Apollo 11

L'épopée lunaire... j'y étais... en tant que téléspectateur curieux et assidu.
Des coupures de presse de l'époque, de différents journaux (la Nouvelle République, Le Berry républicain, France Soir...), un peu en vrac.
Après tout, ces documents ont plus de 40 ans maintenant, et moi 40 ans de plus.
P. Boursin


La Nouvelle République - Ici les jeunes - Des jeunes face à la Lune

C'est un garçon que je connais fort bien. Fier de ses treize ans il n'hésitait pas à relire pour la dixième fois "On a marché sur la Lune" avec son ami Tintin. Soudain, au cours d'une nuit, ce garçon a sous ses yeux vu plus qu'il n'aurait pu imaginer.
Des hommes qu'il avait déjà découverts, quelques jours avant sur la terre, marchais à près de 400 000 km de là sur une planète qui jusqu'à maintenant était du domaine de son imagination. Pendant deux jours, face à la Lune, ce garçon n'a voulu manquer aucun rendez-vous. On lui coupait la télévision, il emportait son transistor, et le matin se réveillait le premier pour voir en différé ce qu'on lui avait interdit la veille, compte tenu de l'heure Toutes les 15 mn il se faisait le porte-parole des dernières informations, synthétisait, accaparant le journal, mélangeant quelque peu les termes.
Il fallut aux parents, assaillis de questions, de demandes de précisions, fouiller pour retrouver l'ancien bouquin de cosmologie qui paraissait à jamais oublié. On discuta chiffres, courbes, orbites et la science des adultes s'avéra bien maigre au grand désappointement de l'enfant qui, en deux jours, face à la Lune, avait semble-t-il subitement mûri.
Cet événement a en effet été ressenti intensément par la plupart des jeunes. Nous avons, pour notre part, rencontré quatre d'entre eux au centre social de la Chancellerie.
L'un d'eux, âgé de treize ans, avait passé la nuit à attendre. Nous indiquons par ailleurs leurs premières réactions. Il faut noter qu'elles sont toutes différentes et pour chacun c'est une extraordinaire aventure qu'ils venaient de vivre. Pour tous la réussite était presque obligatoire, mais l'un d'eux ne cacha pas l'angoisse qu'il ressentit au moment du décollage de la Lune.
Le plus jeune, pour sa part, nous a déclaré : "il y a des gens qui prétendent qu'on a perdu des millions qu'on aurait pu donner à ceux qui ont faim. Moi je crois que cette découverte aidera plus tard les gens à manger à leur faim."
Fasse le ciel - bien plus haut - l'entendre.
Ce qui est certain, pour ces jeunes que nous avons interrogé, c'est que l'événement a pris sa juste mesure, même si le ^progrès de demain fait oublier bientôt ce qui se fait aujourd'hui.
L.S.

Jean-Marc Vacher : "Pour moi, ce qui a compté, ce sont les premiers pas des Cosmonautes."
Philippe Delhomme, 13 ans : "Le plus important pour moi ? L'alunissage. C'est une extraordinaire aventure."
Philippe Boursin, 12 ans : "J'ai eu peur que ça ne marche pas au moment du départ de la Lune et qu'ils meurent sur place."
Etienne Pautrat, 11 ans : "J'ai passé la nuit à attendre qu'ils débarquent. Ce qui m'a le plus frappé : Les cosmonautes qui semblaient danser autour du drapeau américain."
La fusée Saturn V

Cet engin, sorti tout droit d'un rêve de science-fiction, surpasse par sa taille, sa puissance et sa complexité tout ce qui a jamais été lancé jusqu'ici.
Le train lunaire, composé de la cabine Apollo (command module), du module de service (service module) et de l'engin d'exploration lunaire (lunar module) se balance en effet au sommet de Saturne V soit 109 mètres d'altitude. La fusée est aussi haute qu'un immeuble de trente-six étages. Saturne V c'est 2.920 tonnes au départ, soit le poids de vingt-six des plus grosses locomotives de la S.N.C.F. ou même d'un escorteur d'escadre de la Marine nationale ; c'est encore trois millions de pièces et 2.159 mesures effectuées pendant le lancement. La NASA a dépensé la bagatelle de 19 milliards de francs lourds (plus que le produit national brut d'un pays comme Israël) pour la recherche et le développement de celle fusée dont chaque exemplaire coûte 925 millions de francs.
Nous trouvons de bas en haut de la fusée :

Le premier étage S-I
Ses cinq moteurs ont une poussée de 3.402.000 kg (l'équivalent de 160 millions de chevaux-vapeur).
Ils fonctionnent grâce à 800.000 litres de kérosène et 1.310.000 litres d'oxygène liquide.
Longs de 42,1 mètres, avec un diamètre de 10 mètres, ils consomment 15 tonnes de carburant par seconde pendant leurs deux minutes et demie de vie.
Le deuxième étage S-II
Les cinq moteurs fournissent une poussée totale de 960.000 kilos.
Leurs réservoirs contiennent 1 000.000 de litres d'hydrogène liquide et 330.000 litres d'oxygène liquide.
Le troisième étage S-IV-B
Son moteur possède une poussée de 102.000 kilos.
Ses réservoirs contiennent 250 000 litres d'hydrogène liquide et 77.000 litres d'oxygène liquide.
Long de 17,6 mètres, avec un diamètre de 6,7 mètres, le moteur du troisième étage brûle pendant 8 minutes environ.
La case à équipement IU
Ce "cerveau" contient les instruments électroniques assurant le guidage de la fusée et le contrôle du fonctionnement des trois étages.
Longueur 91,4 centimètres. Diamètre 6,60 mètres.
Puis le véhicule lunaire LM,
le module de service SM,
la cabine (module de commande CM).
La tour de sauvetage LES
Haute de 10 mètres, la tour de sauvetage est conçue pour séparer la cabine Apollo de la fusée Saturne en cas de mauvais fonctionnement de la fusée au départ ou pendant les premières minutes de vol.
Ses puissantes fusées propulseraient la cabine Apollo et ses trois occupants à une hauteur suffisante pour qu'ils puissent ensuite descendre en parachute sans retomber sur la fusée.
et enfin, le vaisseau spatial Apollo.
Echos d'Apollo 11

350 millions de dollars
Depuis dix ans, la N.A.S.A. a dépensé près de 24 milliards de dollars pour envoyer le 21 juillet deux hommes sur la Lune. La mission Apollo 11 coûtera à elle seule 350 millions de dollars.
La fusée Saturne 5 revient à 185 millions, la cabine-mère à 55 millions, et le module lunaire à 41 millions Le carburant pour la fusée et le coût de l'entretien des installations au sol pour le contrôle du vol se montent à 69 millions. A titre ci 'indication, les combinaisons spatiales pour la marche sur la Lune reviennent à 300.000 dollars pièce.

Notices sur les manchettes
Ah, si seulement les collégiens pouvaient en faire autant au moment des examens...
La N.A.S.A. a préparé des notices spéciales qui seront fixées aux manchettes des scaphandres de Neil Armstrong et Edwin Aldrin, au cours de leur visite sur la Lune. Toutes les tâches qu'ils doivent accomplir et qu'ils connaissent d'ailleurs par coeur, seront inscrites. De Cette façon, pas d'erreur possible.
Pendant que Neil Armstrong, Edwin Aldrin et Michael Collins couvriront en quatre jours les quelque 350,000 kilomètres qui séparent la Terre de la Lune pour rentrer dans l'atmosphère terrestre, une semaine après leur départ à la vitesse de 40.000 kilomètres à l'heure, l'explorateur norvégien Thor Heyerdahl, assisté d'une équipe internationale, poursuivra lentement sa traversée de l'Atlantique à bord de "RA", son bateau en papyrus.

Né à Rome
Michael Collins, 39 ans, est le seul des 66 astronautes recrutés par la N.A.S.A. à n'être pas né aux Etats-Unis. Il a vu le jour à Rome, où son père était attaché de l'ambassade américaine.
C'est en France, alors qu'il était pilote de chasse dans l'armée de l'air américaine, qu'il fit connaissance de sa femme, Pat, qui travaillait pour le gouvernement des Etats-Unis C'est également en France que le couple s'est marié.

"Fromage lunaire"
Wapakoneta (Ohio) : petite ville de 7.500 habitants comme il y en a tant dans le Middie-West, minuscule point noir, perdu sur la carte des Etats-Unis est en voie de devenir un "site classé". C'est le lieu de naissance de Neil Armstrong, commandant de la mission Apollo 11. Ses parents y vivent toujours.
Armstrong y a vu le jour, le 5 août 1930, dans la ferme de ses grands-parents. La rue où est située sa maison familiale a été rebaptisée "Neil Armstrong Drive" (boulevard Neil-Armstrong). L'aéroport où il a passé son brevet de pilote s'appelle maintenant "Neil Armstrong Airport".
La compagnie de fromages de Wapakoneta, industrie principale de la localité, qui emploie 400 personnes, a créé une nouvel4e spécialité : le
"fromage lunaire" (moon cheese). Elle a aussi mis sur le marché une nouvelle boisson gazeuse, la "rose lunaire de Wapakoneta" (moon sauce from Wapakoneta). Ces deux nouveautés se vendent très bien dans toute la région.
Le gouverneur de l'Etat de l'Ohio a décidé de proclamer "journée NeiI Armstrong" le lundi 21 juillet, jour où l'astronaute posera le pied sur la Lune. Cette journée sera célébrée tous les ans à la date anniversaire de la conquête du satellite de la Terre.

La salle principale du Centre de contrôle des opérations de lancement d'Apollo 11.
450 personnes environ sont employées à ce contrôle. (A.F.P.)



L'opération à la télé

Voici le détail des émissions qui seront consacrées au vol Apollo XI sur les deux chaînes de télévision :
- Mercredi 16, chaîne 1 et chaîne 2 couleur, de 14 h à 14 h. 50 (avec extension possible jusqu'à 19 h. 15 sur la chaîne 1) en direct : lancement d'Apollo XI.
- Mercredi 16, chaîne 1, à 20 h., dans Télé Soir, résumé de la journée.
- Jeudi 17, vendredi 18, samedi 19, chaîne 1 et chaîne 2 couleur : dans toutes les éditions des journaux télévisés, résumés avec transmission des prises de vues en vol.
- Samedi 19, chaîne 2 couleur, de 21 h. 30 à 21 h. 45 : images en vol,
- Dimanche 20, chaîne 1 et chaîne 2 couleur, de 18 h. 40 à 19 h. 25 ou 19 h. 40 en direct, vol en orbite lunaire après la séparation du module et le départ vers la Lune.
- Dimanche 20, chaîne 1, de 21 h. 10 à 21 h. 25, en direct : l'alunissage.
- Dimanche 20, chaîne 2 couleur, de 21 h. 50 à 22 h. 05, en différé : l'alunissage.
- Lundi 21, chaîne 1 et chaîne 2 couleur, de 6 h. 30 à 10 h. résumé filmé des images de la nuit. - En direct : la marche sur la Lune. - Multiplex entre les différentes capitales européennes, avec diffusion de témoignages de personnalités et d'interviews de l'homme de la rue.
- Lundi 21, chaîne 1 et chaîne 2 couleur, de 18 h. 30 à 19 h. 15, en direct le module lunaire quittant la Lune.
- Jeudi 24, chaîne i et chaîne 2 couleur, de 17 h. 20 à 18 h. 30 (avec extension possible jusqu'à 21 h. 30), en direct : retour des cosmonautes et récupération de la capsule.
- Jeudi 24, chaîne 1, à 20 h., au cours de Télé Soir : conclusions de l'opération Apollo XI.
- Jeudi 24, chaîne 1, à 23 h, au cours de Télé Nuit : commentaires du président Nixon, qui se trouvera à bord du porte-avions "Hlornet".
Les commentaires de ces différentes émissions seront assurés depuis les Etats-Unis par Jacques Sallebert et à Paris par Michel Anfrol et Jean-Pierre Chapel.

L'équipage d'Apollo : Neil Armstrong, Michael Collins et Edwin Aldrin (A.F.P.)

L'équipage d'Apollo XI

Neil Armstrong
Il sera le premier piéton de la Lune. La préparation a été d'une telle minutie qu'Armstrong sait qu'il doit poser d'abord son pied gauche sur le sol lunaire.
38 ans, marié, deux enfants : Eric, 12 ans, et Mark, 6 ans.
C'est le seul civil de l'équipage. Il a participé aux vols Gemini 8 et Gemini 11.

Edwin E. Aldrin
Du L.M., il filmera Armstrong faisant ses premiers pas sur la Lune, puis il le rejoindra pour une série d'expériences.
39 ans, marié, trois enfants : Michou, 14 ans, Janice, 12 ans, et June, 11 ans.
Colonel de l'armée de l'air américaine, il a participé aux vols Gemini 9 et Gemini 12.

Michael Collins
Il restera dons la cabine Apollo, prêt à deux éventualités : l'atterrissage raté sur le Lune ou le décollage prématuré de la Lune.
38 ans, marié, trois enfants : Kathleen, 10 ans, Ann, 8 ans, et Michael, 6 ans.
Lieutenant Colonel de l'aviation, il a participé aux vols Gemini 10 et Apollo 8.

Ce qu'est la Lune

Voici les caractéristiques principales de la Lune où le "Lem" transportant Neil Armstrong et: Edwin Aldrin s'est posé dimanche 20 juillet 1969 :
Surface : 36 millions de kilomètres carrés (La surface de la terre est treize fois plus grande.)
Diamètre moyen : 3.480 km soit un peu plus du quart de celui de la terre.
Volume : Un cinquantième environ de celui de la terre.
Masse : Un centième de celle de la terre (en fait, il faudrait rassembler 81 lunes pour obtenir une masse égale à celle de la terre ; la densité moyenne de la Lune est donc de 3,33 contre 5,52 pour la terre).
Relief : Montagnes atteignant 9.000 km, cirques ayant jusqu'à 290 km de diamètre.
Température : Allant de 117 degrés centigrades (soleil au zénith) à moins 172 degrés (la nuit),
Durée du jour et la nuit : 14 jours terrestres chacun.

A quelques jours du départ des premiers hommes qui se poseront sur la Lune,
tout est prêt pour la "grande aventure" au Centre spatial de Houston, dans le Texas.
Voici le laboratoire où seront examinés les "échantillons" prélevés sur la Lune. (Keystone).


Modification du plan de vol d'Apollo 11

Houston (Texas), 13 juin.
Une légère modification du plan de vol d'Apollo 11 a été annoncée vendredi matin par la NASA.
L'attelage spatial cabine-mère - module lunaire effectuera une révolution supplémentaire autour de la Lune, le 20 juillet, juste avant que s'effectue la séparation entre les deux véhicules et que le "Lem" n'amorce sa descente vers la surface du satellite de la terre,
Une révolution lunaire dure deux heures. Le "Lem" ne se posera donc pas à la surface de la Lune le 20 juillet, à 14 h 22 (18 h 22 GMT) comme prévu initialement, mais à 16 h 22 (20 h 22 GMT), et Neil Armstrong, le premier Américain à fouler le sol lunaire, n'effectuera cette "première" de l'histoire de l'exploration que le 21 juillet à 02 h 12 (06 h 12 GMT). Il sera suivi par Adwin Aldrin, qui émergera du "Lem" 27 minutes après son coéquipier.

Au centre de Houston, Neil Armstrong s'est entraîné à poser le pied sur la surface de la Lune. (A.P.)
La plaque que les cosmonautes déposeront sur le sol lunaire, à leur arrivée le 20 juillet. (A.F.P.)

Ce que seront en juillet les premiers pas des hommes sur la Lune

Deux heures pour ramasser des échantillons de sol et prendre des photos
Washington, 17 juin. - Dimanche 20 juillet, à 20 h 23 GMT, le module lunaire d'Apollo 11 se posera sur la Lune d'où il repartira 21 heures 27 minutes plus tard pour rejoindre la cabine-mère demeurée en orbite lunaire.
Les astronautes Neil Armstrong et Edwin Aldrin, après avoir "aluni" à l'endroit prévu, demeureront pendant 11 heures 54 minutes à bord de leur vaisseau pour se reposer, manger et préparer le matériel dont ils auront besoin pendant leur court séjour sur le sol lunaire. Avec tous les détails revus et corrigés par les calculateurs électroniques de la N.A.S.A., les organisateurs du vol Apollo 11 ont révélé lundi à Washington, au cours d'une conférence de presse qui a duré trois heures, les péripéties du débarquement des deux premiers hommes sur la Lune.
Le lundi 21 juillet à 6 h. 17 GMT, Armstrong sortira du vaisseau lunaire et commencera à descendre les neuf marches de l'échelle conduisant au sol. Pendant 5 minutes, il restera debout, tantôt sur un pied, tantôt sur l'autre afin de juger de son équilibre et de la fermeté du sol inconnu.

25 kilos de sol lunaire
Puis, muni d'une pelle, il remplira un petit sac de sol lunaire. Ceci par mesure de précaution, au cas où le décollage du vaisseau aurait à se faire plus rapidement que prévu. Il mettra le sac dans une poche de sa combinaison. Pendant tout ce temps, son camarade Aldrin le filmera du vaisseau lunaire avant d'emprunter le même chemin une demi-heure plus tard (à 6 h. 40 GMT), La sortie d'Aldrin ainsi que ses exercices d'accoutumance seront filmés du sol par Armstrong. Ce dernier, cette opération terminée s'aventurera à une dizaine de mètres du vaisseau pour placer un trépied surmonté d'une caméra de télévision qui sera mise en marche afin de suivre tous les mouvements des deux hommes jusqu'à leur rentrée dans le vaisseau et leur décollage. Cette caméra sera laissée sur place une fois la mission accomplie. Armstrong n'a que 19 minutes pour monter son trépied, fixer sa caméra et la mettre en marche, après quoi il reprendra son travail de pelleteur de sol lunaire. Cette fois, il s'agira d'en remplir un récipient prévu pour 25 kilos. Pendant ce temps, Aldrin déploiera prés du vaisseau un écran en aluminium dirigé vers le soleil.

