

Diverses études ont montré que l'influence de
- la position de la lunette arrière
- l'inclinaison de la lunette arrière
- l'inclinaison du pare-brise
sur les valeurs des traînées était relativement faible.

Par contre la pente du pavillon a une grande influence qui peut s'expliquer en assimilant la voiture à un fuseau. Nous pouvons en effet poursuivre le tracé de chaque pavillon et obtenir des "fuseaux" dont la longueur L varie beaucoup plus que le diamètre D, défini comme égal à
maître-couple
2 ( ------------------ )0,5
xpi

Nous nous reportons alors à des abaques classiques de coefficient de traînée d'un fuseau en fonction de son "allongement".
Nous comprenons alors que l'évolution du pavillon 0 au pavillon 3 s'accompagne d'une augmentation de traînée, qui subsiste même après qu'une correction a été faite pour en soustraire l'effet d'augmentation du maître-couple.

Modification d'écoulements latéraux

Influence du pare-brise

Une étude systématique a été entreprise sur les formes de pare-brise.
Ceux-ci ont été définis géométriquement de la manière suivante :
- nous avons considéré initialement un pare-brise plan, faisant un angle de 40° environ avec l'horizontale et raccordé au pavillon par un rayon xrho égal à 40 mn. L'intersection de ce plan avec les surfaces relativement planes que constituent les deux flancs de la voiture a permis de définir deux points A et B dans un plan horizontal que nous avons défini comme le niveau du bas de pare-brise.
- les adoucissements complémentaires de cette forme ont été obtenus d'une part an choisissant des valeurs croissantes de f, distance horizontale entre la droite AB et le point le plus avancé du pare-brise dans le plan du niveau de bas de pare-brise (la connaissance de f et celle des points A et B permet de définir un cercle horizontal de courbure principale. Le pare-brise est alors défini comme un élément d'un cylindre dont les génératrices s'appuient sur ce cercle et font un angle d'environ 40° avec l'horizontale).
- d'autre part en ajoutant un rayon de raccordement constant le long du montant de baie et qu'on a fait varier de r = o (arête vive) jusqu'à r = 60 mm.

Un pare-brise peut alors 8tre caractérisé par les deux données géométriques f et r
Le schéma et le tableau des résultats d'essais obtenus conduisent à l'interprétation suivante :
- Deux traînées de la maquette correspondent à des pare-brise plats ou à faible flèche sans aucun rayon de raccordement latéral. Elles sont sensiblement égales et nous les prendrons comme référence.
- Une amélioration des pare-brise sans rayons de raccordement latéral peut être obtenue par un accroissement de leur flèche centrale f, mais ne permet qu'une réduction moyenne de l'ordre de 4 %.
- Une amélioration beaucoup plus importante s'obtient par la création de rayons de raccordement latéraux : dès que ceux-ci ont atteint une valeur de 12,5 mm sur maquette au 1/5, les traînées étaient réduites de 7 % par rapport à la référence cependant que l'accroissement de f permettait ensuite d'obtenir un léger effet complémentaire an portant la réduction totale à 8 % par rapport à la référence.

Cette interprétation peut être résumée en une phrase : le rayon de raccordement du pare-brise aux flancs du véhicule constitue le terme géornétrique le plus important pour réduire l'influence d'un pare-brise sur la tratnée.

Des études similaires peuvent concerner les diverses modifications de forme possibles, telles que les variations de section droite de l'habitacle ou le resserrement de l'avant et de l'arrière de la forme an plan.

Toutes ces études ont fait l'objet de programmes systématiques, qui ont été réalisés essentiellement dans la soufflerie Peugeot et aux Laboratoires d'Aérodynamique de la Régie Nationale des Usines Renault.
Elles ont permis de mettre des planches expérimentales à la disposition des stylistes et de diminuer ainsi les tâtonnements dans la recherche d'une forme bénéficiant harmonieusement de qualités esthétiques et aérodynamiques.

Bibliographie

[1] - P. Rebuffet, Aérodynamqiue expérimentale, Ed. Dunod
[2] - A. Morelli, Gallerie del Vento, Publication Pininfarina, 1.1967
[3] - H. Liebold, Erfahrungen mit Seitenwind-gebläsen für Fahrversuche mit Kraftwagen, A.T.Z., 7.1965
[4] - Hoerner, Fluid Dynamic Drag, Ed. Hoerner, Midland Park, New Jersey, 1958
[5] - Whitcom et Milliken, Design Implications of a general theory of automobile Stability and Control, Institution of Mechanical Engineers, 1956
[6] - Bundorf, Pollock et Hardin, Vehicle Handling Response to Aerodynamic Inputs, SAE - 716 B, 6.1963

Etude aérodynamique d'une maquette
(Bernard Gironnet, Construire une voiture de course, 1979)

1. Paramètres généraux

La traînée se décompose en :
1. La traînée de forme du véhicule isolé.
2. La traînée induite par la portance.
3. La traînée de frottement
4. La traînée de culot
5. La traînée d'interaction sol-voiture.

La traînée de forme du véhicule isolé est un des paramètres de l'étude.
La traînée induite par la portance est assez bien connue et proportionnelle au carré de celle-ci.
La traînée de frottement est liée à la viscosité de l'air et à l'état de surface du corps.
La traînée de culot provient du décollement des filets d'air à l'arrière et est donc liée à la forme de l'arrière.
La traînée d'interaction sol-voiture est fonction du point de vitesse nulle à l'avant du véhicule et de la garde au sol.

La portance dépend d'un certain nombre de points sensibles qui sont (fig. 164) :
1. Le point d'arrêt à l'avant (point de vitesse nulle)
2. La forme du capot
3. La position du maître couple
4. Le volet arrière
5. La forme de l'arrière
6. L'onglet arrière
7. La forme du dessous de la voiture.


2. Paramètres retenus

La voiture a été schématisée et dotée de formes géométriques simples. Les passages de roues et les entrées d'air ont été supprimés. Deux paramètres sont alors mis nettement en évidence : l'angle avant et l'angle arrière. A un corps central qui reste inchangé sont fixés un avant et un arrière. Six angles avant de 21° à 45° et six angles arrière, de +30° à -20° ont été choisis (fig, 165).


Il n'a pas été tenu compte de l'habitacle : la maquette se présente donc sous la forme d'une barquette (photo 166).


fig. 166. Schématisation d'une maquette modèle

Dans le même esprit, les sections longitudinales ont été conçues identiques ; le problème se ramène donc à un écoulement bidimensionel.
Pour le choix des cotes générales, un projet de voiture sport-prototype a été pris comme base. L'empattement, les voies avant et arrière ainsi que les cotes d'encombrement du châssis ont été respectés, ce qui a conduit à prendre un angle de 4,5° pour le corps central. (Voir plan 167 de définition de la maquette.)


Avec le choix de ces paramètres, seules varient deux composantes de la traînée : la traînée de forme et la traînée de culot. La traînée induite par la portance n'est fonction que de celle-ci. La traînée de frottement et d'interaction sol-voiture sont sensiblement constantes.
Pour ce qui est de la portance, les avants à angles vifs fixent le point d'arrêt. La maquette n'a pas d'onglet arrière et la forme du dessous ne varie pas. L'arrière est tronqué à la même cote pour toutes les maquettes. Le maître-couple ne prend que deux positions : il se situe à l'extrémité de l'arrière quand celui-ci présente un angle supérieur à 4,5° et au niveau du congé entre le corps central et l'arrière quand celui-ci présente un angle inférieur à 4,5°.
Grâce aux six avants et aux six arrières nous disposions de trente six maquettes, ce qui nous a permis d'étudier l'influence des deux paramètres choisis sur la traînée, la portance et la répartition de la portance sur les essieux.

3. Résultats des essais

Afin de repérer facilement les différentes maquettes chaque élément a été numéroté. Le corps central a été repéré I et les autres éléments de la façon suivante (fig. 168).


Ayant ramené les composantes à l'unité de pression dynamique, nous obtenons les différents CS caractérisant la maquette.
Il est intéressant de calculer le Cx, coefficient sans dimension, qui caractérise l'aérodynamique de traînée du corps.
Les tableaux 169 et 170 donnent les résultats obtenus, avec :

CzSen 10-3 m2
CxSen 10-3 m2
Z1 =(CzS)Av en 10-3 m2
Z2 =(CzS)AR en 10-3 m2
Cxsans dimensions
Tableaux 169 et 170