Ils laisseront leurs bottes sur place
Cette tâche terminée, Aldrin ira planter à quelque 25 mètres du vaisseau, un appareil chargé de signaler les éventuels tremblements du sous-sol lunaire. Puis il se livrera à une série de tests à divers points du sol, passant d'une température de 126 degrés centigrades au soleil, à une température de moins 156 degrés centigrades à l'ombre du vaisseau lunaire
Pendant ce temps, Armstrong transportera à proximité du détecteur sismique un réflecteur à Laser qu'il dirigera vers la terre et qui pourra réfléchir un rayon Laser émis des stations terrestres d'Hawaii ou du Nouveau Mexique,
Commencera enfin le ramassage de rocs, chaque échantillon devant être placé dans un sac et dûment étiqueté.
Après deux heures un quart passées ensemble à travailler sur la surface lunaire, les deux astronautes regagneront leur vaisseau en transportant leurs prises, vers 9 h GMT (5 h. EDTT). En décollant vers 18 h. GMT (14 h. EDT), ils laisseront à l'endroit de leur campement deux paires de bottes lourdes deux appareils de survie - appareils de secours portatifs qui doivent permettre aux astronautes de surmonter une défaillance quelconque de l'appareillage normal dont ils sont équipés - leur caméra de télévision... et leurs traces de pas sur la poussière lunaire.

Neil Armstrong, Michael Collins et Edwin Aldrin saluent les techniciens du Cap Kennedy avant de prendre place à bord de la cabine. (A.P. Radio)


Apollo 11 lancé aujourd'hui

Paris, 15 juillet.
Le plus grand voyage de tous les temps commence mercredi : à 13 h. 32 (G.M.T.), "Apollo-XI" sera lancé et les 20 et 21 juillet, si l'opération se déroule normalement, deux hommes passeront une vingtaine d'heures sur la Lune. Pendant qu'au Cap Kennedy le compte à rebours se poursuit, "Luna-XV", lancé dimanche matin, poursuit sa course vers la Lune, qu'il atteindra le jour du lancement d'Apollo-XI.

"C'est le compte à rebours le plus régulier qui ait jamais eut lieu", a déclaré M. Paul Donnelly, directeur des opérations de lancement, à propos des derniers préparatifs.
Au cours de la nuit de lundi à mardi, les "rampants" ont installé les batteries de la super fusée "Saturne-V" qui doit propulser le "train spatial".
C'est l'une des plus délicates opérations avant la mise à feu de l'immense fusée de 100 mètres de haut.
Pour Neil Armstrong, Edwin Aldrin et Michael Collins, mardi a été consacré à la détente.
Neil Armstrong, commandant du vol, estime que la mission qui lui a été confiée à "80 pour cent de chances de réussir".
Près de 592 millions de téléspectateurs, répartis dans 40 pays, suivront en direct le départ d'Apollo vers la Lune, estime l'Union Européenne de Radiodiffusion.

Affliuence record

Cap Kennedy, 15 juillet.
Cap Kennedy et ses proches environs sinon toute la Floride, sont devenus, à l'occasion du départ des premiers astronautes pour la Lune, une véritable Babel moderne. Certes, la langue véhiculaire est l'anglais mais toutes, sauf le russe et le chinois sont parlées ici, où se trouvent rassemblés plus de 700 journalistes étrangers - sur 4.000 en tout venus de 52 pays différents - 69 ambassadeurs, et une centaine de ministres de la Science, d'attachés scientifiques et militaires, et de personnalités de tous rangs.
Von Braun lui-même, dont le frère Sigismund, ambassadeur à Paris, est arrivé pour assister au lancement, a répondu en allemand à des questions de journalistes de son pays d'origine.
Quant à la Tour de Babel, elle est là aussi, tout le monde peut la voir à des milles à la ronde. Elle est représentée par le fameux bâtiment d'assemblage vertical, le "VAB", où sont montées les fusées géantes "Saturne 5". Avec ses 100 mètres de haut, et surtout son volume énorme de 2.180 mètres cubes, il est plus grand que la plus grande des pyramides, celle de Cheops.
Les personnalités officielles, les touristes, les curieux affluent de toutes parts vers le Cap Kennedy. On évalue, à 24 heures du lancement, à un million et demi, le nombre des spectateurs qui se pressent dans les champs, les orangeraies, sur les plages, pour assister au départ d'Apollo 11.
Les embouteillages sont déjà nombreux mais ils seront sans doute inextricables mercredi matin. Il y a en effet 300.000 voitures attendues, sinon déjà arrivées on Floride.
"Nous avons tout stimulé pour le vol d'Apollo 11 sauf les difficultés qui attendent la police et la route locales" a déclaré avec humour l'un des responsables de la NASA
Le jus d'orange coulera à flots pour le départ pour la Lune. La Chambre de Commerce locale a invité les producteurs de l'une des trois principales richesses de la Floride à l'offrir "à. gogo" à tous les assoiffés. Et il y en a, car si la "Columbiad" de Jules Verne était partie pour la Lune, à quelque 200 kilomètres de là, un 2 décembre, celle des trois astronautes américains va s'envoler en pleine canicule dans un pays subtropical.

Troisième vol à équipage sur orbite lunaire

Voici la fiche technique du vol Apollo 11, troisième vol à équipage sur orbite lunaire, qui marquera le premier débarquement de l'homme sur la Lune :
- Lancement : Le 16 juillet, à 9 h. 32 locales (13 h. 32 G.M.T.) ;
- Durée :195 h. 19 minutes (Un peu plus de 8 jours et 3 heures) ;
- Amerrissage : Le 24 juillet à 12 h 51 (16 h 51 GMT), dans le Pacifique, à 1.930 km (1,200 milles) au sud-ouest d'Honolulu (Hawaii), récupération par le porte-avions "Hornet".
- Equipage : M. Neii Armstrong, commandant de la mission, colonel Michaels Collins, pilote de la cabine triplace, colonel Edwin Aldrin, pilote du "module lunaire" (Lem) à deux places. Tous trois nés en 1930.
- Lanceur : fusée "Saturne-5" avec laquelle Apollo-11; formera un ensemble de 110 mètres (362 pieds) de haut, poids total 3.100 tonnes ; poussée au départ 3.375.000 kilos (7,5 millions de livre).
- Objectif : la Lune à plus de 330.000 km (240 000 milles), sur laquelle deux des astronautes vont se poser et passer près de 22 heures tandis que la cabine-mère, avec Collins seul aux commandes, gravitera sur orbite lunaire de stationnement.
- Buts principaux de la mission : faire débarquer sur la Lune, pour la première fois, un engin spatial, le "Lem", conçu spécialement pour l'alunissage ; confier à deux expIorateurs lunaires le soin de ramener sur la terre une certaine quantité d'échantillons sélénologiques , de transmettre aux terriens des paysages lunaires ; de mettre au point la technique suivant laquelle l'homme, engoncé dans un lourd scaphandre, pourra évoluer dans un monde dont la gravité est six fois inférieure à celle de la terre ; de déposer sur le sol lunaire un sismographe et un réflecteur-Laser qui y fonctionneront l'un un an et l'autre dix, et enfin de rapporter, emprisonnées dans une feuille d'aluminium enroulée comme un parchemin, des particules du vent solaire.
- Phase critique de la mission : décollage du "Lem", à partir de la "mer de Tranquillité", suivi d'une manoeuvre de rendez-vous et d'amarrage avec la "cabine~rnère" qui ramènera les trois hommes sur laTerre.
- Quarantaine : pour éviter tout risque de contamination des terriens par un éventuel micro-organisme lunaire, les cosmonautes seront mis en quarantaine dés leur amerrissage dans le Pacifique. Ils passeront au moins 18 jours dans un laboratoire spécialement construit à cet effet, le "Lunar Receiving Laboratory", dont le coût est évalué à 8 millions et demi de dollars (42 millions et demi de francs français).
"Au nom de toute l'humanité"

New York (de Raymond-Perrot-Minnot).
"Plus qu'une aventure américaine, il s'agit d'une aventure de l'humanité tout entière qui a réuni les trésors de sagesse de son passé pour forger son avenir", déclarait le président Nixon, après le lancement d'Apollo 9, au début de mars.
Pour bien illustrer ce fait, les deux premiers hommes qui débarqueront sur la Lune, le 21 juillet, Neil Armstrong et Edwin Aldrins, déposeront une plaque commémorative portant l'inscription suivante "Ici, des hommes de la planète Terre ont posé pour la première fois, le pied sur la Lune. Nous sommes venus dans un esprit pacifique au nom de toute l'humanité".


Un éventuel habitant de Mars, débarquant à son tour sur la Lune et découvrant cette plaque, à. condition qu'il puisse la déchiffrer, ne manquerait pas de se faire des Terriens l'idée la plus fausse qui soit et de raconter aux Martiens : Les Terriens ont une seule langue, un seul emblème à rayures et étoiles. Ce sont des gens pacifiques et unis, inventifs et désintéressés, qui mettent toute leur énergie à accroître le champ de leurs connaissances.
Il eût été peut-être plus conforme de laisser une plaque disant : Le rêve de nombreux hommes de nombreux pays, un conflit mondial, une guerre froide, entre deux grandes puissances, huit années d'efforts de la part de l'une d'elles, 24 milliards de dollars et l'énergie de 400 000 techniciens ont permis à deux Américains de poser pour la première fois le pied sur la Lune et d'y planter un drapeau américain.

Victoire américaine
Sans les ingénieurs et techniciens allemands ramenés de Peenemunde, sans la guerre froide entre l'Est et l'Ouest, qui a poussé les recherches dans le domaine des fusées, sans le premier "Spoutnik", sans Gagarine, sans la détermination des dirigeants américains de rattraper le temps perdu, la Lune serait demeurée longtemps la "reine des nuits", la muse des poètes et la complice des amoureux.
Dans la mesure où la conquête de la Lune fut une compétition, il est juste que tous ceux qui ont participé à la compétition - et même ceux, plus nombreux, qui comptaient les points - soient associés à la victoire du vainqueur, En ce sens seulement, le président Nixon a pu par1er "d'une aventure de l'humanité tout entière".
La victoire n'en demeure pas moins une victoire américaine et elle confirme, si besoin était, l'immensité des ressources Intellectuelles et matérielles des Etats-Unis, dont la mobilisation et l'organisation affectent à peine la vie normale du pays. Le tait que les astronautes emporteront avec eux sur la Lune des messages des Chefs d'Etat de nombreux pays du monde, les drapeaux de tous les pays membres de l'O.N.U. (qu'ils rapporteront du reste, comme souvenirs) n'est qu'un geste de grand seigneur, ou plutôt d'un beau joueur, parce qu'il entre plus d'esprit sportif que de morgue dans tout ce qu'entreprennent les Américains

L'apport des cerveaux étrangers
C'est dans cet esprit sportif que le président Kennedy avait pris, pour son pays, son pari en mai 1961. Pourtant, quelques mois plus tôt, à son arrivée à la Maison-Blanche, pas plus que son prédécesseur, le général Eisenhower, il ne s'était montré partisan d'engloutir des sommes fabuleuses dans un projet dont il entrevoyait mal les avantages. Mais, entre temps, l'échec de l'expédition de la Baie des Cochons, et surtout le vol de 89 minutes de Gagarine autour de la Terre déterminèrent sa décision. Dans les bagages d'Apollo XI, le drapeau de l'U.R.S.S. et celui de Cuba trouvent ainsi aujourd'hui une place particulière.
La compétition politique des deux "Grands" mise à part, l'apport des autres nations à l'effort américain se réduit exclusivement à celui des cerveaux étrangers. Le plus important est évidemment celui de l'Allemagne - des deux Allemagne, pourrait-on dire - dont les 118 techniciens et ingénieurs ramenés de Peenemunde en 1945 formèrent le noyau et l'âme vivante de la NASA. Cinquante-quatre d'entre eux occupent toujours les postes les plus importants de l'agence spatiale américaine et le rôle décisif de Wernher von Braun clans la mise au point des fusées porteuses est trop connu pour qu'on y revienne. Autres Allemands distingués : Kurt Debus, directeur du centre spatial du Cap Kennedy Ernest Stuhlinger, adjoint direct de Wernher Von Braun, Werner Gengelbach, représentant de la N.A.S.A. à la "North American Rockwell" en Californie, etc.
La Grande-Bretagne, après avoir servi de cible aux lanceurs de fusées de Peenemunde, a vu quelques-uns de ses meilleurs techniciens, plus tentés par les salaires de la N.A.S.A. que part l'esprit d'aventure, déserter la vieille Angleterre au profit des laboratoires de recherche de Houston et du Cap Kennedy.
Pour des raisons linguistiques, il a été également facile à des Ingénieurs ou techniciens australiens ou canadiens de parfaire leurs connaissances dans un domaine où leur pays ne leur offrait aucune possibilité équivalente. Leur apport reste cependant minime, comparé à celui de la colonie allemande.
En dehors du domaine technique des fusées et des vaisseaux spatiaux, la N.A.S.A. a fait appel à la collaboration de nombreux étrangers dans le domaine de l'astronomie. C'est ainsi qu'un savant suisse, M. Johannés Geiss, professeur à l'université de Berne, a mis au point l'appareillage que les astronautes installeront sur la surface lunaire pour permettre l'étude du vent solaire (radiations émises par le soleil dans toutes les direction, mais que ne reçoit pas la Terre, protégée par son atmosphère). Il s'agit d'une longue feuille d'aluminium roulée, qui, une fois déployée, recueillera les traces de gaz tels que l'hélium, le néon, l'argon, le krypton provenant du vent solaire. Les astronautes ramèneront sur terre cet appareil pour permettre à M. Geiss de l'analyser.

L'étude des cailloux lunaires
La N.A.S.A. a également fait appel à 35 géologues étrangers (15 Britanniques, six Canadiens, six Allemands, trois Australiens, deux Japonais, un Belge, un Finlandais et un Suisse) pour participer avec une centaine de leurs collègues américains, à l'analyse des 23 kilos de sol et de cailloux lunaires que les astronautes Armstrong et Aldrin rapporteront de la Lune.
La précieuse cargaison sera transportée par avion du porte-avions chargé de la récupération de la cabine aux laboratoires de recherches lunaires du Centre spatial de Houston, au Texas. Construits il y a quelques années à cette fin, ces laboratoires vont être utilisés pour la première fois pour les examens de ces échantillons. D'autres échantillons seront envoyés aux spécialistes étrangers choisis par la N.A.S.A. pour leur étude minéralogique, pétrologique, radiologique, chimique, spectroscopique et pour la mesure de leurs propriétés thermiques, électriques et magnétiques.
Pour un nombre de plus en plus élevé d'Américains, c'est une fois la Lune conquise que devrait commencer la véritable aventure humaine. Les ambassadeurs que sont les astronautes des dernières expéditions Apollo ne cessent de le répéter et, plus qu'une affirmation, l'inscription de la plaque déposée sur la Lune par Armstrong est un souhait. On répète a l'envi, dans les milieux dirigeants américains, qu'une compétition comme celle qui a opposé les Etats-Unis et l'U.R.S.S. pour la conquête de la Lune est maintenant anachronique. L'espace est beaucoup trop vaste pour demeurer la réserve de deux seuls pays, Et l'on entend de plus en plus souvent parler de coopération plutôt que de compétition. Le seul ennui pour ceux qui prêchent la croisade spatiale en commun c'est que les Etats-Unis ont une avance technologique tellement grande sur ceux des autres pays qui voudraient participer à cette croisade, qu'il en est peu qui pourraient apporter une contribution de poids.
Facteurs interplanétaires

New York.
Les astronautes d'Apollo 11 seront les premiers facteurs interplanétaires de l'Histoire. Au cours de leur visite sur la Lune, Neil Armstrong et Edwin Aldrin vont oblitérer à la main une lettre avec un cachet fourni par M. Winton Blount, ministre américain des Postes, et portant l'inscription suivante : "Atterrissage lunaire U.S.A. 20 juillet 1969"
Ils auront aussi en leur possession une gravure qui, une fois de retour sur terre, servira au tirage d'une émission commémorative spéciale à dix cents. Le timbre, horizontal, montrera un astronaute en train de débarquer sur la Lune à la lumière d'un "clair de Terre".
La lettre, le cachet et la gravure seront, comme les astronautes eux-mêmes, soumis à une quarantaine de trois semaines avant d'être remis aux postes américaines.
Le timbre commémoratif ne pourra donc être mis en circulation qu'à la fin du mois d'août.


Foule et personnalités à Cap Kennedy

Cap Kennedy, 16 juillet.
Plus d'un million de personnes, dont 5.000 personnalités spécialement invitées pour la circonstance par le gouvernement américain et la N.A.S.A., ont assisté "en direct" au lancement d'Apollo11 vers la Lune. 300.000 voitures et 3.000 bateaux de plaisance les avaient amenés pour assister à ce qui est considéré partout comme "l'événement du siècle".
Le monde entier verra certes les différentes phases du "vol" mais ceux qui étaient au "Cap" ont voulu "être des témoins", voir Saturne V s'arracher à la terre et s'élancer dans le ciel en emportant Neil Armstrong, Edwin Aldrin et Michael Collins.
Parmi l'es personnalités qui ont assisté au départ de la fusée dans des tribunes spécialement aménagées à plus de 5 km. de la tour de lancement, se trouvaient le vice-président des Etats-Unis, M. Spiro Agnew, l'ancien président des Etats-Unis, M. Lyndon Johnson, ainsi que de nombreux ministres des affaires scientifiques de divers pays, des savants et des hommes politiques du monde entier. Des avions avaient été spécialement affrétés pour les conduire jusqu'au Cap Kennedy.
On a toutefois noté qu'il n'y avait aucun représentant de l'union Soviétique, M. Dobryfline, ambassadeur d'Union Soviétique à Washington, qui avait été invité à Cap Kennedy et avait accepté l'invitation, est actuellement dans son pays où il a été appelé en consultation par son gouvernement.
Quant aux familles des astronautes, elles n'étalent pas toutes à Cap Kennedy. Seuls Janet Armstrong et ses deux enfants, Erlc. 12 ans, et Mark, 6 ans, ont vu en direct leur époux et père partir vers la Lune. Mmes Aldrin et Collins ont préféré quant à elles voir à la télévision partir leur maris dans le calme de leurs maisons de Houston, en compagnie de leurs enfants. Toutes deux, grâce à un poste de radio spécial, ont pu suivre le compte à rebours et entendre le "go" final. Autour d'elles, pour les soutenir dans ce moment angoissant, se trouvaient des amies, femmes d'astronautes ayant déjà participé à des vols spatiaux ou désignés pour les missions à venir.
Neil Armstrong, Edwin Aldrin et Michael Collins ont déjà participé à des missions spatiales, lors de vols Gemini, mais la mission Apollo 11 représente beaucoup plus.

Cette photographie à double exposition réunit sur une même image la cabine Apollo 11 et la Lune. Elle a été prise à Cap Kennedy. (A.P.)
Le départ d'Apollo 11.


Extrême précision du départ

Cap Kennedy, 16 juillet.
Apollo-11 a été mis sur une orbite circulaire circumterrestre, à une altitude de 190,75 kilomètres a déclaré M. Rocco Petrone, directeur des opérations de lancement au Cap Kennedy, une heure et demie après le départ du "train spatial" vers la Lune.
M. Petrone a souligné, au cours d'une conférence de presse, l'extrême précision du déroulement de la première phase du vol. L'énorme fusée Saturne-5, a-t-il ajouté, a décollé avec 724 millièmes de seconde de retard sur l'heure prévue (9 h. 32 locales).


Il a en outre évoqué deux difficultés minimes qui ont surgi avant et après le lancement : une fuite dans une canalisation d'hydrogène liquide, rapidement jugulée, et un petit problème de communication au début du vol.
Sur l'aire "39 A" de "Moon-port", l'embarcadère pour l'a Lune, 35.000 hectares de marécages et de forêts devenus le plus gigantesque complexe spatial du monde, la séquence habituelle des lancements du programme Apollo s'est déroulée dans ses moindres détails avec une parfaite régularité.
Neil Armstrong a fait preuve d'une parfaite maîtrise de soi, tant dans les minutes qui ont procédé le départ qu'au cours de celles qui l'ont suivi.
Douze minutes après leur départ, un signal les avertit : leur engin, comme prévu, s'est bien placé sur l'orbite terrestre de stationnement, Les coordonnées en sont très proches de celles prévues par les experts de la N.A.S.A. : apogée 165 kilomètres et périgée 160 kilomètres,
Armstrong l'apprend avec la froideur du monsieur qui en verra d'autres : "Le propulseur, dit-il, est bon pour le vol orbital. Tout va bien". Le troisième étage de la fusée a répondu parfaitement à la commande de la mise à feu.
Aussitôt après, les centres spatiaux du Cap Kennedy et de Houston, au Texas, ont confirmé que tous les appareils du bord fonctionnaient normalement. Pendant deux heures et demie, Armstrong et ses camarades Aldrin et Collins ont gravité autour de la Terre.

Trajectoire 'Terre-Lune
Apollo-11 a réussi brillamment la manoeuvre d'insertion sur sa trajectoire cislunalre.
Cette manoeuvre s'est déroulée exactement dans les conditions prévues, à la plus grande satisfaction de l'équipage et du sol.
A 12 h 16 (16 h 16 GMT), Armstrong a mis le feu au troisième et dernier étage de la fusée porteuse. Il a ainsi arraché le " train spatial" à la gravité terrestre. Le moteur de la fusée a fonctionné pendant cinq minutes vingt secondes. Au moment de l'allumage Apollo-11 volait à la vitesse horaire de 28.100 km-h. Quand le propulseur s'est arrêté, les trois hommes volaient à 39.030 km-h.
Apollo-11 s'est séparé, à 12 h 47 (16 h 47 GMT) du troisième étage de la fusée porteuse, enserrant, à l'une de ses extrémités, le "module lunaire " de débarquement.
La séparation a été suivie d'une manoeuvre de transposition, à l'issue de laquelle la cabine-mère, ayant opéré un virage de 180 degrés sur elle-même, a orienté son nez en direction de l'écoutille supérieure du "Lem".
Puis, se rapprochant avec lenteur de son objectif, le pilote Michael Collins a arrimé, vers 13 h (17 h GMT), la cabine "Columbia" à la tête de l'"Aigle". Les deux véhicules, placés sur trajectoire cislunaire, son maintenant solidement accrochés l'un à l'autre. Par le boyau qu'ils pourront ouvrir désormais entre les deux éléments du convoi spatial, Neil ,Armstrong et Edwin Aldrin pénétreront, vendredi, à l'intérieur du "Lem", afin de vérifier sur place si tout l'appareillage de la chaloupe de débarquement est en parfait état de fonctionnement.



"Un bon voyage"
Le train spatial se trouvait, au moment de cette manoeuvre, à la verticale de l'Australie.
"Un voyage magnifique, un bon voyage" a déclaré l'équipage d'Apollo 11, quelques secondes parés s'être inséré sur sa trajectoire.
Ces quelques mots, dits d'un ton laconique, ont été les premières exclamations des astronautes qui, jusque là, s'étaient simplement contentés d'échanger des informations techniques avec le centre spatial de Houston. Contrairement à leurs prédécesseurs, ils n'avaient pas fait de commentaires et ne s'étaient pas extasiés sur la beauté de la vue qui s'offrait a leurs regards depuis leurs hublots.
"Je peux voir maintenant, par mon hublot l'ensemble du continent américain, l'Alaska, le Pôle et vers là-bas le Yacatan, Cuba, la partie Nord de l'Amérique du Sud, et je n'ai pas assez de fenêtre pour en décrire davantage". Cette communication a été faite par Armstrong.
Vers 13 h. 45 (17 h. 45 GMT), l'équipage d'Apollo 11 a mis à feu le dernier étage de Saturn. Il a extrait le "module" et écarté définitivement de sa route le troisième palier de la fusée porteuse qui s'est inscrit sur une orbite solaire.

Trajectoire parfaite
Le Centre spatial de Houston a officiellement annoncé mercredi, peu après 20 h. GMT, que la première correction de trajectoire qui était prévue pour 1 h. 16 GMT et avait été reportée à 1 h. 22 (GMT) avait été définitivement annulée, la trajectoire suivie par le "train spatial" Apollo 11 étant parfaite.
Une correction de trajectoire sera éventuellement faite jeudi, en fin de matinée.
Alors que le train spatial se trouvait à environ 48.200 km de la Terre, Armstrong a déclaré que s'il n'avait guère décrit le paysage aperçu par l'équipage depuis son départ, c'était en raison des opérations de navigation auxquelles le contraignait le plan de vol,

Echec d'une émission de télé en couleur
Alors qu'ils se trouvaient à quelques 72.000 km de la Terre, à 21 h. 32 (GMT), les trois astronautes ont essayé d'envoyer les premières images de télévision en couleurs à la Terre. Celles-ci n'ont pu être captées par les stations de réception et les responsables, notamment ceux de Goldstone (Californie), tentent de déterminer les raisons de cet échec. Cette émission n'était d'ailleurs pas prévue au programme.
La première émission de télévision du "train spatial" est fixée à jeudi soir.

Apollo 11 sur la trajectoire "Terre-Lune"

"Un voyage magnifique, un bon voyage" a déclaré l'équipage après s'être inséré sur la trajectoire cislunaire.
Tout est parfait.
Pas de correction avant jeudi, fin de matinée.

Cap Kennedy (Floride), 16 juillet (d'un des envoyés spéciaux de l'A.F.P., Serge Berg).
J'ai vu partir les premiers hommes qui fouleront, lundi le sol de la Lune, Devant moi, à cinq kilomètres à peine, distance minimum à laquelle ont pu s'approcher les journalistes de l'embarcadère lunaire, le fameux "Pad 39A", J'ai vu décoller majestueusement la fusée géante "Saturne-5".

En son sommet, dans le vaisseau Apollo dont le module de commande et le module de service ont été baptisés "Columbia" et le module lunaire "Aigle", avaient pris place, deux heures avant la mise à feu, Neil Armstrong, le commandant de l'expédition Terre-Lune et retour.
Edwin Aldrin, qui pilotera le module lunaire à bord duquel lui et Armstrong se poseront sut la Lune, et Michael Collins, le pilote du module de commande qui tournera autour de la Lune pendant que ses deux compagnons resteront 21 heures et 27 minutes à la surface de la "mer de tranquillité". La durée totale de la mission sera de 8 jours, 3 heures et .14 minutes,
Ce matin, ici à Cap Kennedy, sur la côte atlantique, à 9 h. 32 locale précises (alors qu'il était 13 h. 32 à l'heure universelle, 14 h. 32 de l'après-midi en Europe Occidentale) a commencé le voyage le plus prodigieux de l'histoire. Trois hommes ont quitté la planète Terre pour aller se poser sur un autre corps céleste, al Lune, certes le plus proche de la Terre mais distant tout de même de près de 400.000 kilomètres.
Si tout se déroule bien, c'est tôt lundi matin, à 6 h 21 GMT, que Armstrong posera le pied sur la Lune. Le rêve caressé depuis toujours par l'homme deviendra réalité,
La terre a tremblé à des kilomètres à la ronde, secouant la tribune de presse comme un château de cartes lorsque les cinq moteurs du premier étage de la fusée Saturne V ont commencé à fonctionner, chacun avalant quelque trois tonnes d'oxygène liquide et de kérosène à la seconde. Un véritable soleil est apparu au pied de la fusée, aussi aveuglant que celui qui brillait dans le ciel assez dégagé de la Floride, faisant fondre en partie - malgré un déluge d'eau de 190,000 litres à la seconde - le radier, épaisse plaque d'acier posée sur le pas de tir. Une épaisse fumée noire s'éleva pendant quelques secondes en éventail, enveloppant la rampe de lancement.
Jules Verne, dont on ne peut s'empêcher d'évoquer aujourd'hui le souvenir a écrit dans son fameux roman "De la terre à la Lune" que la détonation du canon qui propulsa ses trois héros vers la Lune fut telle que "pas un spectateur n'était resté debout : hommes femmes, enfants, tous furent couchés comme des épis sous l'orage".
La technique a heureusement progressé depuis un siècle et malgré le rugissement assourdissant des moteurs de Saturne, développant la puissance extraordinaire de 3,420 tonnes, rien de pareil peut risquer d'arriver aux centaines de personnalité venues assister au spectacle, ni aux milliers de journalistes présents. Les touristes, les curieux, hommes, femmes, enfants, blancs et noirs, sont venus par centaines de milliers voir le départ d'Apollo.

"Le monde entier vous regarde
"Apollo 11,t le monde entier vous regarde, braves voyageurs de la Lune." On pouvait lire ces mots ce matin sur une immense banderole tendue sur la façade du "Cape Colony", l'hôtel qui fut ouvert, Il y a sept ans, à Cocoa Beach, prés du cap, par les cosmonautes de Gemini qui, après ceux de Mercury, ont posé les premiers jalons vers la Lune, montrant que l'homme pouvait vivre et travailler dans l'espace.
Grâce à la télévision et aux satellites de télécommunications, plus d'un milliard d'hommes ont pu assister en direct au départ des astronautes américains et ils pourront les voir atterrir et travailler sur la Lune. Même Jules Verne n'avait pas prévu cela,
Le président Richard Nixon a proclamé jour férié le lundi 21 juillet, jour où les astronautes poseront le pied sur la Lune.
Le vol d'Apollo 11 - Première correction de trajectoire réussie - Tout va bien à bord

Centre spatial de Houston (Texas), 17 juillet.
Apollo-11 poursuit sa route vers la Lune. Le voyage se déroule sans incidents. L'attelage spatial a déjà franchi la moitié du trajet et fonce vers son but en une trajectoire en tous points conforme au plan de vol.
Apollo.11 a effectué avec succès, à 12 h. 17 (16 h. 17 G.M.T.), la première correction de trajectoire sur le parcours Terre-Lune.
Le propulseur principal de la cabine a é té actionné pendant trois secondes, accélérant ainsi de 25 km/h. la vitesse de l'habitacle inscrit sur sa trajectoire cislunaire.
Cette accélération a pour but de placer le train spatial exactement sur la trajectoire qui le fera passer, samedi, à quelque 111 kilomètres de la surface lunaire et de l'insérer sur l'orbite lunaire adéquate eu vue des manoeuvres qui précéderont l'alunissage du "Lem" dimanche, sur la "Mer de Tranquillité".
Si la correction de tir n'avait pas été effectuée, c'est à 323 km d'altitude que le convoi spatial Apollo-11 - Module lunaire serait entré dans la "grande banlieue" lunaire, ce qui aurait obligé l'équipage à effectuer des changements d'orbite non prévus par le plan initial de la N.A.S.A.
L'équipage a procédé là à la seule tâche importante qui lui était assignée pour la journée de jeudi, la seconde de leur voyage, journée calme par excellence, réservée seulement a des expériences de navigation et de repérage d'étoiles.

Petit déjeuner
Après douze heures de vol et après avoir parcouru prés de 100,000 kilomètres de leur longue route vers la Lune, les astronautes ont reçu la permission de se coucher deux heures plus tôt que prévu, à 21 heures, heure du centre de contrôle au sol de Houston (jeudi 1. h GMT) parés avoir pris leur premier dîner à bord du vaisseau spatial, au menu : salade de saumon, poulet au riz, gâteaux secs, cacao, jus d'ananas et de pamplemousse.
Avant de dîner, le commandant de bord avait réussi, après un premier essai négatif (à cause de problème d'antennes au sol) à retransmettre à la station de repérage de Goldstone, en Californie. des images télévisées en couleur de la terre,
A deux heures locales (6 h GMT), le train spatial approchait du Cap des 160.000 km dans sa progression vers la Lune. Le centre de contrôle au sol avait remarqué plus tôt qu'un évent à oxygène servant à l'évacuation d'eau de la cabine dans l'espace marquait une défaillance.
La deuxième journée a commencé à une heure raisonnable, Il était 8 heures (12 h GMT) passées quand les trois hommes se sont réveillés. Armstrong et ses deux compagnons ont eu, au petit déjeuner, des saucisses accompagnées de toasts à la cannelle, le tout arrosé de chocolat et de jus de pamplemousse.

"Journal parlé pour les astronautes"
Centre spatial de Houston, 17 juillet. - Un premier journal parlé a été lu ce matin à l'équipage d'Apollo 11 par Bruce McCandless, l'astronaute de service au sol.
C'est ainsi que Neil Armstrong et ses deux compagnons ont eu les dernières informations concernant la station automatique soviétique Luna 15, placée sur une orbite lunaire et qui pourrait, selon certains, alunir vendredi matin.
Autre nouvelle Intéressant les trois astronautes : la proposition du vice-président des Etats-Unis, M. Spiro Agnew, en tant que président du conseil national de l'aéronautique, que les Etats-Unis se fixent, comme objectif d'avenir dans l'exploration du cosmos, le débarquement sur Mars, la "planète rouge", avant la fin du siècle,
Cependant, toutes les nouvelles du journal ne concernaient pas l'espace : l'équipage d'Apollo 11 a ainsi appris qu'au Mexique les cheveux longs n'étaient pas tolérés et que les "hippies" venant des Etats-Unis devraient passer chez le coiffeur avant de franchir la frontière,
"Nous aussi, nous nous sommes fait couper les cheveux avant de partir", a rétorqué Michael Collins, montrant ainsi qu'après une bonne nuit de repos, l'équipage était de très bonne humeur.
Des nouvelles sportives, du football américain notamment, ont également été données aux astronautes.

Une vue fantastique
"C'est une vue vraiment fantastique que j'ai à travers le sextant", a déclaré, jeudi matin, Michael Collins, qui procédait à de nouvelles observations de navigation à partir des étoiles.
"L'oculalre balaie toute la Méditerranée. On peut voir toute l'Afrique du Nord, Le Portugal, l'Espagne, le Midi de la France sont absolument clairs. L'Italie l'est aussi. C'est vraiment une vue magnifique", a ajouté le pilote de la cabine,
A 16 h. 32 (20 h. 32 GMT) le "train spatial" se trouvait à 224.395 km (139.300 milles) de la terre de laquelle il continuait à s'éloigner à la vitesse décroissante de 5.071 km à l'heure.
La NASA a annoncé qu'Apollo 11 passerait l'équigravisphère - celle où l'attraction terrestre s'équilibre avec celle de la Lune - 61 h. 39 après son lancement du Cap Kennedy, soit vendredi à 23 h. 11 (samedi à 3 h. 11 GMT).

Les astronautes avares de paroles
Comme ce que l'on sait d'eux le laissait prévoir, Armstrong, Aldrin et Collins sont toujours avares de paroles.
Collins a rapidement décrit dans la matinée le paysage que la terre lui offrait depuis la cabine spatiale, Ses compagnons sont moins bavards encore,
Comme on l'interrogeait sur ce qu'il ressentait en état d'apesanteur, Aldrin a répondu : "Eh bien, je peux vous dire que je suis comme une balle qui flotte dans tons les sens, ici, à l'intérieur. C'est comme dehors, sauf que c'est plus confortable". Il faisait allusion à sa sortie dans le vide pendant cinq heures et demie - en trois fois- pendant le vol de Gemini 12 en novembre 1966.

Dernière minute

Les astronautes américains pourraient mettre le pied sur la Lune trois heures et demi environ plus tôt que prévu, a annoncé le directeur du vol Apollo 11,
S'il en était ainsi, l'événement aurait donc lieu lundi à, trois heures (GMT) et non pas â l'heure prévue, vers six heures vingt (GMT).

Médailles sur la Lune en hommage aux cosmonautes disparus

Washington, 17 juillet.
Le président Nixon a annonce que les astronautes déposeront sur la surface de la. Lune les médailles qui avaient été décernées à deux cosmonautes soviétiques morts en "service spatial".
Le président des Etats-Unis a précisé que ces médailles avaient été confiées à l'astronaute américain Franck Borman, au cours de son récent voyage en U.R.S.S., par les veuves de Youri Gagarine (tué dans un accident d'avion) et de Vladimir Komarov (mort au retour d'une mission spatiale). A. son retour aux Etats-Unis, Frank Borman les a tait parvenir, par l'intermédiaire de la N.A.S.A. aux membres de l'équipage du vol Apollo-11.
En même temps que les médailles soviétiques, Armstrong et Aldrin déposeront sur la "Mer de Tranquillité" les médailles reçues à titre posthume par les trois astronautes américains qui périrent, le 27 janvier 1967, au Cap Kennedy, dans l'incendie de la cabine Apollo2, survenu au cours d'une séance d'entraînement : le colonel Virgil Grissom, le capitaine de corvette Roger Chaffee et le colonel Edward White.

La carte de I'O.N.U. n'ira pas sur la Lune

Nation-Unies (N.Y.), 17 juillet.
La carte postale de l'O.N.U. n'arrivera jamais sur la Lune. L'administration nationale de l'espace et de l'aéronautique a fait savoir mercredi soir à l'O.N.U. que la carte postale symbolique portant le préambule de la charte et la reproduction de sept timbres émis par l'O.N.U. avec l'emblème et le drapeau de l'organisation internationale n'avait pu être placée à bord de la capsule d'Apollo 11.
La N.A.S.A. a expliqué cette décision par le fait que la carte postale en carton plastifié n'avait put être désinfectée et qu'en outre, aucune charge supplémentaire, aussi minime soit-elle, ne pouvait être mise à bord du vaisseau lunaire, dont le poids a été calculé au milligramme près.
Les astronautes ont emporté un drapeau de l'O.N.U. qui ne sera pas déposé sur la Lune mais remis aux Nations Unies à leur retour. Seul le drapeau américain sera déposé sur la Lune.
Apollo se rapproche de la Lune

A 13 h. 30 (17 h. 30 G.M.T.), ils ont déjeuné de bouillon de poulet, suivi de dindon rôti en sauce, de biscuits au fromage, le tout arrosé de jus de fruits.