maquette
no
CzSCxS(CzS)ar(CzS)avCxmaquette
no
CzSCxS(CzS)ar(CzS)avCx
1168.846.2614.96-6.120.34113-12.1411.54-4.25-7.880.50
2168.266.5014.71-6.450.36213-12.5211.61-4.39-8.130.50
3167.876.4413.65-5.780.35313-12.4711.85-4.65-7.820.51
4167.986.7813.95-5.960.37413-12.5812.00-4.74-7.840.52
5167.517.0513.18-5.670.39513-12.9612.40-5.03-7.730.53
6166.807.0711.69-4.890.39613-12.7912.94-5.34-7.440.56
1153.386.0610.51-7.130.33112-20.2917.66-14.50-5.790.65
2153.026.2910.26-7.240.34212-20.3817.77-14.42-5.960.66
3153.016.599.79-6.780.36312-20.6217.97-15.05-5.560.66
4152.886.789.46-6.580.37412-20.6918.24-15.26-5.430.67
5152.526.898.80-6.280.37512-20.9618.54-15.94-5.020.69
6152.607.238.01-5.410.39612-20.8119.11-16.65-4.160.70
114-3.987.023.41-7.390.38111-27.6025.30-24.06-3.540.79
214-4.377.413.34-7.710.40211-27.9825.44-24.39-3.590.80
314-4.217.642.70-6.910.41311-28.2125.70-25.22-2.990.80
414-4.317.842.51-6.820.42411-28.7726.14-25.47-3.300.82
514-4.518.062.08-6.590.44511-28.9126.12-25.71-3.190.82
614-4.178.381.50-5.670.45611-28.6226.41-26.36-2.250.83


5. Ailerons - Effets de sol

Comme nous venons de le voir dans le paragraphe précédent, les formes de la voiture ont une influence essentielle sur la répartition et l'intensité des charges sur les essieux. Nous n'avons évoqué que les résultats obtenus avec la seule modification du profil supérieur du véhicule, le dessous restant sensiblement parallèle au sol. De nombreux constructeurs, toujours à la recherche des performances, ont cherché à utiliser le dessous du véhicule et à monter des systèmes complémentaires tels qu'ailerons, jupes etc.
Les ailerons, à l'avant, à l'arrière et sur les côtés, ne sont que des profils aérodynamiques qui, judicieusement inclinés, donnent un effort vertical, de haut en bas, important pour une composante horizontale relativement faible (voir figure 171).


fig. 171. Efforts sur les ailerons

Pratiquement, sous des formes diverses, toutes les voitures actuelles en sont équipées. Notons simplement, pour ceux qui voudraient mettre en place de tels systèmes, que les profils aérodynamiques du type NACA (voir figure 172 et voir UIUC Airfoil Data Site) sont très sensibles à l'inclinaison ou angle d'attaque d et surtout, comme le montre la figure 172, que l'effort vertical caractérisé par le Cz n'est pas linéairement proportionnel à l'inclinaison.


Fig. 172 - Profils N.A.C.A. (National Advisory Commitee for Aeronautic)

Il y a donc lieu de connaître parfaitement les caractéristiques aéronautiques du profil avant de le monter, puis d'effectuer les réglages pour obtenir l'effet désiré. Ne pas oublier que dés qu'un profil est prés d'une paroi, l'écoulement de l'air entre ce profil et la paroi n'est pas le même que lorsque ce profil est isolé dans le fluide. C'est le cas de l'écoulement de l'air entre le dessous du véhicule et le sol. Il est donc très important de tenir compte de cet effet dit de sol, car, bien exploité, il peut être très avantageux, comme c'est le cas lorsqu'on met le dessous en dépression en créant un venturi entre la paroi et la route (voir fig. 171).
Généralement, les ailerons sont des profils courts si bien que les effets perturbateurs d'extrémité sont très importants par rapport à l'effet central. Il est donc nécessaire de limiter ces effets perturbateurs pour obtenir un écoulement bidimensionnel efficace, c'est-à-dire constitué par le mouvement de tranches d'air planes, perpendiculaires au plan défini par le bord d'attaque et la corde du profil. La technologie consiste à mettre, aux extrémités du profil une paroi plane verticale qui favorise l'écoulement sans turbulence des filets d'air.
Notons que toute canalisation d'air interne, par exemple celle qui sert au refroidissement des radiateurs, peut, si le profil adopté est correct, donner naissance à un effort vertical de haut en bas non négligeable.
Tous les efforts aérodynamiques que nous venons de citer dépendent de la vitesse d'écoulement de l'air sur les parois. Ils sont, par conséquent, variables avec la vitesse du véhicule c'est-à-dire très importants à grande vitesse et nuls à l'arrêt. C'est un inconvénient non négligeable auquel certains constructeurs ont voulu remédier en installant sur le véhicule des systèmes mécaniques indépendants de la vitesse tels que des dépresseurs.
Les dépresseurs sont des turbines axiales ou ventilateurs qui aspirent l'air sous la voiture pour le rejeter à l'extérieur dans une zone où la suppression favorise l'écoulement des filets d'air.
Quelle que soit la technologie adoptée pour créer un effort vertical améliorant l'adhérence du véhicule il faut veiller à ne pas détériorer par trop le Cx afin de garder à la traînée une valeur acceptable.