Aldrin dans le module
Edwin Aldrin, le pilote du module lunaire, a pénétré à 16 h. 43 (20 h. 43 GMT) dans le boyau reliant la cabine Apollo 11 au module lunaire.
Muni d'une torche électrique, on a pu l'apercevoir nettement sur les écrans de télévision de la N.A.S.A., inspectant le système d'attache des deux véhicules avant de l'ouvrir.
Aldrin a manipule une sorte de clef à molette pour ouvrir le système d'attache et dégager le boyau. Cette opération a été retransmise en couleurs sur les écrans de télévision de la salle de presse de Houston. Le travail d'Aldrin ne paraissait pas très aisé. Le boyau est étroit (81 centimètres de diamètre) et l'astronaute travaillait couché sur le dos, la tête tournée vers l'écoutille du "Lem".
Aldrin a enlevé ensuite les griffes qui fixaient le dispositif d'amarrage de la cabine-mère, Ces griffes ressemblent à une pince à sucre géante. Aldrin les a repliées pour les passer à l'un de ces coéquipiers. Le boyau était enfin dégagé. Au centre de l'écran de télévision, on a aperçu un trou jaune, l'ouverture de l'écoutille du "Lem".
Travaillant dans l'apesanteur, les trois hommes sont apparus dans des positions étranges.
Aldrin a réapparu ou plus exactement ses mains. Il a "palpé" le pourtour du collier de fixation entre les deux éléments du train spatial. Pendant l'expérience Apollo 10, un léger déplacement de ce collier avait fait craindre que Thomas Stafford et Eugéne Cernan ne puissent effectuer le rendez-vous avec la cabine-mère, après avoir survolé la Lune à moins de 15 km d'altitude.
A 17 h. 15 (21 h. 15 GMT). Edwln Aldrin a pénétré dans le module lunaire. Il a inspecté chacun des tableaux de bord, posé la main sur les deux harnais de survie qui serviront aux conquérants de la Lune. Aldrin portait des lunettes de soleil. L'intérieur du "Lem" était tout gris. La caméra maniée par Collins ou Armstrong permettait aux contrôleurs de distinguer nettement les deux "yeux" triangulaires de l'"Aigle".
Aldrin a déclaré que le module était en parfait état de propreté. Propulsant dans l'apesanteur qui règne entre les deux cabines un sachet de cartes, Aldrin les a passées à ses coéquipiers.
Le "Lem" semble fin prêt pour dimanche.

Apollo à la Télé

Paris, 18 juillet.
Le service de presse de I'O.R.T.F. communique :
" Dimanche 20 juillet, sur la première chaîne, à 23 h. 15 : "Télé-Nuit" jusqu'à l'atterrissage sur la Lune suivant les décisions de la N.A.S.A.. (programme commun avec la deuxième chaîne).
Deuxième chaîne : avant ce "Télé-Nuit' de 23 h. 15 commun avec la première chaîne, à 23 heures court métrage".
L'Actualité Télévisée communique :
"En fonction de nouvelles informations qui nous sont parvenues de la N.A.S.A., l'expérience des astronautes sur le sol lunaire pourrait être avancée de quelques heures dans le courant de la nuit du dimanche 20 au lundi 21 juillet. Dans ce cas, la télévision présenterait sur la première et sur la deuxième chaîne un programme qui permettrait, quelle que soit l'heure "des premiers pas de l'homme sur la Lune", à tous les téléspectateurs, d'assister en direct à cette extraordinaire aventure.
Ces images de la nuit seront radiodiffusées sur nos deux chaînes à partir de 7 heures du matin, lundi, à l'intention des téléspectateurs qui n'auraient pu assister au direct dans le courant de la nuit.
St toutefois l'opération sur le sol lunaire devait avoir lieu à 7 h. 32, comme cela avait été prévu dans le premier programme de la N.A.S.A., les téléspectateurs pourraient y assister entre 6 h. 30 et 10 h., sur les première et deuxième chaîne, lundi matin."
Le module lunaire

Houston
Le module lunaire est le véhicule le plus compact du monde. Le "Lem" pèse 16 tonnes seulement, dont 12 de carburant, mesure 6,93 m de hauteur, 9,4 m de diamètre, toutes pattes déployées, et son volume habitable n'atteint que 4,5 mètres cubes.
En forme de toupie octogonale, hérissé d'antennes, prolongé par quatre pattes articulées, revêtu de minces feuilles d'aluminium superposées n'ayant pas plus de 4 mm d'épaisseur, le "Lem" se compose de deux paliers :
- Un palier de descente comportant un moteur très maniable qui dégage une poussée de 4.380 kg et agit comme un frein. Ce palier, qui servira de rampe de lancement au palier de montée, sera abandonné sur la Lune.
- Un palier de montée, relié par des boulons explosifs à l'étage inférieur qui possède un moteur d'une poussée fixe de 1.589 kg, qui servira à arracher le module du sol lunaire. Dans ce palier est situé l'habitacle des deux astronautes, à peine plus grand qu'une cabine téléphonique (2,33 m sur 1,06) et dépourvu de tout siège. Cependant, il est doté de l'appareillage de bord le plus perfectionné, le plus miniaturisé ; un million de pièces détachées.
Aldrin a inspecté hier soir le module

Centre spatial de Houston (Texas), 18 juillet.
Le président Richard Nixon parlera peut-être à Armstrong et à Aldrin au moment où ils fouleront le sol de la Lune,
Cette rumeur, toujours non confirmée par la Maison-Blanche, a été révélée par le "New York Times" et le "Washington Post" au moment où les astronautes d'Apollo-11 se sont couchés, jeudi, vers 22 h. 30 (vendredi 2 h. 30 G.M.T.), après une journée sans péripéties au cours de laquelle ils ont procédé à une légère correction de trajectoire et effectué, dans la soirée, une émission de télévision en couleurs.
Au moment où ils ont dit bonsoir à Houston, ils se trouvaient à 256.000 kilomètres de la terre. En se réveillant dix heures plus tard, c'est-à-dire vendredi à 8 h. 30 (12 h. 30 G.M.T.), ils se trouveraient à 293.000 kilomètres de notre planète.
Au cours de leur émission, les astronautes ont montré des vues de la terre et ont fait visiter l'intérieur de leur cabine spatiale aux téléspectateurs.
Les trois astronautes ont pris leur petit déjeuner, composé de pêches, de bacon, de céréales aux abricots, accompagné de jus de raisin et d'orange, en écoutant un journal parlé préparé à leur intention par le Centre spatial.
La mise sur orbite lunaire

Samedi, Apollo 11 s'est placé sur une nouvelle orbite lunaire.
A la suite de l'allumage, pendant 17 secondes, du propulseur principal de la cabine de service, à 17 h. 44 (21 h. 44 GMT), le train spatial s'est détaché de l'orbite elliptique sur laquelle il évoluait depuis 13 h. 28 (17 h. 28 G.M.T.).
Le ralentissement subi par l'engin a été de l'ordre de 175 km à l'heure, Cette décélération a permis à Apollo 11 de s'inscrire sur une orbite quasi circulaire.
La manoeuvre de l'équipage s'est déroulée alors que l'engin se trouvait au-dessus de la face cachée de la Lune, toutes communications radio provisoirement interrompues avec la Terre, Il a fallu attendre que le train spatial reparaisse, à 18 h 05 (22 h 05 GMT), au-dessus de la face visible de la Lune pour obtenir confirmation de l'allumage et, en conséquence, de la ligne orbitale suivie à présent par Apollo 11 autour du satellite naturel de la terre.
C'est Neil Armstrong lui-même qui a communiqué la bonne nouvelle au centre de contrôle de Houston où elle a été accueillie avec une vive satisfaction.
L'engin a commencé alors autour de la Lune une longue ronde qui n'a pris fin qu'avec la séparation du "module lunaire", dimanche,
La mise sur orbite lunaire, samedi après-midi, de Neil Armstrong, Edwin Aldrin et Michael Collins, a été observée, depuis le centre de contrôle de Houston, par une brochette de cosmonautes américains. John Glenn, premier Américain a avoir été envoyé sur orbite terrestre, le 20 février 1952, était là. Thomas Stafford et Eugene Cernan, qui en mai dernier gravitèrent autour de la Lune à moins de 15 km d'altitude:, étaient également présents ainsi que David Scott, membre de l'équipe Apollo 9.
Les suppléants d'Apollo 11, William Anders, James Lowell (qui effectuèrent, à bord d'Apollo 8 le premier vol circumlunaire) et Fred Haise, étaient aussi au rendez-vous.
Il avait d'ailleurs été prévu que toute la mission d'Apollo 11 serait suivie, depuis Houston, par la plupart de ceux qui avaient effectué les vols Apollo précédents afin qu'ils puissent faire bénéficier Neil Armstrong et ses coéquipiers de leur expérience et répondre, éventuellement, à leurs questions en cas d'incidents.
Images en couleurs de la surface de la Lune

Centre Spatial de Houston, 20 juillet.
Les images en couleurs de la surface de la Lune transmises samedi après-midi par Apollo-11 ont été les plus nettes reçues à ce jour par le Centre Spatial de Houston.
Neil Armstrong a expliqué que le hublot qu'il avait choisi pour braquer sa caméra sur la Lune était, celui par lequel il pouvait obtenir le meilleur contraste des teintes.
"Vue de ce côté, la Lune a un teint rose alors que, par les autres hublots, elle semble grise ou brunâtre".
Au début de l'émission, qui a duré an tout 32 minutes, soit peu prés le double du temps prévu, l'image a bougé un bref moment, empêchant les téléspectateurs de fixer leurs regards sur les points de repère annoncés par les astronautes,
Armstrong a indiqué, à cet Instant, que le train spatial pivotait sur son axe et qu'un petit réglage allait bientôt le stabiliser et en faire pointer le nez, c'est-à-dire le module lunaire, à la verticale de la Lune.
Quelques instants plus tard, l'image, toujours d'une netteté parfaite, se déroulait comme un film tourné au ralenti, pendant qu'Armstrong, très détendu, indiquait au Centre Spatial de Houston les points de repère qu'il apercevait, tout en faisant jouer le "zoom télescopique" pour faire apparaître des gros plans des endroits qu'il survolait.

Nombreux commentaires
Les astronautes ne se sont pas lassés de faire des commentaires, à mesure qu'ils reconnaissaient les endroits photographiés par les deux Apollo qui les avaient: précédés autour de la Lune et auxquels des noms avaient déjà été donnés.
" Voici la nationale numéro 1" (crevasse qui, de la hauteur de quelque 150 km à laquelle ils se trouvaient, ressemble à une autoroute).
"Voici la mer de fertilité... la mer des crises.., et voilà le mont Marilyn" (nommé en l'honneur de la femme de James Lovell, second du vol Apollo 8).
"Nous nous trouvons à présent au sud-ouest du cratère Nepler... Là-bas, en haut et à gauche de votre écran, ce grand cratère, c'est un très hideux cratère. On dirait qu'il est entouré de craie... et là bas, en haut, à droite, voici toute une chaîne de jeunes cratères, on les distingue très nettement".
L'émission rappelait un documentaire touristique et les astronautes, toujours conscients de l'heure jusqu'à ce moment, ne se rendaient apparemment plus compte que les minutes passaient.

Apollo au-dessus du cratère Aristache
Les cosmonautes sont passés au-dessus du cratère Aristache, situé dans la partie nord-est de la face visible de la Lune. C'est dans cette région, que certains savants pensent être volcanique, que de nombreux astronomes ont aperçu des taches brillantes, L'équipage a, lui aussi, remarqué ce phénomène. "Il semble qu'il y ait là une sorte de fluorescence, a déclaré Armstrong, la région du cratère brille". "Cette région est sans discussion plus brillante que quoi que ce soit d'autre en vue, a ajouté Aldrin, mais il ne semble pas qu'elle ait une couleur définie".
Le cratère mystérieux se trouve nettement au nord de la mer de la tranquillité.
"La mer de la fertilité ne me semble pas très fertile. Je ne sala pas qui a bien pu lui donner ce nom", s'est exclamé Armstrong,
Auparavant, l'équipage avait signalé que le nez de l'attelage - la partie où se trouve le "LM" donc - avait tendance à pointer vers la Lune et avait laissé entendre que ce phénomène pourrait être provoqué par l'influence des noyaux magnétiques dispersés sous la croûte lunaire, les "Mascons". Houston n'a pas manifesté d'émotion et s'est borné à répondre aux astronautes : "C'est exactement ce pour quoi le "Lem" est conçu".

Houston, 20 juillet.
Dimanche 20 juillet, le "jour J" est arrivé. Après une nuit de repos que leur horaire avait fixée à neuf heures, mais que l'inquiétude a réduite à environ six heures, Edwin Aldrin, puis Neil Armstrong ont pénétré, dimanche matin, dans le module lunaire, le premier à 9 h. 17 (13 h. 17 GMT), le second une heure plus tard.
L'indicatif radio de la cabine-mère est devenu "Coiumbia', celui du module "Aigle".
Au réveil le centre de Houston a communiqué aux astronautes les nouvelles de la Terre et leur a lu une légende rapportée par un journal : "Une ancienne légende vent qu'une jolie Chinoise, nommée Chang O, vive sur la Lune depuis 4.000 ans, où elle a été bannie perce qu'elle avait volé à son mari la pilule de l'immortalité". Les contrôleurs au sol ont ajouté : "Vous feriez bien d'avoir l'oeil sur son compagnon, un gros lapin chinois qui se tient sur ses pattes de derrière, à l'ombre d'un arbre à cannelle."

"L'Aigle" déploie ses pattes
L'Aigle a déployé ses pattes dans le ciel lunaire.
Première manoeuvre importante du "jour J" de la découverte de la Lune à 12 h. 23 (16 h. 23 GMT), Armstrong et Aldrin, après avoir constaté que tout fonctionnait parfaitement à bord du "module lunaire", ont actionné le dispositif de déploiement du train d'alunissage. Le colonel Collins a constaté, en même temps que ses deux camarade, en station debout dans l'habitacle exigu du "LEM" que l'opération s'était déroulée parfaitement et que le train d'alunissage, ses articulations figées, était en état d'affronter la descente sur la Lune.

La séparation
La première "minute de vérité" de la mission s'est jouée à 13 h. 47 (17 h. 47 GMT), alors que l'attelage commandé par Armstrong se trouvait au-dessus de la face cachée de la Lune et que toutes les communications radio avec le sol étaient coupées. Il a fallu attendre quatre minutes pour rétablir le contact avec les deux cabines spatiales et apprendre que le décrochage avait bien eu lieu.
A leur réapparition au-dessus de la face visible du satellite naturel de ta Terre, les deux engins étaient à une vingtaine de mètres l'un de l'autre. De la cabine principale, Collins confirmait au centre de contrôle que la manoeuvre avait parfaitement réussi et qu'il se livrait à l'inspection visuelle du "module lunaire", à travers un hublot de "Columbia".
L'inspection terminée, à 14 h. 12 (18 h. 12 GMT), Collins a prit ses distances en actionnant le propulseur principal de la cabine de service.
Dés la reprise du contact avec le sol, le commandant de la mission, enfermé avec Aldrin dans l'habitacle de la chaloupe de débarquement, s'est écrié triomphant : "l'Aigle a des ailes."
Alors que Collins, à bord de "Columbia", inspectait visuellement, après la séparation, l'Aigle de ses camarades. On a pu l'entendre taire le commentaire suivant : "Vous avez là une bien belle machine à voler.",
Peu après la séparation, alors que les deux véhicules spatiaux se trouvaient à quelque trois kilomètres l'un de l'autre pour mieux pouvoir manoeuvrer indépendamment sans risque de collision, Collins a dit à ses coéquipiers : "A plus tard."
Armstrong a répondu sur un ton tout aussi décontracté : "Oui. Tu n'as qu'à suivre la nationale un."
Les deux engins se trouvaient alors à la verticale d'une très longue et mince crevasse qui, vue de l'altitude à laquelle ils se trouvent, ressemble à une autoroute. Elle avait été baptisée "Nationale n° 1" par les astronautes des deux vols précédents autour de la Lune.

La descente
Dés reprise du contact radio avec le "LEM", la N.A.S.A. a confirmé que les deux hommes avaient pu actionner le moteur du palier de descente de leur engin à 15 h. 05 (19 h. 05 G.M.T), ce qui a eu pour effet de ralentir sa vitesse de 23 mètres-seconde et de l'inscrire sur une orbite elliptique dont le pericynthion se situait à 15.000 mètres au-dessus de la surface lunaire.
A 15 h. 55 (19 h. 55 G.M.T.), le "LEM" se trouvait à 25 kilomètres de la surface de la Lune.
"C'est un bon départ, gardez votre sang-froid", a dit à Armstrong et Aldrin le Centre de contrôle de Houston.
La phase d'alunissage de "LEM" proprement dite a commencé à 16 h. 50 (20 h. 05 G.M.T.) avec l'allumage du moteur de descente.
En freinant, le module, de 15 km d'altitude, est descendu lentement vers l'aire d'alunissage, où il s'est posé à 20 h. 17 (G.M.T.).
Houston crut devoir leur dire : ">Il y a un tas de gens souriants ici et autour du monde."
Et Armstrong répondit du tac au tac : "Et il y en a également deux ici."

Communications parfaites
Les voix de Neil Armstrong et Edwin Aldrin parviennent avec une clarté parfaite au centre spatial de Houston. Rien en effet ne vient troubler les communications entre le module lunaire et la Terre. Et de surcroît, posés sur la face de la Lune toujours visible de la Terre il n'y aura aucune interruption des liaisons radio entre les deux premiers hommes parvenus sur le satellite naturel de la terre et le centre de Houston.
Il n'en est pas de même avec Collins qui continue à "boucler" ses orbites circulaires autour de la Lune, tout seul, dans le cosmos à bord de "Columbia", où il attend ses deux camarades.
Les communications radio avec le module sont reçues par diverses statuons réparties à la surface du globe terrestre et immédiatement relayées sur Houston.
Une heure et demie après l'alunissage, tout avait reprit un aspect très sévère tarit à bord du "Lem" qu'au centre de contrôle de Houston.
Armstrong et Aldrin, de nouveau dans leur rôle de techniciens de l'astronautique, se bornaient à communiquer au sol des données techniques que le centre spatial s'affaire à enregistrer et à déchiffrer.

Sortie autorisée
La NASA a autorisé Neil Armstrong à quitter le module lunaire à n'importe quel moment après 21 h. (lundi 1 h. GMT).
Les activités d'Armstrong sur la Lune pourraient donc, en principe, commencer avec près de cinq heures d'avance sur l'horaire prévu.
La décision appartient entièrement au commandant de la mission.
La NASA précise que c'est Armstrong lui-même qui a demandé au Centre de Houston, à être autorisé à avancer éventuellement l'heure de la "première marche de l'Homme sur la Lune".
Le commandant d'Apollo 11 n'a toutefois pas encore fait savoir à quelle heure il ouvrirait l'écoutille du module lunaire pour descendre sur le sol de la Lune.
Il était prévu que Armstrong pose le pied gauche sur la Lune à 6 h. 17 (GMT) et son camarade à 6 h. 20.
L'horaire était ainsi prévu :
- 3 h. 05 (7 h. 05 GMT) les deux astronautes entreprennent une inspection détaillée de l'extérieur de leur vaisseau avant de commencer à ramasser les échantillons de sol lunaire,
- 3 h. 15 (7 h. 15 GMT) Aldrin Installe sur le sol lunaire un sismographe et un réflecteur à rayon Laser. Il participe ensuite avec Armstrong au ramassage d'échantillons que lui passe Armstrong.
- 4 h. 25 (8 h. 25 GMT) Armstrong regagne à son tour la cabine
- 4 h. 40 (8 h. 40 GMT), la cabine est repressurisée. Les astronautes prennent un casse-croûte et se reposent.


L'Aigle s'est posé hier à 21 h 17 sur la Mer de la Tranquillité
N. Armstrong et E. Aldrin ont foulé le sol lunaire cette nuit

Le "LEM" est entouré de gros blocs dont certains ont trois mètres de haut

Mer de la Tranquillité, 20 juillet.
La Lune est vaincue - premiers terriens victorieux, Armstrong et Aldrin se sont posés sur la mer de [a Tranquillité,
Les astronautes américains partis de la terre k 16 juillet, à 13 h. 32 G.M.T., se sont posés sur la Lune dimanche 20 juillet, à 20 h. 17 G.M.T.4, à bord du module lunaire, après un alunissage parfait.
L'alunissage du "Lem" a été précédé par un léger vol de poussière lunaire soulevé par le moteur de freinage du module lunaire.
Sur l'ensemble du voyage Terre-Lune, du mercredi 16 juillet, à 13 h. 32 G.M.T. à dimanche 20, à 20 h. 17 G.M.T., le retard n'a été que de 39 secondes sur l'horaire prévu.
"Fantastique", s'est écrié Michael Collins, pilote de "Colombus" en apprenant le succès de l'opération.
L'heure officieuse du premier alunissage de l'homme se situe à 102 heures 45 minutes et 42 secondes après le lancement.
C'est Armstrong lui-même, commandant de la mission, qui tenait les commandes du module,

"Ne vous excusez pas"
"L'Aigle a. atterri", tels ont été les premiers mots prononcés par l'homme à son arrivée sur la Lune. Armstrong annonçait le succès complet de l'opération "Conquête de la Lune".
Michael Collins, resté seul dans la cabine-mère, a été aussitôt informé par le Centre spatial de Houston de l'alunissage réussi de ses camarades.
Armstrong a rapidement communiqué des impressions. Il a signalé qu'il voyait une grande variétés de rocs.
Aldrin, pendant ce temps, vérifiait si tout allait bien à bord et si le module était en état de repartir à n'importe quel moment en cas de besoin urgent.
Armstrong a également Indiqué que son camarade et lui-même se sentaient très bien et qu'il n'y avait pas lieu de s'inquiéter à leur sujet.
Armstrong s'est excusé auprès de ses supérieurs de la NASA d'avoir pris un léger retard de 39 secondes à l'alunissage, mais il lui a fallu, a-t-il expliqué, éviter des trous, des cratères, des rochers qui risquaient de mettre le module en danger.
Réponse de Houston : "Ne vous excusez surtout pas les gars... vous avez fait un boulot fantastique."
Collins, un peu négligé, est alors intervenu : "N'oubliez pas le gars dans la cabine de commande." Houston : "On ne vous oublie pas."

Des blocs lunaires et des cratères
Ler commandant a révélé, d'autre part, que la descente paraissait diriger le "LEM" dans un cratère des dimensions d'un terrain de football, où il apercevait de gros rochers.
C'est en pilotage manuel, en louvoyant au-dessus du sol lunaire, qu'Armstrong a pu diriger le module vers un terrain propice à l'alunissage.
Selon les Indications du commandant de vol, les deux astronautes n'ont pas eu de difficulté à manoeuvrer leur module en état de gravité lunaire.
Le "module lunaire" est entouré d'assez gros blocs lunaires. Certains d'entre eux ont jusqu'à trois mètres de haut.
Armstrong a distingué également des crêtes anguleuses et, tout droit devant lui une colline, à un km et demi environ du "LEM".
La couleur ? Les deux astronautes ne se prononcent pas. "Elle dépend de l'angle sous lequel on regarde", a dit Aldrin.
Aldrin a ajouté : "Je ne peux pas dire qu'il existe une couleur générale."
Des cratères, il y en a, semble-t-il, un peu partout. Selon les deux astronautes, le plan sur lequel le "LEM" s'est posé est relativement plat, mais on distingue dans toutes les directions un grand nombre de cratères de toutes dimensions.
Certains de ces cratères ont un mètre ou un mètre et demi de diamètre, d'autres une quinzaine de mètres. Ils sont tellement nombreux, disent les astronautes, qu'on ne pourrait vraiment pas les compter,
Le centre de contrôle ne s'adresse plus à l Aigle posé sur la Lune, c'est la "Mer de la Tranquillité" qu'il appelle désormais et qui lui répond distinctement car les communications radio sont excellentes.
Il existe à présent une "base" sur la Mer de la Tranquillité et elle émet régulièrement en direction de la Terre.
Aux impressions de la Lune, ont succédé des renseignements de caractère plus techniques sur l'état de la chaloupe de débarquement. Mais Houston n'exige pas toujours ce genre d'informations et accueille volontiers les notes pittoresques que les deux astronautes communiquent à l'humanité à l'écoute.
Où est posé exactement le "module lunaire" ? En l'état actuel des choses, on serait bien embarrassé de le préciser, au centre spatiale de Houston aussi bien qu'à la "base" de la Mer de la Tranquillité.
Le centre de Houston estime que le module a pu se poser a 6 ou 7 km au-delà du centre de l'aire elliptique d'alunissage.
Armstrong a signalé que la surface lunaire, juste au-dessous du module, a été légèrement "écorchée" par la chaleur dégagée par le propulseur de descente.
"Les éclats de sol que nous apercevons, a-t-il ajouté, sont d'un gris sombre. Cela ressemble à du basalte."

L'émotion des astronautes
Sur la terre, l'émotion, au centre de Houston aussi bien que parmi les millions de téléspectateurs américains immobilisés devant leurs petits écrans était sans doute à son comble au moment de l'alunissage,
Mais comment ont réagi les deux valeureux astronautes que la Terre a chargé de la représenter sur le sol de son fidèle satellite naturel ?
Pendant la descente du module, les battements de coeur d'Armstrong, pourtant connu pour son sang-froid, sont passés à 156. Peu après l'alunissage, ils sont retombés à 90.
Ces lointains terriens, dont les pensées les ont accompagnées pendant tout le voyage Terre-Lune et encore plus au moment où les deux astronautes allaient se poser sur notre satellite, Neil Armstrong et Aldrin ne les oublient pas, maintenant que, de leur hublot, ils contemplent le paysage désolé, déchiqueté, majestueux, dantesque de la Lune.
Car, en tournant le regard, les deux hommes voient aussi la Terre.
"Nous pouvons bien l'apercevoir, a dit Armstrong. Elle est grande, elle est brillante, elle est belle."
Emus au moment où le sort de leur mission se jouait, ces deux hommes étaient, quelques minutes plus tard, épanouis remplis de joie à l'idée d'avoir triomphé de toutes les difficultés, d'avoir échappé à tous les dangers de leur extraordinaire aventure spatiale.





Mer de la Tranquillité.
20 juillet 1969, l'homme déjà maître de la terre, conquiert une nouvelle planète
Neil Armstrong, commandant du vol Apollo 11 descend sur la Lune, foule son sol en prend possession au nom de l'humanité.
Premier de ces "hommes de la planète Terre venue dans un esprit de paix", il imprime son empreinte sur le sol vierge d'un nouveau monde.
La Lune désormais appartient à l'homme. Ni apprivoisée, ni encore domestiquée, elle est néanmoins conquise.

Geste symbolique
Dimanche à 22 h. 56, heure américaine (c'est-à-dire lundi 2 h.56 G.M.T.), Armstrong, après un interminable suspense, pose le pied sur la Lune.
Tout avait commencé quelques heures auparavant lorsque Armstrong, seul maître à bord, avait brusquement annoncé au monde qu'il sortirait du "Lem" cinq heures plus tôt que prévu. A ce moment, le film historique de la descente, puis des premiers pas sur la Lune, commence.

Préparatifs de sortie
- 19 h. 42 (23 h. 42 GMT). Les astronautes entament leurs préparatifs de sortie. Ils se coiffent de leur casque à double visière, chaussent leurs bottes, mettent leurs gants spéciaux renforcés, endossent leurs harnais de survie, en vérifient le fonctionnement des systèmes de pressurisation, communication radio et alimentation en oxygène.
- 19 h. 50 (23 h. 50 GMT), La N.A.S.A. annonce que ces préparatifs dureront deux heures. Armstrong ne sortira donc pas avant 22 h. (2 h. GMT).
- 21 h. (1 h. GMT). Ils commencent à prendre du retard.
- 21 h. 50 (1 h. 50 GMT). Ils ont 40 minutes de retard.
- 21 h. .54 (1 h. 54 GMT). Ils sont enfin prêts.
- 21 h. 55 (1 h. 55 GMT). Ils dépressurisent leur habitacle et pressurisent en même temps leur combinaison lunaire.
- 22 h. (2 h.. GMT). Le vide se fait dans le "Lem".
- 22 h. 15 (2 h. 15 GMT). Ils ont fini de pressuriser leur scaphandre.
- 22 h. 28 (2 h. 28 GMT). Tout va bien. Le "Lem" est entièrement dépressurisé. Ils dépendent, maintenant, totalement de leur harnais de survie.
- 22 h. 40 (2 h. 40 GMT). Armstrong ouvre l'écoutille. Il sort et descend sur la Lune.

"Un bond de géant pour l'Humanité"
- 22 h. 56 (2 h. 56 GMT). Armstrong pose le pied gauche sur la Lune et déclare : "C'est un petit pas pour l'homme. C'est un bond de géant pour l'humanité".
Ce sont les premières paroles de l'homme à la surface de la Lune. Avant de poser fermement le pied sur le sol, le commandant de bord avait prudemment tâté la surface pour en vérifier la résistance.
"Mon pied ne pénètre que d'un huitième dé pouce... Il ne semble pas qu'il y ait de difficultés à marcher. Non absolument aucune difficulté pour se déplacer", s'exclame Armstrong, surpris, en faisant un premiers pas. "Ça m'a tout l'air d'être plus facile qu'en état de simulation de la gravité lunaire. C'est très intéressant. La surface est très tendre an général, mais il y a des endroits plus durs. Le sol a une grande cohésion".

Premier échantillon lunaire
Les évolutions d'Armstrong qui semble, effectivement se déplacer avec aisance sur la Lune, et son monologue sont retransmis en direct sur tous les écrans du monde. Les téléspectateurs, où qu'ils soient, peuvent voir le conquérant de la Lune descendre les neuf degrés de l'échelle, poser le pied, tâter la surface, lâcher le dernier barreau auquel ses main s'accrochait encore, faire ses premiers pas, ramasser le premier échantillon du sol lunaire,
Cet échantillon, un peu de poussière de Lune, il le ramasse au pied même de l'escalier du' module avec une sorte d'épuisette munie d'un manche télescopique qu'il 'sort de sa poche. Il soulève alors son chargement, ferme l'épuisette hermétiquement, jette le manche, premier des détritus terrestres qui joncheront le sol de la Lune après le départ des astronautes, et enfouit la moisson dans sa poche, à l'aveuglette, guidé par Aldrin qui, du haut de la plate-forme de la sortie du "Lem", observe tous ses gestes.

Geste symbolique
Il est alors 23 h. 15 (2 h. 15 GMT), Armstrong a déjà passé 19 minutes sur la Lune, 19 minutes pendant lesquelles, dans l'indéfinissable solitude de la planète morte, il a constamment fait preuve d'une parfaite maîtrise de soi.
A ce moment, son coéquipier; Edwin Aldrin, fait son apparition à la surface de la Lune, une apparition bondissante.
Assuré que la Lune ne lui réserve aucune traîtrise, après l'expérience d'Armstrong, le pilote du module lunaire saute carrément de l'échelle et atterrit, lui aussi, du pied gauche.
Les deux hommes, alors unis dans un même geste patriotique, plantent le drapeau américain sur la Lune puis lisent à haute voix l'inscription gravée sur la plaque fixée au palier de descente du "Lem" qui restera sur la Lune, symbole de sa conquête par l'homme : "< I>Ici, des hommes de la planète Terre ont fait leurs premiers pas sur la Lune. Juillet 1969. Nous sommes venus dans un esprit de paix pour toute l'humanité".

Véritable pas de danse
Ayant accompli leur geste symbolique, les astronautes déplacent la caméra, fixée au module, qui n'a cessé de déverser des images d'une Lune blanche dont l'horizon s'inscrit en biais sur un fond très noir. Armstrong la prend et la pend à son cou. L'image se met alors à danser sur les petits écrans. Le commandant de la mission Apollo se met en marche, fait une vingtaine de mètres et installe la caméra sur un trépied.
Une vue panoramique s'offre aux regards : le module à l'arrière plan, une infinité de trous minuscules tendant des ombres démesurées au premier plan, au loin l'horizon dont la rondeur apparaît nettement, véritable ligne de démarcation entre une surface scintillante sous la lumière solaire et le gouffre noir de l'univers. L'image ne cesse de gagner en netteté. On distingue les traces de pas des astronautes sur le sol gris-blanc de la Lune. On aperçoit la bannière étoilée, fermement plantée.
Les deux hommes continuent leurs évolutions. Ils avancent avec une facilité étonnante, véritable pas de danse. Un étrange ballet se déroule sur la Lune. Leur lourd scaphandre, véritable cuirasse ignifugée, renforcée aux articulations, alourdi encore par le harnais fixé au dos, ne semble pas les gêner. Ils évoluent avec une légèreté et une mobilité surprenantes.

Message du Président Nixon
23 h. 49 (3 h. 49 GMT) : Le "sol" annonce que le président Nixon est en ligne. Il va, comme prévu, parler aux astronautes.
Immédiatement le petit écran se divise en deux parties égales : à gauche on voit le président des Etats-Unis, depuis la Maison-Blanche, un message au téléphone, à droite, les astronautes, immobiles, écoutent la voix qui vient de la terre, c'est-à-dire de plus de 380.000 km. "Cette journée est la plus glorieuse de nos vies, dit le président, grâce à vous, les cieux sont devenus une partie de notre monde".
"Merci M. le Président, répond Armstrong, c'est un grand honneur et un grand privilège pour nous d'être ici".

Collecteur de vent solaire
Edwin Aldrin déploie ensuite un "collecteur de vent solaire". C'est un mince rouleau de feuille d'aluminium, mis au point à l'Université de Berne, en Suisse, par le Dr Johannes Geiss. Il se déroule comme un store. Une fois installé, il recueille dans ses plis les particules gazeuses - hélium, argon, néon, krypton, xénon - qui constituent le vent solaire. Bombardé pendant deux heures par ces particules, le collecteur sera replié au moment où les astronautes s'apprêteront à regagner le module et hissé à bord. Cet appareil, le seul de ceux que les deux hommes ramèneront sur Terre, sera analysé à Houston. Les savant pourront pour la première fois examiner les particules de vent solaire qui n'atteint jamais la surface de la Terre, car il est intercepté par son atmosphère.

"Jardiniers de la Lune"
"Gambadant" dans toutes les directions, les astronautes qui sont depuis plus d'une heure sur la Lune, - et que le Dr Berry, leur médecin attitré qui suit, depuis Houston, leurs moindres mouvements - déclare en "forme parfaite" - ne chôment pas. Ils recueillent en vrac les échantillons sélénologiques qu'ils placent dans des sacs en matière plastique. Ces sacs seront ensuite déposés dans des "containers" métalliques parfaitement étanches. Plus de 30 kg d'échantillons doivent ainsi être recueillis.
Pour mener à bien leur tâche de "jardiniers de la Lune", les cosmonautes utilisent tout une série d'outils qu'ils ont retirés du "coffre à bagages" du module, le "Mesa" (Modularized equipement storage assembly) de son vrai nom. Ils se servent de pinces, de tenailles, de pelles, de pioches, d'un marteau, de tubes à échantillons, de balances, tout l'équipement du parfait géologue.
Ces instruments sont cependant plus volumineux que ceux qui auraient été utilisés sur Terre car les astronautes portent des gants spéciaux renforcés qui les empêchent de saisir des objets de taille réduite. Etant donné que leur scaphandre les empêche de se baisser, les outils sont munis d'un long manche télescopique universel qui leur facilite la tâche. Si un outil devait, par malchance, leur échapper des mains, les astronautes pourraient néanmoins le ramasser car, s'ils ne peuvent plier la taille, il leur est possible de mettre en genou à terre.

Installation du sismographe...
A minuit et quart (4 h. 15 GMT), la collecte des "pierres de lune" est terminée. Ils en ont ramassé 27 à 28 kilos.
Les astronautes ont vraiment mis du coeur à l'ouvrage. Fouillant, scrutant le sol rugueux à la recherche du caillou rare, qui fera le bonheur des spécialistes de Houston, les deux hommes, dans leur enthousiasme, ont eu l'air de boy-scouts lâchés dans la nature et soucieux de bien faire.
Cette première mission accomplie, il leur reste à s'occuper de l'installation des deux appareils qu'ils vont laisser sur la Lune : le sismographe et le réflecteur-laser.
Le sismographe lunaire, le plus sensible, le plus perfectionné jamais construit, est destiné à enregistrer toutes les secousses ébranlant la Lune, distinguer si elles sont d'origine volcanique et constituent de véritables tremblements de lune ou s'il ne s'agit que d'ondes de choc provoquées par l'impact des météorites bombardant en permanence la Lune.
L'installation du sismographe, qui doit fonctionner un an, est bien la chose la plus importante que les astronautes auront à accomplir, car grâce aux indications qu'il fournira, l'homme saura enfin si la Lune est un astre mort ou non. Si l'appareil enregistre des tremblements de terre, cela signifiera qu'il existe une activité volcanique, que les cratères lunaires furent jadis en éruption et que la Lune possède un noyau en fusion. Si, en revanche, il n'enregistre que des ondes de chocs dues à l'impact des météorites, il faudra en conclure que la Lune doit son relief aux bombardements venus de l'extérieur et qu'elle n'est qu'un gigantesque caillou de l'espace.
Le sismographe doit également mesurer l'interaction des forces de gravité de la Terre et de la Lune, enregistrer les infimes contractions du sol lunaire dues aux différences de température à sa surface et de déterminer la densité et les propriétés physiques de l'intérieur de la Lune.
Déployé automatiquement par pression d'un bouton, le sismographe fonctionne en emmagasinant l'énergie du soleil et en la transformant en électricité.

... et du réflecteur Laser
Quant au réflecteur laser, c'est un assemblage de cent miroirs prismatiques constitués de cristaux de quartz destinés à réfléchir les faisceaux de rayon laser envoyés vers la Lune, de divers points du globe terrestre. Installé en quatre minutes, conçu pour fonctionner dix ans, le réflecteur-laser permettra de calculer à quelques centimètres près la distance Terre-Lune (qu'on connaît actuellement à quelques mètres près), déterminer la forme exacte de la Lune, ses dimensions et ses oscillations autour de son axe, calculer à quelle vitesse la Lune s'éloigne de la Terre et obtenir des renseignements sur la Terre elle-même, notamment déterminer la distance exacte entre les continents, vérifier s'ils dérivent lentement, étudier les mouvements du pôle Nord géographique, calculer la vitesse de rotation de la Terre et mesurer ses oscillations autour de son axe.

" Le sol semble humide"
Le sismographe est installé. Le réflecteur laser également. Les astronautes, tout en travaillant sans relâche, continuent à transmettre au centre de Houston leurs impressions et toutes les informations recueillies.
Armstrong signale avoir repéré du module une infinité de petits cratères, qu'il compare aux "trous causés par les plombs des fusils à air comprimé".
En enfonçant aussi profondément que possible un tube-sonde leur permettant de recueillir des spécimens du sous-sol lunaire, un terrain vierge - donc n'ayant pas été touché et peut-être contaminé par quoi que ce soir venant de Terre - et pouvant renfermer d'éventuels micro-organismes, Armstrong plaisante : "J'espère que vous vous rendez compte du mal que j'ai pour enfoncer ça de 12 centimètres à peine (5 pouces). Le sol semble humide". En effet, on peut le voir frapper à coups redoublés avec son marteau sur la sonde.

La caméra est abandonnée
L'exploration humaine touche à sa fin. Les astronautes commencent à plier bagage, abandonnant sur la Lune la caméra, d'un prix de revient de 11.000 dollars, qui a si fidèlement suivi leurs évolutions et retransmis l'essentiel de leurs activités sur la Lune et les outils qui leur ont servi à ramasser les échantillons selenologiques qu'ils remontent par un filin actionné par une poulie, dans l'étage supérieur du module. Ils replient le collecteur de vent solaire et le font également glisser le long du filin, leur "corde à linge" comme ils l'appellent.
Pour mener à bien "l'opération chargement", Aldrin a grimpé les neuf échelons de l'escalier et, debout sur la plate-forme, attrape les objets qu'Armstrong lui passe et les range soigneusement à l'intérieur.
Il y a maintenant plus de deux heures et dix minutes qu'Armstrong est sorti, une vingtaine de moins pour Aldrin.

Mission accomplie
L'opération se déroule sans incident si ce n'est qu'à un moment Aldrin laisse échapper un rouleau de pellicules qui tombe sur la Lune. Armstrong le ramasse instantanément, facilement, nonchalamment presque, démontrant une fois de plus que toutes les craintes de la NASA sur les difficultés que les astronautes pourraient avoir à se mouvoir sur la Lune étaient vaines.
Cet incident a également permis aux Terriens d'entendre le premier "juron lunaire". Aldrin, furieux de sa maladresse, a lancé un "damn" retentissant en voyant le rouleau lui échapper.
Aldrin pénètre à l'intérieur du module. Armstrong jette un dernier coup d'oeil autours de lui, empoigne les barreaux de l'échelle, monte, entre, ferme l'écoutille. Il est 1 h 11 (5 h 11 GMT). L'exploration de la Lune est terminée. Mission accomplie. Succès total.
Cinq minutes avant que les astronautes ne regagnent leur habitacle, la NASA faisait d'ailleurs savoir que le réflecteur-laser qu'ils venaient d'installer fonctionnait parfaitement. L'observatoire Lick, de Californie, avais d'ores et déjà dirigé un faisceau de lumière cohérente, monochromatique et concentrée sur l'appareil qui l'a immédiatement renvoyé vers sa source, démontrant ainsi son bon état de marche.
Les astronautes repressurisent leur habitacle, les conditions normales vont être rétablies à bord et les deux hommes vont pouvoir se débarrasser de leurs encombrants scaphandres lunaires. L'opération doit prendre une heure.
La caméra lunaire transmet les dernières images de la Lune, elle cessera bientôt de fonctionner car les astronautes vont débrancher le câble d'alimentation afin de ne pas épuiser leurs batteries.
Les communications entre le module et le sol, interrompues un moment car Armstrong et Aldrin avaient débranché leur poste émetteur portatif, ont repris dès qu'ils se sont branchés sur l'émetteur de bord.

Ménage dans la cabine
La conquête de la Lune est consommée.
Il ne reste plus aux deux valeureux explorateurs qu'à faire le ménage de leur cabine, balayer vers la porte l'appareil photo - vide - qui leur a servi a photographier sous tous leurs angles les cailloux lunaires qu'ils ont ramassés, leurs bottes, leurs gants, leurs harnais de survie, d'autres détritus et déchets divers comme des sacs à nourriture vides et des sacs d'urine, dépressuriser de nouveau le "LM", ouvrir la porte, balancer sur la Lune leurs "ordures", refermer l'écoutille, represssuriser une dernière fois le module, manger et dormir.
Ils doivent se reposer onze heures de 2 h. 30 (6 h. 30 GMT) à 11 h. 30 (15 h. 30 GMT). Jamais repos n'aura été aussi bien gagné.
A 13 h. 55 (17 h. 55 GMT), ils doivent décoller de la Lune pour rejoindre la cabine de commande où gravite toujours, seul à bord, leur coéquipier, Michael Collins, une des seules personnes au monde qui ne put suivre leurs activités à la télévision. Collins, cependant, était tenu au courant des évolutions de ses camarades par contact radio. Il veillait d'en haut sur eux et quand on lui apprit que leur expédition s'était soldée par un triomphe et qu'ils étaient sains et saufs à bord du "LM", il manifesta sa joie et son soulagement par ce seul mot : "Alleluia."
Un message d'écoliers italiens sera déposé sur la Lune
Après avoir fait ses premiers pas sur la Lune, Neil Armstrong ne devra pas oublier que, dans l'une des poches de sa combinaison, se trouvera une plaque en métal qu'il devra déposer sur le sol lunaire, conformément à la promesse que les dirigeants de la NASA ont fait aux écoliers de l'école primaire de Rovereto Sul Ecchia, près de Modène.
Leur institutrice, Mme Tina Zuccoli, est une passionnée d'astronautique. Lors du vol "Gemini 3", en 1964, Mme Zuccoli et ses élèves avaient envoyé deux croix de Saint Geminiano, patron de Modène, à Grissom et Young, qui les ont portées à leurs cous pendant la durée de l'expédition. Par la suite, Borman a emporté affichée dans la cabine d'"Apollo 8", une photo des écoliers italiens dans leur classe de Rovereto.
Pour "Apollo 11", Mme Zuccola a voulu faire mieux, ses élèves on dessiné une plaque portant en son centre une croix au pied de laquelle est écrit le nom de John F. Kennedy et le sigle "Mo.De.Na." c'est-à-dire "Moon Destination NASA" avec la date 1969. Cette plaque commémorative destinée à représenter les écoliers de Rovereto Sul Secchia sur la Lune, avant qu'ils puissent y aller un jour en excursion, a été envoyée par avion, le 24 juin, à James Webb, le directeur de la NASA, qui a promis à Mme Zuccoli et à ses élèves que leur voeu serait réalisé.
Après un échange amical de lettres entre Armstrong, Aldrin et Collins, et les écoliers de Rovereto, ceux-ci attendent avec impatience le débarquement des premiers conquérants de la Lune
Le Pape se félicite du progrès de la science humaine
Mais que la domination du cosmos ne fasse pas oublier le besoin qu'a l'homme de se dominer lui-même

Castelgandolfo, 20 juillet.
"Aujourd'hui, le progrès de la science humaine arrive à un but que l'on croyait jamais pouvoir atteindre" a dit Paul VI, au cours de son allocution dominicale qu'il adressé du balcon du palais de Castelgandolfo - où il est en vacances - à la foule des fidèles venus du monde entier.
"Mais tout dépend encore du coeur de l'homme, qui doit devenir d'autant plus libre, meilleur et religieux, que la puissance des machines, des armes et des instruments que l'homme met à sa propre disposition est plus grande et plus dangereuse" a ajouté le Souverain pontife. Le Pape a ensuite émis le voeu que "l'ivresse de ce jour mémorable, véritable triomphe des moyens produits par l'homme pour la domination du cosmos, ne fasse pas oublier le besoin et les devoirs que l'homme à de se dominer soi-même".
"Trois guerres se déroulent encore sur la Terre : au Viet-nam, en Afrique et au Moyen-Orient - a ajouté Paul VI - une quatrième vient de s'y ajouter, juste ces jours-ci, avec des milliers de victimes, entre le Salvador et le Honduras. Et puis, il y a la faim qui afflige encore des populations entières. Où est la vraie humanité ? Où est la fraternité ? Où est la paix ? Quel serait le vrai progrès de l'homme si ces malheurs duraient et s'aggravaient ?"

Message à l'humanité
"Qui que vous soyez et où que vous soyez, méditez sur les événements des dernières heures et rendez grâce à votre façon."
Tel est le message que Neil Armstrong et Edwin Aldrin ont adressé, dimanche soir, à l'Humanité toute entière, depuis la "base de la Mer de la Tranquillité", sur la Lune.

Le Pape observant la Lune au télescope géant de l'Observatoire du Vatican.
A droite, le Père irlandais O'Connel, Directeur de l'Observatoire. (Keyston)
Radio-Moscou a annoncé l'alunissage

Moscou, 20 juillet.
La radio soviétique a annoncé à 20 h 59 (GMT) - neuf minutes après le début de son bulletin d'informations du soir - à la population soviétique, que la cabine lunaire "Lem" d'Appollo-11, s'était posée sur la surface lunaire avec les cosmonautes Armstrong et Aldrin à son bord.
Pendant les neuf premières minutes de son bulletin d'information - le dernier de la soirée - la radio soviétique a parlé dans l'ordre de :
- La mise en service des hauts-fournaux dans une région d'U.R.S.S.
- La journée des métallurgistes en U.R.S.S.
- Du vol de "Luna-l5", avec une deuxième correction de l'orbite.
- Du 25' anniversaire de la fondation de la République polonaise et de la fête donnée à cette occasion dans une banlieue de Moscou.
- De la journée de- solidarité avec le Vietnam, célébrée dans le monde entier. Rappel de la violation des accords de Genève par les "Impérialistes américains".
- De la visite du Président Kekkonen, en Grande-Bretagne pendant cinq jours.
- A 20 h. 59 GMT —- communiqué de l'agence Tass sur l'alunissage du "Lem" avec Armstrong et Aldrin à bord, sans le moindre commentaire.
Quant à l'agence Tass, son émission en langue anglaise a été interrompue à 20 h. 45 (GMT) jusqu'à lundi matin 6 h (GMT).
Un message d'écoliers italiens sera déposé sur la Lune

Après avoir tait ses premiers sur la Lune, Neil Armstrong ne devra pas oublier que, dans une des poches de sa combinaison spatiale, se trouvera une plaque en métal qu'il devra déposer sur le sol lunaire; conformément à la promesse que les dirigeants de la NASA ont fait aux écoliers de l'école primaire de Rovetero Sul Ecchià, près de Modène.
Leur institutrice, Mme Tina Zuccoli, est une passionnée d'astronautique. Lors du vol "Gemini 3", en 1964, Mme Zuccoli et ses élèves avaient envoyé deux croix de Saint Geminiano, patron de Modène, à Grissom et Young, qui les ont portées à leurs cous pendant la durée l'expédition. Par la suite, Borman a emporté affichée dans la cabine d'Apollo 8 une photo des écoliers italien leur classe de Rovereto.
Pour Apollo 11, Mme Zuccoli a voulu faire mieux, ses élèves ont dessiné une plaque portant au centre une croix au pied de laquelle est écrit le nom de John F. Kennedy et le sigle "Moon Destination NASA" avec la date 1989. Cette plaque commémorative destinée à représenter les écoliers de Rovereto Sul Secchia sur la Lune, avant qu'ils puissent y aller un jour en excursion, a été envoyée par avion, le 24 juin, à James Webb, le directeur de la NASA, qui a promis à Mme Zuccoli et à ses élèves que leur voeu serait réalisé.
Après un échange amical de lettres entre Armstrong, Aldrin, Collins, et les écoliers de Rovereto, ceux-ci attendent avec impatience le débarquement des premiers conquérants de la Lune.



Les deux cosmonautes au pied du LEM (A.F.P.)
Armstrong a failli tomber

Centre spatial de Houston (Texas), 21 juillet.
Neil Armstrong a failli faire une chute pendant qu'il se trouvait sur le sol lunaire.
Il s'est en effet accroché le pied dans le câble de la caméra de télévision. Le colonel Aldrin l'en a averti toutefois à temps.
- Neil, appela-t-il par radio, tu marches sur le câble.
- OK !
, fut la seule réaction de son chef de bord.
- Lève le pied droit. Le câble est encore pris sur le devant de ta botte.
Armstrong se dégagea sans difficulté d'une situation qui aurait pu être la cause d'un grave accident.

Les cosmonautes viennent de planter le drapeau américian et conversent par radio-téléphone
avec le Président Nixon que l'on voit en médaille à gauche. (A.F.P.)


Coup de téléphone historique de Nixon

Washington, 21 juillet.
Voici le texte intégral de la déclaration faite par le président Richard Nixon aux deux astronautes Armstrong et Aldrin, au cours du premier et historique appel téléphonique de la Maison Blanche à la Mer de Tranquillité.
"Ceci sera certainement le coup de téléphone le plus historique qui soit jamais parti de la Maison Blanche. Je ne trouve pas mes mots pour vous dire combien nous sommes fiers de ce que vous avez tait pour tous les Américains. Ce jour restera comme le plus glorieux de nos vies, Je suis certain que tous les peuples du monde se joindront aux Américains pour reconnaître l'immense exploit que vous venez d'accomplir, parce que vous avez fait en sorte que les cieux soient maintenant partie de notre monde. Pendant que vous nous parlez de la Mer de Tranquillité, cela nous encourage à redoubler nos efforts pour amener la paix et la tranquillité sur Terre. Pour un moment d'une valeur inestimable pour l'histoire de l'humanité, tous les peuples du monde se sont trouvés unis."
Le président a poursuivi : "L'une de leurs gloires, c'est ce que vous avez accompli, l'une de nos prières est que vous nous reveniez sur Terre. Je vous verrai jeudi."
Neil Armstrong qui, avec Aldrin, avait écoute le président a simplement répondu : "Merci M. le Président. C'est un grand honneur et un privilège pour nous d'être ici, représentant non seulement les Etats-Unis mais les hommes des nations pacifiques qui ont un intérêt, une curiosité et une vision de l'avenir."
Après avoir terminé sa conversation, le président s'est retourné vers les rares personnes qui étaient à ses côtés et a déclaré : "J'espère qu'ils ne me feront pas payer cette communication téléphonique." Puis il a ajouté : "Tout va bien, j'ai fait l'appel en "collect" (PCV)."
Les Américains vainqueurs

Houston, 21 juillet, (Serge Berg).
Dans la course à la lune, les Américains ont battu les Soviétiques. La victoire des Etats-Unis est incontestable et on ne saura sans doute, que beaucoup plus tard, si les Soviétiques, qui ont à leur actif, de nombreuses "premières spatiales" se sont laissé devancer parce qu'ils ont modifié leur plan d'exploration lunaire ou parce qu'ils n'ont pu suivre le rythme américain.
La victoire américaine est due à une capacité d'organisation sans précédent, une industrie des ordinateurs, dont le chiffre d'affaires est égal au coût de l'ensemble du programme Apollo. Sans la coordination du travail de 20.000 firmes et des 400.000 personnes, sans les nouvelles techniques et la nouvelle technologie, sans les ordinateurs, les plus puissants et aussi les plus petits dans la perfection, le débarquement des premiers hommes sur la Lune, n'aurait jamais été possible. Apollo est le sommet d'une gigantesque pyramide.
La victoire américaine est d'autant plus remarquable que pendant longtemps, et en ce qui concerne l'exploitation de La Lune, les Soviétiques ont mené jusqu'à novembre dernier. Le premier satellite artificiel a été soviétique, les premiers hommes dans l'espace ont été des Russes, toutes les "premières lunaires" ont été le fait de I'U.R.S.S., mais c'est la bannière étoilée des Etats-Unis qui a été plantée la première par les astronautes américains, En fait, si l'on fait le bilan de la conquête spatiale, on s'aperçoit que les premières spatiales américaines ont été également extrêmement nombreuses (premiers satellites de télécommunications, de navigation, météorologie, premières photos de Mars, etc.) D'autre part, dans le domaine des vols humains, le vol Apollo 11 est le 21e effectué par Les Etats-Unis, contre 12 seulement par l'U.R.S.S. 41.astronautes américains, y compris Armstrong, Aldrin et Collins, ont volé dans l'espace contre 17 Soviétiques accumulant plus de 4.700 heures de vol (868 seulement pour les Soviétiques).
Dans l'ensemble donc, on peut dire que l'exploit américain d'aujourd'hui, n'est pas seulement le résultat d'un pari, de la volonté d'arriver précisément les premiers sur la Lune, mais un résultat significatif entre tous.
La question que se posent de nombreux observateurs est de savoir dans quelle mesure la réussite de la mission Apollo influera sur la coopération spatiale entre les Etats-Unis et l'Union Soviétique, Jusqu'à présent, l'accord signé en 1963 entre les deux puissances n'a apporté que peu de choses, mais il est assez encourageant de constater, notent ces mêmes observateurs, qu'à l'occasion des vols d'Apollo 8 et 11, on a vu des échanges d'informations entre les deux pays qui n'avaient lamais eu lieu auparavant.
Félicitations du monde entier

Dans le monde entier, le fantastique exploit de l'équipage Apollo 11 et la parfaite réussite de la première phase de l'exploration lunaire ont suscité messages et déclarations de chefs d'Etat et d'hommes politiques, de savants, d'artistes, et d'humbles citoyens.

Télégramme de M. Pompidou
Paris, 21 juillet - Le président de la République, M. Georges Pompidou a adressé au président Richard Nixon, un télégramme de félicitations.
En voici le texte :
"Au moment où la science américaine vient de réaliser un des grands rêves humains, je vous adresse, M. le président, pour votre nation, vos savants et techniciens et vos valeureux cosmonautes, les chaleureuses félicitations du peuple français".
Signé G. Pompidou.
Le président de la République a suivi an direct, à la télévision, les premiers pas de l'homme sur la Lune.

Le message du Pape aux astronautes
Castelgandolto, 21 juillet. — Voici la traduction du message que Paul VI a adressé en anglais aux trois astronautes américains :
"A vous, astronautes, vous parle le Pape Paul VI, depuis son observatoire de Cestelgandolfo. Honneur, salut et bénédiction à vous, conquérants de la Lune, pâle lumière de nos nuits et de nos rêves, portez-lui grâce à votre présence vivante, la voix de l'esprit, l'hymne à Dieu, notre créateur et notre père. Nous sommes auprès de vous avec nos voeux et nos prières. Le Pape Paul VI et toute l'église catholique vous saluent".

Message de PauI VI au monde
Paul VI a adressé un message au monde, aussitôt après que le module d'Armstrong et Aldin se soit posé sur la Lune.
"GIoire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté, affirme-t-il. Nous, humbles représentants de ce Christ qui, en venant parmi nous des profondeurs de la Divinité, a fait résonner dans le firmament cet appel bienheureux, aujourd'hui noua y faisons écho, le répétant comme un hymne de fête de la part de notre globe terrestre tout entier, non plus frontière infranchissable de l'existence humaine, mais porte ouverte sur l'immensité d'espaces sans fin et de nouveaux destins."
"Gloire à Dieu, et honneur à vous, artisans de la grande entreprise spatiale. Honneur aux hommes responsables, aux savants, aux inventeurs, aux organisateurs, aux exécutants. Honneur à tous ceux qui ont rendu possible ce vol très audacieux. Honneur à vous tous, qui d'une façon ou d'une autre y avec participé. Honneur à vous qui, assis derrière vos prodigieux appareils, gouvernez, à vous qui annoncez au monde cette oeuvre et ce moment qui élargit le domaine savant et audacieux de l'homme aux profondeurs célestes. Honneur, salut et bénédiction".

M. Zorine : "Réussite hors rang"
Paris, 21 juillet. - "Je présente mes félicitations aux cosmonautes américains", a déclaré M. Zorine, ambassadeur de l'Union Soviétique, en réponse à une question d'un journaliste, à l'issue de son entretien - qui a duré 55 minutes - avec M. Pompidou.
"C'est une réussite hors rang et elle servira le progrès de la science dans le monde entier".
Auparavant, l'ambassadeur de I'URSS avait déclaré :
"C'est la première visite que je rends à M. Pompidou après son élection à la présidence de la République. Nous avons parlé du développement ultérieur des rapports franco-soviétiques et de certaines questions Internationales intéressant les deux pays"'.

"Félicitations" de M. Brejnev
Varsovie, 21 juillet. - "Félicitations" : tel est le seul mot prononcé ce matin par M. Brejnev en serrant la main de l'ambassadeur des USA en Pologne, M. Walter J. Stoessel, venu l'accueillir à l'aéroport de Varsovie avec les autres membres du corps diplomatique.
Le premier secrétaire du P.C. soviétique, qui arrivait de Moscou en compagnie de M. Nicolaï Podgorny, chef de l'Etat, afin d'assister aux cérémonies du 25e anniversaire de la Pologne populaire, n'a' parlé ni d'Apollo 11, ni des cosmonautes, mais il était clair que ses "félicitations" s'appliquaient à l'exploit américain sur la Lune.

Joie immense des épouses

Houston, 21 juillet. - Angoisse, puis soulagement, puis étonnement et enfin joie intense chez les épouses des deux astronautes au moment où ils ont mis le pied sur la Lune.
"Je ne peux pas y croire", s'écriait Mme Armstrong en voyant son mari descendre l'échelle du LEM puis l'entendant déclarer que la poussière de la lune collait à ses bottes. "Sols un peu plus descriptif, maintenant", s'exclama-t-elle. Chez les Aldrln, en voyant le chef de famille courir comme un cabri autour du Lem, toute la famille s'est mise à en faire autant en poussant des cris de joie.
"La soirée a été incroyablement parfaite, a déclaré Mme Neil Armstrong après avoir vu par télévision son mari et le colonel Aldrin descendre du module et prospecter le sol lunaire. Plus tôt dans la journée, elle avait reconnu être "terriblement surexcitée"'.
Quant à Mme Aldrin, elle pouvait à peine croire ses yeux, "il était difficile de penser que c'était réel jusqu'à ce que les hommes aient vraiment bougé".
"Je croyais, a-t-elle ajouté, que je regardais une autre simulation de l'événement"'.
Mme Aldrin a avoué que lorsque le module a aluni, elle a pleuré de bonheur.
"Fantastiquement merveilleux", s'est exclamée l'épouse du troisième astronaute d'Apollo 11, Mme Collins, dont le mari attend ses camarades sur une orbite lunaire. "Il est en esprit avec eux", a-t-elle répondu à des journalistes qui lui demandaient et son mari regrettait de ne pas avoir aluni.

Les Chinois ignorent tout d'ApoIIo 11

Hong Kong. 21 juillet. - Pour quelque 750 millions de Chinois - environ un cinquième de l'humanité - Neil Armstrong et ses compagnons demeurent de parfaits inconnus et le 21 juillet est un jour comme tous les autres.
Tandis que le reste du monde suivait, de minute en minute devant les postes de télévision ou de radio, les premiers pas des astronautes américains sur la surface de la Lune, Radio-Pékin diffusait imperturbablement un compte rendu des progrès dans la conscience de classe réalisés grâce à la pensée du président Mao, par les travailleurs de Shanghaï, et de l'organisation de "classe d'étude des directives" de Mao Tse Tung, par les militaires de la garnison de Pékin.
Seuls sans doute, les auditeurs des émissions en chinois de la "Voix de l'Amérique", de Radio-Australie et de la B.B.C. - et accessoirement de Radio-Moscou, sont-ils au courant du triomphe du projet Apollo. Encore n'en font-ils probablement part à leurs amis et connaissances qu'avec prudence de crainte de se voir qualifiés de "contre-révolutionnalres"'.
Mais, jusqu'à présent, tes seules références faites ces derniers jours par la presse chinoisa ont été pour reprocher au chef de l'Etat soviétique, M. Podgorny, d'avoir reçu à Moscou, avec un enthousiasme "servile" l'astronaute américain Frank Borman en visite dans la capitale de l'U.R.S.S.

Médaille pour les trois astronautes
Londres, 21 juillet. - Les trois astronautes américains recevront la médaille d'or de la. Société britannique Interplanétaire. D'un diamètre de sept à huit centimètres, elle représente, d'un c6té, un symbole de la Terre, Une fusée spatiale et un visage humain, de l'autre, l'inscription B.I.S. (Briitish Interplanetary Society). Youri Gagarlne, en 1961, et Valentina Terechkova, en 1964, s'étaient vu décerner la médaille de la B.I.S.
Repos difficile

Centre spatial de Houston, 21 juillet
Il était 3 h. 23 (7 h. 25 GMT) lundi lorsque le Centre de contrôle de Houston a indiqué à Armstrong et Aldrin qu'ils pouvaient aller se coucher.
"Nous vous souhaitons une bonne nuit" a dit le responsable des communications du Centre avec le module lunaire à issue d une dernière série de vérifications et de questions de détail portant sur les notations géologiques faites par les deux pendant leur. promenade sur la lune
A 6 h. 30 (10 h. 30 GMT), Houston à confirmé qu'Armstrong se contentait de somnoler. Cette demi-insomnie avait déjà été constatée au sol prés de deux heures plus tôt. Seul des trois hommes de la mission, dans sa cabine "Coiumbia" parmi les étoiles, Collins dort comme u n enfant. A 6 h. 30, lundi matin, C'est la constatation que le Centra de contrôle a pu faire à nouveau alors que la cabine de commandement venait d'entamer as 22e révolution
Les conquérants de la Lune se sont réveillés. A 11 h. (15 h. GMT), le Centre de contrôle a appelé la "Base de la Tranquillité" et a annoncé à ses occupante qu'il était temps de se lever ou plutôt de détacher les sangles qui les retenaient à la paroi puisque les astronautes ont dormi littéralement debout dans leur habitacle exigu.
Selon les données électroniques recueillies grâce au harnais bio-médical porté par Armstrong, il se révéla que le commandant de bord s'est assoupi de façon irrégulière pendant les six heures de sa période de repos mais ne s'est jamais profondément endormi. Aldrin, lui, ne portait pas de harnais, on ne sait donc encore s'il a pu se reposer.
Les deux hommes se sont immédiatement mis à vérifier les instruments de bord an vue du décollage de leur module et de leur retour en orbite lunaire.
Collins a été réveillé par les contrôleurs au sol, lundi 9 h. 30.


Magnifique : "Aigle" est reparti

Houston, 21 juillet.
Le premier voyage de l'homme "au bout de la Lune" est terminé. De succès en succès, la mission "Apollo 11" a été couronnée lundi, à 13 h. 54 (17 h. 54 GMT), par l'envoi majestueux de l'Aigle à partir de la première base lunaire de l'Histoire, celle de la Mer die la Tranquillité.
Tout devait se jouer on ce moment fatidique. Le propulseur principal du palier de montée du module lunaire que pilote Aldrin allait-il répondre à ses commandes ? S'il n'obéissait pas, Armstrong et son compagnon d'équipée interplanétaire risquaient de périr asphyxiés à brève échéance sur le terrain même de leur brève conquête.
Mais le "module lunaire", objet de tant de critiques lors de se misa au point, a été parfaitement à la hauteur des circonstances.
Le propulseur de montée a été mis à feu exactement à l'heure prévue. Il a fonctionné 7 minutes 18 secondes, Imprimant à "Aigle" une vitesse suffisante pour s'arracher à la Lune et monter à la verticale à une altitude de 16 km. 200.
"Magnifique, l'Aigle est parti", s'exclama-t-on à Houston où un immense soulagement faisait place à un des plus angoissants suspenses jamais éprouvé.
"Mon Dieu comme c'est beau... C'est une belle montée silencieuse... nous allons directement aux Etats-Unis", tels furent les commentaires de Neil Armstrong se succédant à mesure que son module prenait de l'altitude.
"Aigle, tout est vraiment magnifique" lui répondit le centre de contrôle.
A 14 h. 01 (18 h. 01 GMT), le module s'inscrivait sur orbite lunaire. il se trouvait alors à un peu plus de 16 km. d'altitude et déjà à 315 km. (190 miles) de distance de la "base de la Tranquillité" où Il venait de passer 21 h, 38 m. 41 s.
Les coordonnées de son orbite étalent de 18,5 km, de périlune et 87 km. d'apolune.
Vers 18 h. 45 GMT, le "LEM", ainsi que la cabine-mère, avaient commencer de survoler la face cachée de la Lune. Ils étaient, de ce fait, hors de contact radio avec la Terre pendant trois quarts d'heure environ.
A 15 h. 40 (19 h. 40 GMT), le Centre spatial de Houston a annoncé que le "module lunaire" avait réussi à circulariser son orbite lunaire et qu'il ne se trouvait plus qu'à 160 km de la cabine-mère.
Le rendez-vous des deux engins était toujours prévu pour 17 h. 32 (21 h. 32 GMT).
Après allumage, à 20 h. 45 GMT, pendant 22,4 secondes, de ses petites fusées directionnelles, le module lunaire a entamé sa dernière phase de la poursuite de la cabine-mère.
Cette mise à feu a accéléré la vitesse du module de 27,2 km.-h, et a placé le module sur une nouvelle orbite de 80 km. de périlune et 113 km d'apolune.
Le "LEM" est immédiatement après passé derrière la Lune.

Rythme cardiaque normal sur la Lune

Houston, 21 juillet.
Au cours de leurs activités lunaires, le rythme cardiaque des astronautes a été "normal", a déclaré le docteur Charles Berry, médecin des astronautes de la N.A.S.A,
Pour Armstrong, le rythme a varié entre 90 et 160 pulsations à la minute, ce qui ne saurait surprendre, a présidé le docteur Berry, étant donné que le commandant de la mission "Apollo 11" a travaillé plus vite et plus longtemps que son camarade Aldrin, dont les battements du coeur ont oscillé entre 90 et 125 seulement.
D'autre part, les radiations dont Neil Armstrong et Edwin Aldrin ont été l'objet au cours de leur séjour sur la Lune, ont été négligeables.


Après 21 h 36' 41" "d'occupation" lunaire Armstrong et Aldrin avaient décollé à 18 h 54' pour rejoindre la cabine mère
Le "train spatial" a été reconstitué à 22 h 35 puis les deux hommes ont rejoint Collins.
Le largage du "LEM" a eu lieu à 1 h 01


Houston, 21 juillet.
Le rendez-vous d'Aigle et de CoIumbia s'est réalisé. A leur réapparition au-dessus de la face visible de la Lune, à 17 h. 23 (21 h. 23 G.M.T.), les deux engins volaient en formation.
Le module lunaire a rejoint à 21 h. 35 (G.M.T.) la cabine-mère après une séparation qui a duré 27 heures et 48 minutes.
Le "module lunaire" a fait n jonction avec la cabine alors que les deux engins se trouvaient au-dessus de la face visible de la Lune.
La manoeuvre d'arrimage s'est déroulée alors que les communications radio entre les engins et la Terre étaient très brouillées.
Ces conditions ont créé quelques minutes de "suspense" au Centre Spatial de Houston.
Les deux engins resteront amarrés pendant près de quatre heures. Armstrong regagnera le premier la cabine-mère, à 19 h. 37 (23 h. 37 G.M.T.), suivi par Aldrin à 20 h. 15 (0 h. 15 G.M.T.)
L'amarrage de la cabine spatiale et du module lunaire a eu lieu avec trois minutes de retard sur l'horaire prévu eu raison d'une difficulté technique dont la nature n'a pas encore été précisée.
La jonction avait tout d'abord été prévue pour 17 h 32 (21 h 32 GMT). Les deux premiers hommes à avoir marché sur la lune brosseront consciencieusement leurs scaphandres spatiaux pour éviter de ramener dans la cabine-mère de la poussière lunaire susceptible de gêner l'équipage pendant son voyage de retour sur la Terre.

Où le "LEM" s'est-il posé ?

Centre spatial de Houston.
La NASA a admis, lundi, qu'elle n'avait toujours pas réussi à déterminer avec certitude l'endroit précis de la Mer de Tranquillité où le module lunaire de Neil Armstrong et d'Edwin Aldrin s'était posé dimanche. Elle sait toutefois, que c'est à environ 4 miles (6.400 mètres au sud-ouest de l'aire choisie pour l'alunissage).
Le Centre de contrôle de Houston a annoncé qu'en retraçant les évolutions du module après son décollage et en tenant compte de toutes les manoeuvres et corrections qu'il aura effectué en vue de son rendez-vous avec la cabine-mère, dont la position exacte était connue à tous les instants de l'opération, il pourra ultérieurement faire le point du lieu d'alunissage à un mètre près.

Le professeur Von Braun, à droite, durecteur du Centre spatial de la N.A.S.A., à Huntsville (Akabama)
et le général Samuel C. Phillips, directeur du programme Apollo on tenu hier une conférence de presse.


Tout va bien à bord d'Apollo 11 qui fait route vers la Terre

Centre Spatial de Houston, 22 juillet (Lois Deroche).
"L'exploration des planètes du système solaire" est possible "de notre temps" a déclaré le Dr George Mueller, chef des vols humains de la NASA, au cours d'une conférence de presse qui s'est tenue au Centre Spatial de Houston dans la nuit de lundi à mardi, peu après qu'Apollo 11 sortant de son orbite eut pris avec succès le chemin de la Terre.
Le Dr Mueller n'a fixé aucune date pour l'exploration d'autres planètes du système solaire. "Pour se rendre jusqu'aux étoiles, a-t-il toutefois ajouté, Il faudra mettre au point une nouvelle source de puissance énorme" Le directeur-adjoint de la NASA avait évidement à l'esprit l'utilisation à des fins industrielles de la fusion thermonucléaire. "Or cette utilisation, a-t-il souligné, "a été décrite, mais n'est pas inventée"
D'autres dirigeants de la NSA ont pris part à la conférence de presse. Le Dr Gilruth, chef du Centre spatial de Houston, a formulé le souhait de pouvoir explorer lui-même le cosmos d'ici une dizaine d'années. Il espère qu'à cette époque "la NASA enverra dans l'espace des ingénieurs et des savants... des hommes qui n'auront pas besoin d'avoir subi l'entraînement d'astronautes".
Commentant l'exploit historique réalisé par Armstrong et Aldrin en se posant dimanche sur la Lune, le général Samuel Phillips, directeur du programme "Apollo" a affirmé que "le mot de perfection n'est pas trop fort.".
"Il reste encore deux jours et demi de voyage, a-t-il admis, mais la réussite de deux vols humains précédents (Apollo 8 et 10) sur le même parcours nous Inspire confiance".
Le général Phillips a annoncé que si l'opération "Apollo 11" se termine par un amerrissage dans le Pacifique jeudi, "Apollo 12" lancera eu décembre deux hommes dans la partie occidentale de la zone équatoriale lunaire.
Le général Phillips, qui appartient aux forces aériennes mais est actuellement affecté à la NASA à titre temporaire, a annoncé qu'il s'attend à retourner à la carrière militaire l'automne prochain. Ses prochaines fonctions ne sont toutefois pas encore connues.
Enfin, le Dr Wernher von Braun, chef du Centre spatial de Huntsville dans l'Alabama et "père" de la fusée Saturne, a qualifié la réussite d'Apollo 11 "d'un des plus grands exploits jamais réalisés".

La cabine spatiale s'est débarrassée du "module lunaire" avec une avance considérable sur l'horaire prévu (1 h. 01). Le largage a suivi de peu l'arrivée à bord de la cabine-mère d'Armstrong et d'Aldrin. Il semble que la manoeuvre ait été avancée dès que l'équipage eut constaté que le dispositif d'arrimage des deux engins ne présentait pas toutes les conditions de sécurité.
La cabine "Apollo", quant à elle, doit mettre le cap sur la Terre à 0 h. 57 (4 h. 57 G.M.T.). Le voyage retour doit prendre 59 heures et se terminer, le 14 juillet, par l'amerrissage dans le Pacifique, non loin d'Hawaii.

Houston, 22 juillet.
"Apollo-11", le conquérant de la Lune, rentre à son port d'attache, la Terre. Les trois astronautes américains, réunis à bord de la cabine spatiale, ont vécu, lundi, la dernière des deux journées historiques de leur voyage "de la Terre à la Lune". Le "module lunaire", après exploration d'un coin de la Mer de la Tranquillité, éphémère base terrienne installée sur le sol lunaire, s'est arraché sans incident, à 13 h. 54 (17 h. 54 GMT), à l'attraction de la Lune, ramenant Armstrong et Aldrin vers leur camarade Collins, resté seul aux commandes de la cabine-mère inscrite sur orbite de stationnement.

L'Aigle s'envolait d'un beau coup d'aile à la poursuite d'une proie qui ne devait lui échapper à aucun prix. De cette chasse dépendait la vie des deux premiers visiteurs de la Lune. Le "LEM" répondit à tous leurs ordres et, trois heures et demie plus tard, rendez-vous accompli, le train spatial se reconstituait. Dans la soirée, Armstrong, Aldrin et leur précieux bagage de cailloux lunaires prenaient place à l'intérieur de la cabine de commande, qui se débarrassait du "module lunaire" deux heures plus tôt que prévu.

Le largage du Lem
Auc ours de l'ensemble de la mission qui lui avait été confiée, le module lunaire d'Apollo-11 s'est comporté comme prévu. Le problème des craquelures (et non des craquements) notées dans le revêtement thermique d'une partie du boyau permettant le passage dans le module à partir de la cabine-mère est considéré à la NASA comme une question de détail et on souligne à Houston qu'il n'a pas été à l'origine du rejet prématuré du module une fois qu'il a été amarré à la cabine.
L'équipage était prêt à rejeter le "Lem". Il n'y avait aucune raison d'attendre plus longtemps pour le placer sur son orbite lunaire comme prévu.
Cette nuit, le contact radio avec "Aigle" a été perdu. L'habitacle, qui a permis à Armstrong et à Aldrin de se poser sur la lune et de regagner ensuite le module de commandement, devrait s'écraser sur la surface lunaire.
Les craquelures repérées par Aldrin se sont produites à proximité du système d'amarrage entre les deux parties du train spatial, soit à peu prêts à l'endroit ou un problème identique avait été constaté lors du vol "Apollo-10". Au cours de ce vol, une détérioration du revêtement thermique avait projeté dans la cabine, qui se trouvait en état d'apesanteur, de la poussière de verre qui avait fait éternuer Tbomas Straftord, Eugene Cernan et John Young pendant tout la voyage de retour vers la Terre.
Il ne restait plus qu'une manoeuvre importante à effectuer, celle de l'insertion d'Apollo-11 sur une trajectoire cisterrestre, qui ferait plonger la cabine dans les eaux du Pacifique, jeudi 24 juillet, vers 12 h 31 (16 h 51 GMT).
La "chaloupe de débarquement" abandonnée sur orbite lunaire, la cabine commandée par M. Armstrong se détournait de la lune, mardi à 0 h 57 (04 h 57 GMT), en mettant à feu son propulseur principal pendant une durée de 2 minutes 29 secondes. L'allumage a eu lieu alors que le véhicule spatial survolait encore la face cachée du satellite naturel de la Terre. Dès que les communications d'Apollo ont été rétablies, à 1 h. 06 (5 h. 06 GMT), Armstrong annonça avec chaleur que la manoeuvre avait été couronnée de succès : "Qu'on ouvre les portes du laboratoire d'accueil tout de suite. C'est là, en effet, qu'à leur retour sur la Terre, les trois astronautes seront mis en quarantaine.

Apollo 11 a franchi l'équigravisphère
"Apollo 11" a franchi à 13 h. 53 (17 h. 53 GMT), la ligne imaginaire de l'équigravisphère.
Se soustrayant à l'attraction lunaire, il ne cessera de gagner de la vitesse jusqu'à sa rentrée dans l'atmosphère, dans la matinée de jeudi.
La vitesse d'Apollo11 était à 13 h. 53, de 4.382 km. à l'heure.

Dix heures de sommeil
Ce n'est finalement que vers 13 h. 10 (17 h. 10 GMT) que l'équipage s'est réveillé à l'issue d'une période de sommeil de près de dix heures.
Le centre spatial de contrôle avait envisagé un moment de réveiller l'équipage un peu plus tôt et axait même annoncé ce réveil, mais, après consultation, le "sol" avait décidé de laisser dormir Neil Armstrong, Edwin Aldrin et Michael Collins aussi longtemps qu'ils en auraient besoin, après la longue journée qui avait été la leur lundi, journée marquée notamment par le décollage de la lune et le rendez-vous entre "Aigle", le palier de montée du module lunaire et "Columbia", la cabine-mère.
A 18 h. 32 GMT, .'Apollo 11' se trouvait à 261.500 kilomètres de la Terre vers laquelle il s'approchait à une vitesse de 4.415 kilomètres à l'heure.

Correction de trajectoire
"Apollo 11" a fait avec succès une manoeuvre de correction de trajectoire mardi, vers 16 h. (20 h. GMT). Il s'est agi d'un bref allumage d'une petite fusée directionnelle. Peu après la NASA a fait savoir que la cabine des trois astronautes volait à la vitesse de 4.483 km-h.
Deux autres légères corrections de la trajectoire de la cabine sont inscrites au plan de vol On saura ultérieurement si la NASA les mettra à exécution. Mais on rappelle qu'en revenant de la grande banlieue lunaire à la Terre, "Apollo 8" a et "Apollo 10" s'étaient bornés à une seule correction.
A 18 h. 32 (22 h. 32 GMT) "Apollo 11" se rapprochait à une vitesse de 4.600 km. à l'heure de la Terre d'où il se trouvait éloigné de 302.000 kilomètres.


Apollo 11 exact au rendez-vous avec la Terre

"La plus grande semaine que le monde a vécu depuis sa création" a déclaré Nixon aux astronautes qui venaient d'entrer dans la cabine d'isolation

A bord du "Hornet", 24 juillet.
Grandeur et bonhomie, familiarité blagueuse et fierté nationale, politique et mots d'esprit, c'est dans cette atmosphère unique au monde que s'est déroulée à bord du porte-avions "Hornet" la première conversation entre le président des Etats-Unis et les trois cosmonautes, dont deux venaient de fouler la surface de la Lune, Il y a quatre jours à peine.

Au moment ou le rideau masquant la porte vitrée de la caravane s'est écarté sur les trois astronautes au sourire épanoui, qui faisaient des grands gestes des bras, le président Nixon s'est adressé à eux (par le truchement d'un micro) en les appelant par leurs prénoms, et même leurs surnoms : "Neil, Buzz et Mike". Il leur a fait part des innombrables messages de félicitations. Puis a ajouté : "J'ai rencopntré les trois femmes les plus magnifiques, Janet, Pat et Joan. Elles m'ont chargé de vous dire tout leur amour et de vous féliciter. Je me suis permis de prendre rendez-vous avec elles (grands éclats de rire). Je les ai invité à un grand dîner d'Etat, qui réunira le 13 août ministres et ambassadeurs à la Maison-Blanche. Voulez-vous venir aussi ? (Les trois astronautes auront terminé leur quarantaine le 11 août).
Refaisant de grands gestes amicaux, le président s'est écrié : "Vous avez des mines superbes. D'ailleurs, Frank Borman qui est là, venez Frank, approchez... Frank dit que vous semblez être revenus de la Lune plus jeunes qu'à votre départ." Neil Armstrong a alors répliqué : "Nous sommes plus jeunes que Frank."
Puis, redevenant sérieux, le président a poursuivi : "Savez-vous ce que j'ai pensé en vous voyant descendre du ciel ? J'ai pensé que c'est la plus grande semaine que le monde ait vécu depuis sa création. Parce que, grâce à vous, le monde est devenu plus grand, infiniment. Je vais découvrir au cours du voyage autour du monde que j'entreprends - et le secrétaire d'Etat William Rogers dans son voyage en Asie le découvrira aussi - que, grâce à ce que vous venez de faire, des pays du monde ne se sont jamais sentis plus proches les uns des autres. Et nous vous remercions pour cela. Et nous, grâce à vous, pourront remplir notre tâche encore mieux."

A bord du "Hornet", 24 juillet.
Le mémorable voyage d'Apollo 11 se termine. Les conquérants de la Lune ont regagné la Terre et sont sains et saufs à bord du porte-avions "Hornet", chargé de leur récupération.
L'opération "retour sur terre" s'est déroulée avec la même précision rigoureuse que le reste de la mission.


A 16 h. 20 (G.M.T.), comme prévu, les astronautes ont largué leur propulseur principal, le laissant se désagréger au contact des premières couches de l'atmosphère. Quinze minutes plus tard, la cabine fonçant vers le Pacifique, à une vitesse de 39.700 kilomètres à l'heure, son bouclier thermique orienté vers la Terre, entrait en contact avec l'atmosphère. La résistance de l'air faisait jaillir des flammes tout autour de la cabine et faisait rougir le bouclier thermique dont la température était portée à 2.316 degrés centigrades, tandis que celle de l'habitacle demeurait à 27 degrés.
L'entrée se fait dans un "couloir" de sécurité de 60 kilomètres de large, sous un angle de 6,5 degrés par rapport à l'horizontale, alors que les communications radio entre la cabine et le sol sont interrompues. La coupure dure quatre minutes.

Exacte au rendez-vous
A 16 h. 40, GMT, le contact est rétabli, les astronautes signalent que tout va bien à bord, dans le ciel encore sombre - il n'est que 6 h. 40 à Hawaii - on aperçoit, du porte-avions, la cabine spatiale. Elle a été repérée également par les avions et hélicoptères de l'équipe de récupération.
A 16 h. 44, GMT, les parachutes de stabilisation d'Apollo s'ouvrent automatiquement. Deux minutes plus tard, les trois parachutes principaux se déploient à leur tour, la cabine descend lentement "droit sur la cible".
Du pont du "Hornet", le président Nixon, venu spécialement accueillir les héros de l'espace, observe la descente à la jumelle. Frank Bormann, commandant d'Apollo 8, premier vaisseau spatial à avoir fait, en décembre 1968, un vol circumlunaire, et M. Thomas Paine, administrateur de la NASA, se trouvent à ses côtés. M. William Rogers, secrétaire d'Etat, est également présent.
16 h. 49 GMT : Apollo amerrit, La cabine est exacte au rendez-vous, elle se pose dans le Pacifique, à 15 km. du "Hornet", par 13,6 degrés de latitude nord et 169,09 degrés de longitude ouest, c'est-à-dire à 1,6 km. du point d'impact prévu.

Le nez en bas
L'homme est de retour sur terre. Il est revenu après avoir parcouru 1.255.000 km. pour aller poser le pied sur la Lune et prendre possession d'une planète autre que la Terre au nom de l'humanité.
La cabine a plongé le nez en bas, incident déjà survenu lors de l'amerrissage d'Apollo 7 et d'Apollo 8 et qui ne présente aucun danger pour l'équipage. Quelques minutes plus tard d'ailleurs, elle se redressait, soulevée par des ballons gonflables automatiquement, et flottait sur l'océan balancée par des vagues n'atteignant pas un mètre.

Désinfection
A 17 heures (GMT), 7 heures du matin. Les hommes-grenouilles avaient atteint la cabine. Ils fixent immédiatement une ceinture de flottaison autour d'Apollo, gonflent le radeau pneumatique et branchent le téléphone pour entrer en communication avec les astronautes qui les rassurent sur leur sort. Ils sont en excellente condition physique.
Vingt minutes après l'amerrissage, tout est prêt pour la récupération, la manoeuvre s'est déroulée à un rythme record.
L'écoutille s'ouvre. Un homme-grenouille tend aux astronautes des combinaisons aseptisées munies d'un casque à visière et d'un masque à gaz, semblables à celle qu'il porte lui-même. L'homme-grenouille leur passe également une "bombe" contenant une solution antiseptique dont ils vont asperger leurs combinaisons à l'intérieur de leur habitacle. L'écoutille est refermée. Les hommes-grenouilles vaporisent l'extérieur de la cabine.
Les astronautes sont, en effet, en quarantaine depuis que Neil Armstrong et Edwin Aldrin ont décollé de la Lune, emportant peut-être avec eux des micro-organismes lunaires susceptibles de "contaminer" la Terre. Les deux hommes, ainsi que leur coéquipier Michael Collins resteront isolés jusqu'au 11 août. Personne ne pourra les approcher tant qu'ils n'auront pas été déclarés vierges de tout microbe lunaire.

A bord du "Hornet"
L'écoutille s'ouvre de nouveau, les astronautes, revêtus de leur combinaison aseptisée, s'installent à bord du radeau pneumatique. La cabine, son précieux chargement d'échantillons lunaires à l'intérieur, est verrouillée, non sans quelques difficultés d'ailleurs. Elle doit être bientôt hissée à bord du porte-avions.
Le "Hornet" se rapproche. Le président Nixon, jumelles aux yeux, observe dans leur radeau les trois voyageurs interplanétaires auxquels il ne pourra serrer la main, mais qu'il félicitera dés leur arrivée à bord par téléphone.
A 17 h. 50 GMT, une heure après l'amerrissage, soit exactement le délai prévu, lors des répétitions de la manoeuvre de récupération, les astronautes sont hissés tour à tour à bord de l'hélicoptère qui les amène sur le "Hornet". Leur radeau pneumatique, "contaminé" lui aussi, est coulé, après avoir été désinfecté.
A 17 h. 57 GMT, l'hélicoptère se pose sur le pont supérieur du "Hornet".
La joie éclate à bord du porte-avions quand l'hélicoptère se pose : le président Nixon applaudit et agite la main, des centaines de marins clament et chantent leur bienvenue aux astronautes.
Au son de "Columbia, gem oh the ocean" (Columbia, joyau de l'océan), l'hélicoptère s'immobilise. Un tracteur le tire vers un ascenseur qui le descend au pont Intérieur. On avance une échelle de coupée de quelques marches. La porte s'ouvre. Les astronautes sortent, Armstrong le premier. Ils saluent de la main, font huit pas, entrent dans la caravane d'isolation biologique qui les attend. La porte est refermée. Tout est désinfecté sur leur passage, jusqu'à la trace de leurs pas.
Dans la caravane, Armstrong et ses coéquipiers sont accueillis par le Dr William Carpentier, médecin de la NASA, et par John Irasaki, un technicien, tous deux volontaires pour partager la quarantaine des astronautes.

La capsule spatiale après son amerissage


Armstrong, dans sa tenue spéciale, descend de l'hélicoptère.
Les trois astronautes descendent de l'hélicoptère à leur arrivée sur le porte-avion.

Les astronautes en quarantaine

A bord du "Hornet", 24 juillet.
Ayant quitté la cabine "Apollo 11", sur les flots du Pacifique, Armstrong, Aldrin et Collins, "lépreux lunaires", "pestiférés de l'espace", se sont engouffrés, dès leur arrivée sur le porte-avions "Hornet" dans la caravane d'isolement biologique dans laquelle ils vivront jusqu'à leur arrivée au "laboratoire de réception humaine" de Houston.
La deuxième phase de leur quarantaine qui doit protéger la Terre d'éventuels micro-organismes lunaires pouvant la contaminer a commencé.
C'est en hommes venus d'un autre monde qu'ils y sont entrés, conformément aux ordres qui leur ont été donnés par les biophysiciens et les médecins. Revêtus de leur combinaison biologique, pourvus d'un casque à visière et d'un masque à gaz qui les font ressembler à des savante atomistes ou à des militaires participant à des manoeuvres dont le thème serait la poursuite des combats dans une zone où seraient tombés des obus nucléaires ou des bombes atomiques tactiques. Armstrong, Aldrin et Collins n'avaient pas l'air de Terriens.

Examen médical
Ce n'est qu'à l'intérieur de leur caravane d'aluminium, Installée sur le pont inférieur du "Hornet", qu'ils ôteront leur étrange accoutrement, redevenant des habitants de la terre des hommes.
Les astronautes ont subi leur premier examen médical : le Dr William Carpentier, leur médecin, a fait savoir que les trois hommes "paraissaient être en grande forme".
Le porte-parole de la NASA, qui a rendu public ce premier bulletin de santé, a précisé qu'il ne s'agissait là que d'un examen général et qu'il fallait attendre les résultats de l'analyse de leur sang pour savoir s'ils n'avaient pas été "contaminés" par des micro-organismes lunaires. Le porte-parole a ajouté que les astronautes s'étaient douchés et avaient pris leur premier repas terrestre. Il a enfin déclaré que Collins, seul des trois hommes à avoir communiqué ses impressions, s'était déclaré très heureux d'être rentré sur terre et très fier de ce qu'ils avaient accompli.
Deux terriens, un médecin et un technicien, se sont portés volontaires pour vivre avec Armstrong, Aldrin et Collins jusqu'à leur arrivée à Houston, dans la caravane. Le premier fera les premiers examens médicaux, le second l'assistera. Ainsi donc, jusqu'au 27 juillet, 4 heures du matin (8 h. 00 GMT), heure de l'entrée des astronautes dans le "Laboratoire de réception lunaire", cinq hommes seront considérés comme contaminés par la lune.

Les trois astronautes, dans la "cabine", conversent avec le Président Nixon.